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ÉCONOMIE & ENTREPRISE
MARDI 26 NOVEMBRE 2019
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LVMH veut « faire briller » Tiffany
Le géant du luxe s’est offert le joaillier pour 14,7 milliards d’euros. Il s’agit de sa plus grosse acquisition
T
iffany a cédé aux avan
ces de Bernard Arnault.
Le conseil d’administra
tion du joaillier new
yorkais recommande la dernière
offre du groupe de luxe français,
« à un prix de 135 dollars par ac
tion », ont annoncé les deux
groupes par communiqué lundi
25 novembre, peu avant l’ouver
ture de la Bourse de Paris.
Au terme de cet « accord défini
tif », LVMH s’est engagé à repren
dre 350 millions de dollars
(317 milliards d’euros) de dettes
que portait l’américain. L’opéra
tion « valorise Tiffany à environ
14,7 milliards d’euros », précisent
les deux groupes.
Tiffany devrait définitivement
tomber dans le giron du groupe
français au milieu de l’année
2020, après approbation de l’opé
ration par les actionnaires qui
doivent se réunir en assemblée
générale au premier trimestre.
Le groupe de Bernard Arnault
dont les ventes ont atteint
46,7 milliards d’euros en 2018 s’est
lancé à l’assaut de Tiffany dès cet
été selon des sources bancaires.
Mioctobre, Antonio Belloni,
l’homme de confiance de M. Ar
nault, s’est rendu à Manhattan
pour remettre une première offre
au directeur général de Tiffany
& Co, Alessandro Bogliolo. Les
deux dirigeants italiens se con
naissent bien. Le patron du
joaillier est un ancien de LVMH ; il
a dirigé les opérations de Bulgari,
entre 1996 et 2012, ainsi que celles
de Sephora, autre filiale du
groupe français, aux EtatsUnis.
Le directeur général délégué de
LVMH propose de racheter la mar
que de luxe américaine pour une
somme de 14,5 milliards de dol
lars en numéraire, soit 13 mil
liards d’euros. Bien que représen
tant une prime de 30 % par rap
port au dernier cours de Bourse
de Tiffany & Co à Wall Street, cette
première offre au prix de 120 dol
lars par action est fraîchement ac
cueillie. Le conseil d’administra
tion tarde à y répondre. Et l’en
semble du projet est révélé par
l’agence Bloomberg, samedi
26 octobre. Le lundi suivant, dès
l’ouverture des marchés bour
siers américains, le titre Tiffany
& Co flambe à Wall Street.
A tel point que, depuis trois se
maines, l’action flirtait avec le
prix initial proposé par le géant
français du luxe. Après de nouvel
les négociations et surenchères,
les deux parties ont finalement
abouti à un accord dimanche
24 novembre. Le groupe de Ber
nard Arnault a accepté d’ajouter
1,7 milliard d’euros pour s’offrir ce
joyau américain.
LVMH signe ici la plus grosse ac
quisition depuis sa création
en 1987 et la plus importante opé
ration de rachat dans le secteur. A
contrario de la reprise de l’améri
cain Belmont, groupe hôtelier de
46 établissements, pour un mon
tant de 3,2 milliards de dollars en
avril, M. Arnault ne signe pas là
une diversification.
LVMH est déjà un poids lourd du
marché de la joaillerie. Il a réalisé
4,1 milliards d’euros de ventes
en 2018, grâce à ses bagues Chau
met, ses parures Fred et surtout
grâce aux collections de Bulgari,
marque italienne rachetée en 2011.
Alors à quoi bon reprendre aussi
l’américaine Tiffany? Le groupe
français espère mieux rivaliser
avec le suisse Richemont, leader
incontesté de ce marché grâce à
ses griffes Cartier et Van Cleef
& Arpels. Il préfère cependant évo
quer le « potentiel » de la marque
américaine et son emprise sur le
marché d’outreAtlantique.
Stratégie de relance
Tiffany réalise 44 % de ses ventes
sur le continent américain, mais
la marque dispose d’un réseau de
300 boutiques dans le monde.
Dès lors, aux yeux du leader mon
dial du luxe, Tiffany serait un
atout pour accélérer la cadence
sur ce marché dont le moteur est
alimenté par l’enrichissement
des clients asiatiques et leur appé
tit pour les marques statutaires.
La croissance annuelle des ventes
de solitaires, pendentifs et autres
bracelets est évaluée à 7 % par le
cabinet Bain & Co.
M. Arnault promet de « faire
briller » cette marque iconique
dont le magasin de New York situé
à Manhattan sur la cinquième
avenue était le décor du film
Diamants sur canapé de Blake Ed
wards en 1961 avec Audrey
Hepburn. De fait, toutes les facet
tes du diamant Tiffany méritent
un sérieux polissage. Car, malgré
une stratégie de relance menée
par M. Bogliolo, ses ventes
- 4,4 milliards de dollars en 2018 –
progressent faiblement. Et ses ma
gasins présentent un rendement
au mètre carré bien inférieur aux
standards du secteur et à ceux ce
LVMH, assure un porteparole.
Le groupe français entend appli
quer à Tiffany la méthode de re
lance qu’il a mise en œuvre chez
Bulgari avec succès. Dès son ra
chat en 2011 pour un montant de
3,7 milliards d’euros, LVMH a al
loué des moyens colossaux afin
de la ranimer : nouvelles bouti
ques aux meilleures adresses,
campagnes de publicité et nou
velles créations. Le numéro un
mondial du luxe, lui, a même per
mis de lancer des palaces à son
nom. C’est devenu l’exemple à
suivre : en sept ans, son activité
aurait plus que doublé, atteignant
un chiffre d’affaires de près de
2,5 milliards d’euros en 2018. Tif
fany doit suivre le même destin.
La Bourse s’interroge déjà sur le
retour sur investissement que le
groupe français pourrait espérer
de ce rachat. A l’ouverture des
marchés, à Paris, lundi, le titre
LVMH a gagné 1,7 %.
juliette garnier
Un magasin Tiffany & Co
à Beverly Hills,
en Californie, en 2017.
BLOOMBERG VIA GETTY IMAGES
Le groupe
français espère
mieux rivaliser
avec Richemont,
leader du
marché, grâce
à Cartier et Van
Cleef & Arpels
Anne Hidalgo veut maîtriser et taxer les livraisons d’Amazon à Paris
Le front politique s’élargit en France contre le leader mondial de l’ecommerce. Les reproches sont d’ordre environnemental, fiscal et social
H
aro sur Amazon. Plu
sieurs initiatives politi
ques et associatives ré
centes visent le leader mondial de
la vente en ligne : la maire de Paris
(PS), Anne Hidalgo, propose ainsi
deux mesures pour réguler l’e
commerce, jugé « facteur de pré
carisation, source de congestion et
de pollution », dans une tribune
signée par son adjoint à l’urba
nisme, JeanLouis Missika, Ariel
Weil, maire du 4e arrondissement,
et Diana Filippova, cofondatrice
de l’agence de communication
Stroïka, parue dimanche 24 no
vembre sur Lemonde.fr.
« La loi doit autoriser les collecti
vités à créer une écoredevance
qu’elles pourront imposer sur la li
vraison à domicile », dit le texte,
invoquant le « principe pollueur
payeur ». Amazon serait le pre
mier visé mais le texte men
tionne aussi « Uber Eats et les
autres platesformes ».
Les auteurs veulent aussi « limi
ter » les livraisons : dans certains
quartiers, « elles ne seront possi
bles qu’à certaines heures et il fau
dra y réserver sa place », écrivent
ils. Ce dispositif pourrait être
étendu à tout Paris et accompagné
d’une « brigade de la police muni
cipale » spécifique.
En parallèle, un rapport est paru
dimanche pour dénoncer « l’im
punité fiscale, sociale et environne
mentale » d’Amazon. Il associe
l’ONG écologiste Les Amis de la
Terre, l’association pour la justice
fiscale Attac et le syndicat Solidai
res. Selon ces derniers, la firme de
Jeff Bezos aurait sousdéclaré son
chiffre d’affaires en France de 58 %
en 2017 et AWS, sa filiale d’héber
gement de données dans le cloud,
aurait émis « 55,8 millions de ton
nes de gaz à effet de serre en 2018,
soit autant que le Portugal ».
« Destruction d’emplois »
De son côté, Mounir Mahjoubi,
député LRM de Paris (19e) et exse
crétaire d’Etat chargé du numé
rique, a assuré, jeudi, dans une
note, « qu’Amazon détruit plus
d’emplois qu’il n’en crée ». Il a chif
fré les pertes à 7 901 tempsplein
en France, en imaginant combien
d’emplois auraient été nécessai
res pour assurer toutes les ventes
de la plateforme par le biais des
commerces traditionnels.
« Nous réfutons ces informations
trompeuses qui comportent de
très nombreuses erreurs factuelles
et spéculations sans fondement, a
répondu dimanche l’entreprise.
Amazon s’acquitte de l’ensemble
des impôts et taxes exigibles en
France et dans tous les pays où il
est présent. Avec plus de 9 300 em
plois en CDI en France d’ici la fin de
l’année, nous sommes devenus un
employeur majeur et notre mar
ketplace a permis de créer des di
zaines de milliers d’emplois sup
plémentaires au sein des PME qui
vendent sur notre site. » Le groupe
ajoute que le commerce de détail
a gagné des emplois en France en
tre 2013 et 2016. En outre, les chif
fres avancés pour AWS surévalue
raient l’importance du secteur du
cloud et se fonderaient sur des
serveurs moins efficaces énergé
tiquement que les siens.
Ces chiffres ne sont que des
estimations calculées à partir de
données extérieures à Amazon,
qui fournit peu de statistiques.
Mais le front politique contre
l’entreprise de Jeff Bezos s’élargit
en France et les griefs dépassent
désormais les critiques sur la
dureté des conditions de travail.
Aux EtatsUnis, la contestation
est plus forte et le poids du groupe
est un des thèmes de la présiden
tielle de 2020.
alexandre piquard
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