Rock et Folk N°625 – Septembre 2019

(Darren Dugan) #1
SEPTEMBRE 2019 R&F 073

King Gizzard


& The Lizard
Wizard
“Infest The Rat’s Nest”
FLIGHTLESS/ PIAS
On finirait par croire que sa
discographie n’est qu’un immense
bingodont le groupe s’empresserait
de cocher toutes les cases. Après
avoir tâté du rock psychédélique,
de l’acid folk, du bubblegum, du jazz
rock, de la musique microtonale et,
dernièrement, du boogie robotique,
Stu MacKenzie et son fol équipage
s’attaquent désormais à un nouveau
genre : le heavy metal du début des
années 80, façon Slayer et Metallica.
Pour son quinzième album en sept
ans d’existence, King Gizzard a donc
décidé de faire du thrash. Le rebond
est plutôt bienvenu après “Fishing For
Fishies”, disque mollasson sur lequel
on s’était surpris à trouver le groupe


trop sage et manquant de suite dans
les idées. On ne peut en dire autant
de cet album à la radicalité bienvenue
dans lequel Stu MacKenzie renoue
avec ses premières amours. Né à la
musique avec Rammstein, Metallica
et Sodom, l’Australien maîtrise
les codes du genre à la perfection.
L’absence de plusieurs membres
du groupe, occupés à d’autres projets,
lui a donné l’opportunité de réaliser
ce vieux rêve (qu’il avait abandonné
au lycée, faute de talent guitaristique)
avec les deux forcenés du metal de la
bande : le batteur Michael Cavanagh
et le guitariste Joey Walker. Cette
formation resserrée envoie neuf
morceaux courts mais surpuissants,
emplis de textes SF et de guitares
frénétiques. Les musiciens sont
excellents, le chanteur au poil. On
a reproché au groupe de n’avoir que
deux morceaux en magasin et de
les décliner de mille façons, que
cette réinvention permanente trahit
une manière de renouveler la forme
plutôt que le fond, mais, quand
c’est aussi accompli et fun qu’ici,
on ne peut qu’adhérer.
✪✪✪
ERIC DELSART


Ride
“This Is Not A Safe Place”
WICHITA/ PIAS
Il semblerait que l’affiliation à la
scène shoegazingdu groupe d’Andy
Bell et Mark Gardener ait été l’objet
d’un certain malentendu. Appellation
sans doute valable en 1990, lors de la
sortie du premier album, “Nowhere”,
elle semble depuis quelque peu
obsolète, les albums suivants du
groupe oxfordien, souvent très rock
et violents, ayant assez peu de rapport
avec les informes Slowdive ou Curve...
Depuis la fracassante séparation
de 1996, les amateurs du groupe
d’Oxford avaient dû attendre plus
de vingt ans pour voir enfin leur rêve
se réaliser : un rabibochage sincère
et un nouvel album, “Weather Diaries”
(2017), avaient enfin enterré les
chamailleries infantiles de naguère.
Voici donc “This Is Not A Safe Place”.
Heureuse surprise, Andy Bell a gardé
ce timbre de voix délicatement
articulé, très Ian Brown (Stone Roses),
qu’il emploie à merveille sur ce
“Future Love”, single potentiel qui
succède à la bizarrerie instrumentale
ouvrant l’album (“RIDE”, sorte de
clin d’œil au “Soon” de My Bloody
Valentine). Avec “Repetition”,
l’auditeur est téléporté en 1981,
dans un club qui passerait du
Heaven 17 et du Human League ;
“Kill Switch”, quant à elle, s’appuie
sur une fuzz assez virile, contredite

par “Clouds Of Saint Marie”, tout
en finesses façon Go Betweens et
Shimmer Reverb... On le voit, question
style, c’est le bazar, et les sensibles
auront matière à râler face à ce
manque de cohésion. Faute à moitié
pardonnée devant ce déploiement
de vignettes pop orchestrées par
ces outsiders anglais toujours
imprévisibles et aventureux.
✪✪✪
SAMUEL RAMON
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