J'irai manger des khorovadz

J'irai manger des khorovadz

cyclovoyageur débutant j’avais commencé à saluer tous ces
cyclotouristes en les croisant remarquant peu de réponses en retour de
mes gestes désintéressés et amicaux. Je teste alors une autre attitude :
j’attends que ceux qui arrivent en face se manifestent les premiers. Les
initiatives sont également limitées. Il me semble que quelques-uns
pourtant hochent timidement la tête. Deux solutions semblent se dessiner
pour comprendre ce qui paraît une impolitesse ou un dédain des
étrangers. J’en déduis que soit la légendaire discrétion helvète les
empêche de s’extérioriser soit il s’agit d’une pure coïncidence : le petit
hochement de tête doit être provoqué par une aspérité de la route à cet
endroit ou la surprise de voir un tel engin en face d’eux!
Plus tard je découvre que la route alterne de manière désinvolte et
impertinente entre la Suisse et l’Allemagne de part et d’autre du Rhin.
Le chemin fait fi des traditions et des cultures il relie simplement les
hommes. Heureusement il y a Schengen : je n’aurai pas l’obligation de
présenter mon passeport à chaque passage de pont. En traversant ces
petits villages bordant affectueusement le fleuve je prends plaisir à
m’émerveiller de la décoration des maisons. Même si elles datent parfois
de plusieurs centaines d’années ces fermes sont pour la plupart
superbement entretenues. La propreté helvétique séculaire n’est pas une
légende. Rien ne traîne pas un bout de bois pas une mauvaise herbe pas
un déchet. Dans une rue pavée menant à une église l’une de ces bâtisses
attire mon attention. Un texte sur le fronton en fait remonter l’histoire au
XIVe siècle. La façade d’un blanc laiteux est traversée par des
colombages peints en couleur marron-rouge sur ses quatre niveaux.

Voilà plusieurs fois que j’aperçois sur le bord de la route en lisière des
champs de grands panneaux avec des chiffres. Des prix qui
m’intriguent. Je m’approche dans l’espoir d’en découvrir la signification.
Je me rends compte que ce sont des espaces de cueillette de fleurs en
libre-service. Nous sommes plutôt habitués à ce genre d’installation pour
les fruits ou les légumes mais pas pour les fleurs. Ici le concept est
encore plus poussé : il n’y a personne et la cueillette ainsi que le
règlement se font en totale autonomie. À vous de calculer en fonction