Télérama Magazine N°3629 Du 3 Août 2019

(Joyce) #1

musiques


37

Egoli


Électro world


AfricA ExprEss


En réunissant à Johannesburg musiciens africains et européens, c’est un


bœuf géant qu’offre Damon Albarn, où chacun semble influencer les autres.


z


Belle idée du routard de la pop Damon


Albarn, initiée au Mali en 2006, le pro-


jet Africa Express a pour but de réunir


musiciens européens et africains. En-


registrés à Johannesburg (« Egoli », en


langue xhosa) en une semaine, dix-


huit titres rassemblant une trentaine


d’artistes offrent bien plus qu’un beau


panorama de la nation arc-en-ciel,


du doucereux folk zoulou, sur fond


de guitare acoustique du doyen


Phuzekhemisi, au puissant « electro-


kwaito », au groove lent et cadencé de


DJ Spoko, légende de Soweto au-


jourd’hui décédée. Même si tous n’ont


pas la même intensité, aucun morceau


Damon Albarn
et la rappeuse
Moonchild Sanelly :
I Can’t Move,
un prochain tube?

dispensable, trop vite expédié, n’en-


tache ce disque aux allures de joyeux


bœuf géant où l’on se demande qui in-


fluence qui. En duo avec la rappeuse


de « Joburg » Moonchild Sanelly, Da-


mon Albarn pose sa voix de crooner


triste sur un possible tube (I Can’t


Move) qui n’aurait pas dépareillé sur le


dernier Gorillaz. Mais la vraie surprise


vient de l’épuré Absolutely Everything


is Pointing towards the Light, duo ma-


gique, en langue xhosa, entre la chan-


teuse Zolani Mahola et le Gallois Gruff


Rhys (Super Furry Animals). Est-on


chez Miriam Makeba ou chez Nick


Drake? — Erwan Perron


| Africa express/!K7.


e On aime un peu... z ... beaucoup a ... passionnément r ... pas du tout

DenhOlm


hewlett


pErsonA


chAnson


lisE MArtin


e


En général, l’association « chanteuse


française » et « folk » aboutit à une fi-


gure proche de celle de Carla Bruni à


ses débuts : une jeune femme qui


chante doucement de jolies mélodies à


la guitare, en ne dérangeant personne.


Lise Martin n’est pas tout à fait dans ce


registre-là ; davantage dans celui d’une


chanson à texte un brin surannée, por-


tée par une voix à la brillance presque


trop vive, et des arrangements soyeux


mais sans invention. Pourtant, écoute


après écoute, la finesse du chant et la


rectitude de la ligne artistique finiront


par déployer un charme certain. Si


Lise Martin revendique la filiation de


Joan Baez, on citerait plus Michèle


Bernard, ce qui est fort respectable.


J’ai reçu ou Si quelque chose craque sai-


sissent joliment la vulnérabilité hu-


maine dans des filets de dentelle mélo-


dique et vocale. — Valérie Lehoux


| Inouïe distribution.


WAhdon


Monde


fAiruz


z


Les oubliables reprises de son dernier


album (Bebalee, 2017) nous avaient lais-


sée sur notre faim. A défaut d’un vrai


retour de la fabuleuse diva libanaise,


retirée de la scène depuis vingt-cinq


ans, cette réédition vinyle de 1979 offre


deux Fairouz pour le prix d’une.


Face A : celle des mélopées ourlées, des


violonades orchestrales et des percus-


sions orientales, dans la grande geste


de la chanson arabe. Face B : une Fai-


rouz modernisée à coups d’arrange-


ments funky (Al Bostah) ou jazzy (Wah­


don) qui continuent de faire le bonheur


des « diggers » de sons vintage. Après


des années de collaboration entre la


chanteuse et les frères Rabhani, cet al-


bum de la rupture était le premier com-


posé et réalisé par son fils, Ziad Rabha-


ni : il fit scandale. Quarante ans plus


tard, on retient surtout la voix, languis-


sante, sublime. — Anne Berthod


| wewantsounds/Modulor.


Télérama 3629 31 / 07 / 19
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