J'irai manger des khorovadz

J'irai manger des khorovadz

restaurer leurs propriétaires. Je serais bien resté prendre une pause sur
cette terrasse calme et délicieuse au bord du Doubs où l’on regarde
passer tous ces cyclotouristes. Chacun aurait une histoire à raconter. On
aperçoit la citadelle Vauban qui domine la cité réalisée par l’architecte
du même nom.

Halte suivante : le bureau de l’« Est Républicain » en plein centre-
ville. Évidemment avec mon vélo mon drapeau et mon chargement la
plupart des gens se retournent sur mon passage! Une aimable journaliste
m’accueille puis m’invite à une séance photo avec le spécialiste de la
maison. Après cette rencontre j’avais en principe rendez-vous avec
France 3 mais comme je n’ai plus de téléphone je ne peux pas joindre la
chaîne. Je décide alors de me rendre directement dans ses bureaux. Je me
présente à l’accueil après l’identification à la barrière d’entrée du
parking.

• Ah c’est vous le monsieur en vélo couché?
  D’accord je suis repéré (comment a-t-elle deviné ?). Rouler
  différemment. C’est un critère qui m’a fait choisir ce type de vélo voilà
  presque trois années en arrière.

Être différent. C’est peut-être une aspiration parfois inconsciente
façonnée par mon histoire familiale mon éducation et qui a motivé
beaucoup de mes choix depuis l’enfance. Mes parents avaient peu de
revenus aussi vivaient-ils souvent de dons en nature et en argent. Au lieu
d’en être complexé j’en ai fait un atout. J’étais fier de porter des habits
qu’on n’achetait pas. Je me souviens de ce manteau que j’affectionnais et
qui se boutonnait à gauche. J’ai découvert quelques années plus tard que
c’était la caractéristique d’un manteau de femme! Un usage qui date du
XVIIe siècle. Qu’importe! J’étais fier également de ne pas avoir de télé
à la maison. Oui j’étais fier simplement fier d’être différent et d’avoir un
père au métier atypique. Fier de me sentir autre sans pour autant le
revendiquer. Fier de ce numéro 99 dans mon immatriculation de Sécurité
sociale qui signifie être né à l’étranger même si à l’époque Oran ma
ville natale était administrativement française.