Causette N°103 – Septembre 2019

(National Geographic (Little) Kids) #1

LIVRES


LE CORPS D’APRÈS

DE VIRGINIE NOAR
Rarement on avait aussi bien parlé des mères
et du rapport à leur corps. Travailleuse sociale et
mère de deux filles, Virginie Noar balaie un large
spectre : la sexualisation précoce des jeunes filles,
la conquête du plaisir, la mutation due à la gros-
sesse... et puis ce corps d’après, aussi difficile à
reconnaître qu’à apprivoiser. À grands coups de
contrastes, l’autrice envoie valser tabous et hypocrisies à la sauce « c’est que
du bonheur ». La chaleur des scènes de sexe, précises et animales, côtoie
des séquences d’une brutalité qui glace le sang. Avec une justesse folle, la
primo-romancière raconte le ventre flasque et vide, le sexe semblant perdu
pour le plaisir... et ce petit être fragile et dépendant, dont il faut désormais
assurer la survie comme si c’était inné. Le Corps d’après oscille entre train
fantôme et montagnes russes. Secousses garanties. UThomas Messias
Éditions François Bourin, 256 pages, 19 euros.

ROUGE IMPÉRATRICE

DE LÉONORA MIANO
De L’Intérieur de la nuit, en 2005, à Crépuscule du tour-
ment 2 en 2017, Léonora Miano a toujours traité des guerres
civiles, de l’identité des femmes et aussi des hommes, le tout
dans des pays d’Afrique imaginaires. Pour son douzième
roman, elle reprend un peu tous ces thèmes-là, mais en
les menant bien plus loin : dans le futur. Rouge impératrice
imagine un continent africain unifié qui, en ce XXIIe siècle,
accueille des migrants... européens. Dès lors, elle bâtit un
monde en inversant les systèmes de domination actuels.
De sorte que ce sont les femmes qui guident les hommes,
ici. Même lorsque Boya, l’universi-
taire, la militante, la « femme-flamme »,
« la Rouge », vit bientôt une histoire
d’amour avec... le chef de l’État. Une
union intellectuelle et charnelle qui
imbibe, ici, une réflexion saisissante
et subversive. Avec son flow toujours
aussi langoureux. UHubert Artus
Éd. Grasset, 608 pages, 24 euros.

À dévorer pour bien rentrer

© J.-F. PAGA– DR X 6

RIEN N’EST NOIR


DE CLAIRE BEREST
« Pourquoi tu m’as demandée en mariage Diego ? – Parce que tu es
meilleure peintre que moi et que tu aboies très fort ! – Évidemment que
je suis meilleure peintre que toi, elefante. »
Claire Berest ne se contente pas de retra-
cer la trajectoire de Frida Kahlo, la peintre
mexicaine au corps ravagé. Elle la traverse
de part en part, nous fait sentir de l’intérieur
les souffrances et les ardeurs de cette figure
de l’insoumission féminine. Surtout la vora-
cité de son amour pour le grand Diego Rivera,
monstre de possessivité qu’elle est la seule
à pouvoir mater. Un récit tragique, violent,
exaltant. ULauren Malka
Éd. Stock/Coll. La Bleue,
250 pages, 19,50 euros.

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