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SAMEDI 9 NOVEMBRE 2019 france| 9
D
eux policiers vont
comparaître devant le
tribunal correctionnel
à Paris en novembre et
en décembre pour répondre aux
accusations de violences volontai
res par personne dépositaire de
l’autorité publique dans le cadre
de la manifestation du 1erMai.
C’est par un communiqué de
presse, publié jeudi 7 novembre,
que le parquet de Paris a annoncé
la tenue de ces deux procès, une
première pour des membres des
forces de l’ordre depuis le début du
mouvement des « gilets jaunes »,
en novembre 2018. Lors d’un en
tretien au Parisien à la fin du mois
de mai, Rémy Heitz, le procureur
de Paris, avait assuré que des poli
ciers seraient renvoyés devant la
justice avant la fin de l’année.
Le premier policier, qui appar
tient aux CRS, avait été immorta
lisé en train de jeter un pavé en di
rection de la foule, projectile qui
n’a pas fait de blessés. Quant au
second, membre d’une compa
gnie d’intervention de la Préfec
ture de police, il avait été filmé
alors qu’il giflait violemment un
manifestant pacifique, geste qui a
entraîné pour ce dernier une in
capacité temporaire de travail su
périeure à huit jours.
Les deux vidéos avaient à l’épo
que été très médiatisées, à l’issue
d’un défilé marqué par une très
forte tension entre les forces de
l’ordre et le cortège, composé de
« gilets jaunes », de manifestants
traditionnels du 1erMai et de
membres de l’ultragauche. « Ce
sont deux cas très différents, dé
crypte une source policière. Dans
celui du jet de pavé, certes on n’ap
prend pas ça à l’école, mais il n’y a
pas de victime, pas de plainte, pas
de dégâts matériels. Le collègue
aurait pu hériter d’un rappel à l’or
dre administratif. Le deuxième cas
est plus compliqué à défendre. »
Aucune mise en examen
Sur les 212 enquêtes confiées par
le parquet de Paris à l’inspection
générale de la police nationale
(IGPN), 66 font toujours l’objet
d’investigations et 146 ont été
clôturées. Les 18 cas les plus
graves ont donné lieu à des ouver
tures d’information judiciaire,
toujours en cours, et ont été
confiés à des juges d’instruction.
Il s’agit principalement d’affaires
de mutilations.
Cinquantequatre autres procé
dures ont été classées sans suite,
dont 33 pour infraction insuffi
samment caractérisée, sept pour
absence d’infraction et deux pour
carence du plaignant. Dans douze
affaires, les enquêteurs n’ont pas
réussi à identifier l’auteur des
faits. Enfin, 72 dossiers clôturés
par l’IGPN sont toujours en cours
d’analyse au parquet de Paris
pour décider des suites à donner.
A ce stade, un an après le début de
la mobilisation, aucune mise en
examen n’a donc été prononcée.
Soucieux de ne pas apparaître
responsable d’éventuelles len
teurs de procédure, le ministère
de l’intérieur a annoncé, le 31 oc
tobre, que l’IGPN avait d’ores et
déjà transmis à la justice pour ap
préciation les deux tiers des
313 enquêtes pour violences poli
cières liées au mouvement des
« gilets jaunes » où elle avait été
saisie. Or, en pratique, le parquet
de Paris concentre les deux tiers
des dossiers. L’annonce de la con
vocation des deux policiers d’ici la
fin de l’année est une forme de ré
ponse à ces sousentendus.
Affaires emblématiques
Ces derniers jours, certaines affai
res, pourtant emblématiques de
dérapages avérés, ont été classées
sans suite – ou se sont révélées to
talement enlisées. La plainte d’un
adolescent à Strasbourg n’a ainsi
abouti à rien après dix mois d’en
quête. Le jeune homme avait été
blessé gravement au visage par
un tir de lanceur de balles de
défense (LBD) en janvier, alors
qu’il sortait d’un centre commer
cial et ne participait pas à la mani
festation. Les policiers de l’IGPN
ont été dans l’incapacité d’identi
fier le tireur.
Même cas de figure à Marseille
où, selon Mediapart qui a eu accès
au dossier, les enquêteurs n’ont
toujours pas identifié les policiers
qui ont frappé en groupe une
jeune femme de 19 ans qui ren
trait chez elle, le 8 décembre 2018.
Maria, qui a également reçu un tir
de LBD à la cuisse, a eu le crâne
fracturé et le cerveau touché.
Autre affaire emblématique à
Marseille, l’information judiciaire
ouverte après la mort de Zineb Re
douane, une octogénaire touchée
le 1er décembre 2018 par une gre
nade lacrymogène alors qu’elle
fermait les volets de son apparte
ment au quatrième étage, n’a tou
jours pas permis de découvrir le
quel des cinq CRS dotés ce jourlà
d’un lanceur avait effectué le tir.
L’affaire a été dépaysée à Lyon en
août 2019. L’enquête avait montré
que le procureur de la République
de Marseille, chargé des premiè
res investigations, était luimême
présent sur les lieux de la mani
festation le jour des faits, dans le
cadre de ses fonctions.
A Besançon, ce n’est pas le dé
faut d’identification mais la ques
tion de l’intention qui a déter
miné le classement sans suite. Un
jeune homme porteur d’un gilet
jaune avait reçu un coup de
matraque en pleine tête le
30 mars 2019, alors qu’il ne com
mettait aucune violence. Le pro
cureur de la République, Etienne
Manteaux, cité par L’Est républi
cain le 24 octobre, a estimé qu’au
vu des images, le policier n’avait
pas d’« intention coupable » et
avait agi de la sorte car il croyait
que le manifestant allait ramasser
une grenade des forces de l’ordre
tombée au sol. Mathias P., à qui
« on ne reproche aucune exac
tion », a précisé le magistrat,
s’était vu prescrire cinq jours d’in
capacité totale de travail.
nicolas chapuis
et élise vincent
SUR LES 212 ENQUÊTES
CONFIÉES PAR LE PARQUET
DE PARIS À L’INSPECTION
GÉNÉRALE DE LA POLICE
NATIONALE, 66 FONT
TOUJOURS L’OBJET
D’INVESTIGATIONS ET
146 ONT ÉTÉ CLÔTURÉES
Deux policiers vont
être jugés à Paris pour
violences volontaires
Ces fonctionnaires seront les deux premiers
à devoir répondre de leurs actes devant un
tribunal, depuis le début des « gilets jaunes »
Delevoye recadré sur les retraites
Le hautcommissaire a exprimé ses réserves à propos de la future réforme
V
oilà qui rajoute un peu de
confusion dans un dos
sier déjà complexe. A
moins d’un mois d’un mouve
ment de grève qui s’annonce très
suivi, le 5 décembre, l’exécutif a
étalé ses divisions sur la réforme
des retraites. Depuis plusieurs se
maines, l’Elysée et le gouverne
ment s’efforcent de désamorcer la
colère qui monte sur le sujet, en
répétant que toutes les options
sont sur la table et que le projet
sera mis en œuvre de façon très
graduelle. Le 28 octobre, Emma
nuel Macron a même évoqué le
scénario dit de la « clause du
grandpère », qui consisterait à ap
pliquer le changement de règles
aux nouveaux entrants dans le
monde du travail, à partir de 2025.
Mais cette option ne convient
pas à tout le monde – en premier
lieu, à JeanPaul Delevoye. Dans
un entretien au Parisien, le haut
commissaire chargé du dossier a
déclaré, jeudi 7 novembre, qu’il
était opposé à cette solution.
« Cela reviendrait à créer un 43e ré
gime, atil indiqué. C’est impossi
ble! » Si « la clause du grandpère
[est retenue], il faut la faire pour
tout le monde », pour une « ques
tion d’équité », ce qui « veut dire
que l’on renonce à la réforme », car
celleci ne produira ses effets
qu’après plusieurs décennies.
M. Delevoye avait déjà confié
récemment qu’il était défavora
ble à une telle hypothèse, mais il
ne l’avait jamais exprimé aussi
nettement, en public.
« Mise au point »
« Poser une question et donner sa
position pour susciter le débat,
c’est le cœur de la méthode Dele
voye, non? », défendon dans l’en
tourage du hautcommissaire. La
démarche n’a, toutefois, pas été
appréciée, au plus haut sommet
de l’Etat. Jeudi, durant le conseil
des ministres, M. Macron et
Edouard Philippe ont, selon une
source au sein de l’exécutif, pris la
parole pour rappeler, en subs
tance, qu’« il n’y a pas deux lignes »
mais une seule. Elle a été énoncée
à différentes reprises – notam
ment le 28 octobre par M. Macron
ou le 12 septembre, par le premier
ministre, dans un discours au
Conseil économique, social et
environnemental. « La volonté
n’est pas de gouverner contre les
Français mais de tenir compte de
leur avis et de leur parcours de
vie », ajoute cette même source.
Si M. Delevoye avait déjà tenu
des propos identiques à ceux rela
tés dans Le Parisien, « ce n’était
pas très malin de le redire au mo
ment où on réaffirme de manière
constante depuis un mois que les
différentes hypothèses sont sur
la table », complète un autre
conseiller, au sein de l’exécutif.
A la sortie du conseil des minis
tres, la porteparole du gouverne
ment a minimisé l’événement. « Il
n’y a pas de divergences de ligne à
l’intérieur du gouvernement », a
assuré Sibeth Ndiaye, en estimant
que M. Delevoye avait seulement
manifesté la « préférence qui était
la sienne ». Mais, atelle précisé,
« c’est le premier ministre qui est le
chef du gouvernement et qui, à ce
titre, met en œuvre la politique qui
lui est demandée par le président
de la République ». Une façon de
rappeler à M. Delevoye que ce
n’est pas lui qui décide.
Le message a été parfaitement
reçu par l’intéressé. Jeudi, l’exmé
diateur de la République a expli
qué sur BFMTV qu’il n’est pas
« un homme de polémiques ». « A
partir du moment où je livre au dé
bat politique les options, il appar
tient aux décideurs politiques, le
président et le premier ministre, de
décider, et cette décision s’impo
sera à tous », atil poursuivi. Ven
dredi matin, M. Philippe devait
s’entretenir avec M. Delevoye au
téléphone. Une conversation en
forme de « mise au point », selon
un acteur au cœur du dossier.
Pour ne pas dire un recadrage.
raphaëlle besse desmoulières
et bertrand bissuel
Note attribuée à l’appli Orange Bank sur l’App Store®en octobre 2019. App Store®est une marque déposée d’Apple Inc.
* Proposition digitale des banques de détail en France, Classement D-Rating, juillet 2019.
Orange Bank – SA au capital de 659775712 € – 67 rue Robespierre – 93107 Montreuil Cedex – 572 043 800 RCS Bobigny – Orias no07 006 369 (www.orias.fr).
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