Les Echos - 02.10.2019

(Brent) #1

22 // HIGH-TECH & MEDIAS Mercredi 2 octobre 2019 Les Echos


l’entreprise auraient atteint 6 mil-
lions d’euros (un chiffre qui intégre-
rait toutefois des éléments excep-
tionnels non récurrents), pour un
chiffre d’affaires qui est passé de 45
à 28 millions entre 2016 et 2018.
Le journal a vu ses ventes papier et
ses recettes publicitaires reculer ces
dernières années, dans un environ-
nement difficile pour tous les grou-
pes de presse. « II y a eu un certain
nombre de troubles et de grèves sur ces
territoires. Et de nombreux points de
vente et kiosques ont fermé, ce qui a
encore accéléré l’érosion de la diffu-
sion de ces titres », note pour sa part
Jean-Clément Texier, spécialiste des
médias. Le pôle de presse ne ven-
drait plus que 25.000 exemplaires
par jour, en semaine, de ses trois édi-
tions papier et 58.000 le week-end,
selon des chiffres non officiels.

Retrouver un modèle viable
Pour survivre, le groupe doit trou-
ver rapidement des financements.
« En dessous de 4 millions d’euros, on
ne pourra rien faire pour moderniser
nos titres et reconstruire un modèle
viable, ce qui passe essentiellement
par des investissements dans le digi-

tal. Et il nous faudrait 6 à 8 millions
pour avoir une parution papier
régulière », confie aux « Echos »
Frédéric Verbrugghe, qui estime
que « publier une édition papier
tous les jours dans trois départe-
ments est une gageure et ne peut être
que déficitaire ».
Le directeur général souhaiterait
réunir à la fois des financements
publics et privés. France-Antilles
espère notamment pouvoir bénéfi-
cier des aides à la presse versées par
l’Etat. Reste que celles-ci répondent
à des critères objectifs et ne peuvent
être « fléchées » de manière discré-
tionnaire vers un titre de presse,
même en difficulté ; France-Antilles
devra remplir ces critères pour y
avoir droit. L’ Etat peut cependant
accompagner les groupes en diffi-
culté dans le cadre des procédures
de redressement des entreprises de
type C iri (Comité interministériel de
restructuration industrielle).
Côté fonds privés, France-Antilles
veut mobiliser des acteurs locaux,
sur le modèle de ce qui a été fait chez
« Corse-Matin », où un consortium
(CM Holding) composé de quelque
140 entreprises corses a acquis,

Nicolas Richaud
@NicoRichaud


C’est le dernier vestige de l’empire de
presse de feu Robert Hersant, Fran-
ce-Antilles, qui sonne le tocsin.
« Notre avenir se jouera dans les
trente prochains jours », a carré-
ment alerté, le week-end dernier,
Frédéric Verbrugghe, le directeur
général du groupe, qui publie
notamment trois quotidiens dans
les départements d’outre-mer (Gua-
deloupe, Martinique, Guyane).
L’heure est grave pour France-
Antilles, qui a été placé en redresse-
ment judiciaire en juin et serait
menacé de liquidation fin octobre,
date à laquelle doit se tenir une
audience décisive au tribunal de
commerce. L’an passé, les pertes de


PRESSE


Le directeur général
du groupe affirme que
l’avenir de la société
va se jouer dans les
trente prochains jours.


Sébastien Dumoulin
@sebastiendmln

Facebook paiera bien les édi-
teurs de presse qui alimente-
ront son futur onglet « Actuali-
tés » aux E tats-Unis. Mais
seulement une partie d’entre
eux. La nouvelle a été confirmée
par Facebook après que le
« Wall Street Journal » (WSJ) l’a
dévoilée lundi. Pour les jour-
naux américains, le verre est à
moitié vide – ou plein.
L’annonce fait en tout cas
grand bruit, au moment même
où leurs homologues euro-
péens sont à couteaux tirés avec
Google, qui a décidé de ne pas
les rémunérer en échange de la
publication d’extraits d’articles
dans son moteur de recherche.
Le nouvel onglet « News » de
Facebook doit faire son appari-
tion prochainement, et unique-
ment aux Etats-Unis pour l’ins-
tant. Le lancement pourrait
même intervenir à la fin du
mois, selon le « WSJ », qui pré-
cise que les articles seront four-
nis par environ 200 publica-
tions locales et nationales, dont
le « Washington Post », le « New
York Times », BuzzFeed ou le
« Philadelphia Inquirer ».

Trois millions de dollars
« Le nombre d’éditeurs inclus
dans l’onglet “Actualités” aug-
mentera avec le temps, explique
un porte-parole du réseau
social. Pour être sûrs d’inclure
une large palette de thématiques,
nous commencerons par payer
un sous-groupe d’éditeurs capa-
bles de fournir un volume régu-
lier de contenus originaux, basés
sur des faits. » Toujours selon le
« WSJ », un quart des publica-
tions concernées seront rému-
nérées – sur la base de licences
annuelles comprises entre q uel-

RÉSEAUX
SOCIAUX

Le réseau social
va prochainement
lancer un onglet
« Actualités »
aux Etats-Unis.

Une équipe de
journalistes sera
chargée de sélec-
tionner les articles
les plus importants.

Facebook prêt


à rémunérer


certains médias


ques centaines de milliers de
dollars pour les journaux régio-
naux, jusqu’à 3 millions de dol-
lars pour les grandes publica-
tions nationales. Les contrats
seraient de trois ans. Le réseau
social aux 2,4 milliards d ’utilisa-
teurs mensuels ne confirme pas
ces chiffres. En revanche, il est
désormais officiel que le géant
américain a recruté une équipe
de journalistes – au nombre de
25 et sous la houlette d’Anne
Kornblut, une lauréate du prix
Pulitzer. Selon le « WSJ », ils ne
produiront aucun article, ni
n’éditeront les titres et contenu
de ceux qu’ils retiendront. Leur
rôle : sélectionner manuelle-
ment les articles de portée
nationale qui remonteront dans
une section « Top News ». Cette
politique est conforme au credo
de Facebook, qui a toujours
refusé de se considérer comme
un média et d’e ndosser les res-
ponsabilités éditoriales – et les
réglementations qui vont avec.
Mais le recours aux humains
représente un tournant, car ce
sont habituellement les algo-
rithmes qui définissent auto-
matiquement la hiérarchie des
messages sur son mur.

En dehors des « Top News »,
Facebook précise que ce sont
bien des algorithmes qui pous-
seront les actualités vers les uti-
lisateurs, en fonction de critères
tels que les pages Facebook sui-
vies, l es a rticles déjà partagés o u
commentés, les médias aux-
quels les utilisateurs auront
indiqué s’être abonnés... Cette
nouvelle initiative s’inscrit dans
une démarche de soutien du
réseau social à la presse. Sou-
cieux de faire taire les critiques
de la plate-forme qui dénoncent
sa perméabilité aux fausses
nouvelles et au complotisme,
Mark Zuckerberg déclarait
même cette a nnée vouloir
s’assurer que « dans la mesure de
ce que nous pouvons, nous finan-
cions autant de journalisme de
haute qualité que possible ». Une
promesse qui commence à être
tenue, même si l’ampleur de
l’effort de Facebook fait débat
aux Etats-Unis.n

Cette initiative
s’inscrit dans
une démarche de
soutien du réseau
social à la presse.

en pixels


Criteo porte plainte contre Facebook
devant l’Autorité de la concurrence

PUBLICITÉ La star tricolore de l’adtech estime que le réseau
social l’a exclu injustement de sa plate-forme, tout comme
d’autres entreprises. Début juillet 2018, Criteo avait perdu son
accréditation « Facebook Marketing Partner », ce qui avait fait
replonger l’action Criteo en Bourse, neuf mois après la débâcle
provoquée par la décision d’Apple de limiter l’usage des « coo-
kies » publicitaires d ans son n avigateur. Criteo d emande a u gen-
darme français d e la concurrence des « règles claires » pour inci-
ter le géant américain à ne pas favoriser ses propres services.

Droits voisins : le Premier ministre
presse Google de revoir sa position

MÉDIAS Edouard Philippe ne se satisfait pas de la position de
Google dans le dossier explosif de la rémunération des éditeurs
et agences de presse pour la reprise de leurs contenus dans les
résultats de recherche. Le refus de Google de passer à la caisse
« n’est pas acceptable », a lancé le Premier ministre à l’Assem-
blée nationale, appelant à négocier le paiement de droits
d’auteur avec les médias. « Imposer ainsi de manière purement
unilatérale les règles du jeu et écarter toute place à la négociation,
c’est contraire à la fois à l’esprit et à la lettre de la directive », a
dénoncé le chef du gouvernement.

début 2018, une participation mino-
ritaire (35 %) du quotidien.
L’empire Hersant a été réduit
comme peau de chagrin en 2012,
après son démantèlement. En 2017,
l’entité Antilles Guyane Médias (réu-
nissant alors les trois quotidiens et
les régies publicitaires) s’est déclarée
en cessation de paiements et ces
actifs sont passés des mains de Phi-
lippe Hersant (dernier fils de Robert
Hersant) à celles de sa nièce Aude
Jacques-Ruettard, qui possède 100 %
des parts via AJR Participations.
Celle-ci s’est alors engagée à injec-
ter 8 millions d’euros pour relancer
le groupe. « Elle a investi bien davan-
tage car il a fallu aussi apurer les per-
tes de ces deux dernières années qui
ont été très élevées », assure Frédéric
Verbrugghe. « Il y aura un coût social
dans tous les cas de figure », pré-
vient-il. « Pour l’heure, la seule offre
de reprise globale des activités q ui a été
déposée par Octopus Network, société
détenue majoritairement par Bruno
Blandin, le président du Medef Gua-
deloupe, n’englobe que 31 salariés du
groupe », affirme-t-on du côté des
syndicats. France-Antilles emploie
aujourd’hui 260 salariés.n

Le quotidien « France-Antilles »


menacé de disparition


proposeront, selon la Wi-Fi Alliance.
Aujourd’hui, le wi-fi (toutes généra-
tions confondues) est utilisé dans
13 milliards de produits dans le
monde et sous-tend déjà plus de la
moitié du trafic Internet mondial.
« C’est la première fois, dans l’his-
toire du wi-fi, que l’on va avoir autant
d’avancées, s’enthousiasme Kevin
Robinson, vice-président marke-
ting au sein de la Wi-Fi Alliance.
L’impact du wi-fi passe souvent ina-
perçu. Pourtant, même le commerce
international en dépend! Le wi-fi 6
est là, c’est une réalité, les entrepri-
ses livrent leurs produits. » Sous-
entendu, la 5G, elle, s e fait attendre...

Des fréquences gratuites
En France, le prochain standard de
téléphonie mobile est en effet prévu
pour 2020. Les opérateurs télécoms
vont d’abord devoir acheter cet
automne les précieuses licences 5G.
Le wi-fi utilisant, en revanche des
fréquences gratuites, la version 6 a
pu arriver dès cet été dans l’Hexa-
gone sur la dernière box de SFR.
L’opérateur contrôlé par Patrick
Drahi en avait fait son argument
commercial numéro un.
Ses concurrents avaient alors
minimisé cette innovation, en expli-
quant que peu de smartphones
étaient de toute façon compatibles.

Mais l’arrivée, début septembre, des
nouveaux iPhone 11 supportant le
wi-fi 6 montre que ce standard
s’installe peu à peu. Orange pourrait
à son tour le proposer le 9 octobre
sur sa prochaine box.
Bouygues Telecom, de son c ôté, le
reconnaît : « Aujourd’hui, lancer
une box sans wi-fi 6 paraît difficile.
Pour le moment, les smartphones
compatibles sont des modèles haut
de gamme. Mais dès que la moindre
ampoule connectée prendra en
compte le standard, il y aura un véri-
table engouement. »
Le wi-fi 6 a de nombreux avanta-
ges. En premier lieu, il permet,
contrairement au wi-fi 5, de connec-
ter des dizaines d’appareils simulta-
nément. « Aujourd’hui, dans une
famille moyenne de quatre p ersonnes,
il y a au moins quatre téléphones sur
un même wi-fi, sans parler des smart-
phones professionnels, des tablettes,
un ou plusieurs PC, une télévision
connectée... On constate que le nom-
bre d’appareils par foyer augmente
plus vite que le débit consommé »,
explique Christian Gacon, directeur
des réseaux fixes aux Orange Labs.
Or la 5G ne devrait pas soulager le
problème. Par rapport à la 4G, la 5G
utilise en effet des bandes de fré-
quences hautes. Celles-ci diffusent
certes plus loin mais pénètrent

moins bien à l’intérieur des bâti-
ments. Pour cette raison, la 5G sera
surtout utilisée à l’extérieur et le
wi-fi à l’intérieur.

Deux technologies
complémentaires
« Ce sont deux technologies complé-
mentaires, reprend Kevin Robinson.
Par exemple, le wi-fi 6 ne va pas per-
mettre le développement des voitures
autonomes! » Dans le monde indus-
triel, la 5G sera donc incontournable
pour les usages exigeant un temps
de réponse (latence) très faible
(comme la voiture autonome) et de
la longue portée. Le wi-fi 6 convient
mieux à des usages de courte portée.
D’autres sont plus mesurés. « Le
wi-fi 5 est déjà très puissant et soutien-
dra les dix ans à venir. Le wi-fi 6, c’est
pour les vingt ans prochains. Il
apporte une amélioration, de la
même façon que l’iPhone XS est un
peu mieux que l’iPhone X... De mon
point d e vue, la vraie rupture est venue
avec le wi-fi 5 », tempère Marc Taieb,
président-fondateur de Wifirst, une
start-up qui fournit du wi-fi dans
700.000 c hambres d’hôtel.
Aujourd’hui, 80 % des 150.000 bor-
nes installées par la société offrent
du wi-fi 5. Wifirst commencera le
wi-fi 6 en 2020, avec l’objectif
d’atteindre 50 % du parc en 2021.n

Raphaël Balenieri
@RBalenieri


Quel est le point commun entre les
derniers iPhone, le Galaxy Note 10 de
Samsung, la nouvelle box de SFR...
et l’aéroport John-Wayne, en Cali-
fornie? Tous ont adopté le wi-fi 6, le
dernier standard de cette technolo-
gie qui va être quatre fois plus rapide
et capable de connecter simultané-
ment plusieurs dizaines d’appareils.
Le processus de certification
ayant été lancé le 16 septembre, le
wi-fi 6 va maintenant se généraliser
dans les télécoms. D’ici la fin 2020,
plus de 1,6 milliard d’appareils le


TÉLÉCOMS


Débit quatre fois plus
rapide, moins d’inter-
férences, capacité à
connecter des dizaines
d’appareils...


Le nouveau standard
du wi-fi va avoir
un impact aussi
important que la 5G,
mais à l’intérieur
des bâtiments.


Le wi-fi 6 cherche à s’imposer


face à la 5 G


Aujourd’hui, le wi-fi est utilisé dans 13 milliards de produits dans le monde et supporte plus de la moitié du trafic Internet mondial.


Hamilton/RÉA
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