Les Echos - 06.03.2020

(sharon) #1
leaux Lotus, ne « connaît pas de
hausse substantielle des volumes de
commandes en France, hormis
dans quelques grandes villes dont
Paris » , explique-t-on à la direc-
tion. Compte tenu des stocks exis-
tants en interne et chez les clients
distributeurs, Essity affirme
cependant « ne pas entrevoir de ris-
que de pénurie » pour le moment et
faire en sorte de répondre norma-
lement aux demandes de ses
clients.

- LES GELS
HYDROALCOOLIQUES
SOUS TENSION

Depuis le début de l’épidémie de
coronavirus, les fabricants de gel
hydroalcoolique observent une
multiplication de la demande éva-
luée entre six et huit. Depuis la fin
février et la propagation du virus
en France, l’accélération est encore


plus notable. « Nous sommes dans
une phase d’adaptation, mais une
pénurie n’est pas impossible » ,
constate Virginie d’Enfert, délé-
guée générale de l’Association des
fabricants de produits d’hygiène et
d’entretien. Selon cette dernière, si
les fabricants disposent de nom-
breuses usines en France et en
Europe, le risque de pénurie pour-
rait provenir de l’emballage de ses
solutions hydroalcooliques. Une
idée réfutée par l’association pro-
fessionnelle représentant les fabri-
cants d’emballages plastiques et
souples en France, Elipso, qui
affirme que la majorité des flacons
est produite dans l’Hexagone.

- PAS D’ALERTE
SUR LA NOURRITURE

Po ur l’heure, les entreprises agroa-
limentaires ne voient pas leurs
commandes exploser. Les rayons


vides, « cela reste très local et
très ponctuel » , dit l’Association
nationale des industries alimen-
taires, confirmant les déclarations
des grands commerçants hexago-
naux. De son côté, le ministère de
l’Agriculture note que « l’approvi-
sionnement des populations fonc-
tionne normalement selon les
différents modes d’achat et de con-
sommation, qu’il s’agisse de restau-
ration hors foyer ou de restauration
à domicile. Chaque opérateur doit
veiller à l’efficience de son plan de
continuité d’activité ».
Le ministère de l’Agriculture ne
cache pas travailler avec les autres
ministères à la rédaction d’ « un
document-cadre fixant les principes
généraux et recommandations
pour assurer l’approvisionnement
des populations en cas de crise
majeure ». Chez Avril (Lesieur,
Puget...), on a noté une augmenta-

tion des commandes « à deux chif-
fres ». Mais l’on assure aussitôt que
« la réactivité de l’appareil indus-
triel p ermet d e répondre à la
demande et qu’il n’y a pas de risque
de rupture ».

- RIEN À SIGNALER CÔTÉ
BOISSONS ET CROQUETTES

Chez Orangina-Schweppes (Sun-
tory), on commence à entendre
parler « de fortes hausses des achats
dans certains drives »
, mais on
constate aussi que « les gens conti-
nuent à sortir et à consommer »

malgré certaines incitations à res-
ter chez soi. Donc, aucune inci-
dence sur les ventes de boissons à
ce stade. Côté croquettes pour ani-
maux, rien à signaler non plus
chez les industriels. Purina
(Nestlé) dit n’avoir constaté
« aucun impact ».
Service Entreprises


Les industriels n’entrevoient pas de risque immédiat de pénurie


Zéro panique chez les industriels.
Alors que quelques rayons de
supermarché semblent bien vides
le soir – certains clients faisant des
achats de précaution en raison de
l’épidémie de coronavirus, les
industriels fournissant les distri-
buteurs affirment qu’il n’y a pas
vraiment de raison de s’angoisser.
Même s i la situation peut évoluer si
l’Hexagone tombe dans le stade
3 du plan de lutte sanitaire.


- AUCUN RISQUE
POUR LE PAPIER TOILETTE

A date, Essity, le fabricant des rou-


Alors que certains rayons
de supermarché semblent
bien vides le soir, les indus-
triels fournissant les
distributeurs affirment
qu’il n’y a pas vraiment
de raison de s’angoisser.


Les Britanniques


se ruent sur


le riz, les pâtes et


le papier toilette


Alors que certains super-
marchés ont été pris
d’assaut, la plateforme en
ligne Ocado a allongé ses
délais de livraison en raison
d’une « demande exception-
nellement élevée ».

D’une certaine façon, la crise du coronavirus constitue une bonne affaire pour les distributeurs,
l’épidémie faisant repartir à la hausse les volumes de vente des produits du quotidien. Phot o AFP

les ventes grimpaient de 11 % en
Lombardie et en Vénétie. Les
experts notaient tout de même les
premiers signes de stockage dans
l’Hexagone sur les couches
(+27 %), les p âtes ( +13 %) et la farine
(+11 %).
Les p remières ruptures d e rayon
sont intervenues la semaine sui-
vante. Le s amedi 2 9 février a donné
le signal de la ruée avec des +100 %
pour les pâtes et les conserves
de poisson, +70 % pour les céréa-
les, +50 % pour le riz et la purée.
« Les pâtes symbolisent ce phéno-
mène de stockage, avec certains
points de vente dévalisés, tout parti-
culièrement en région parisienne et
dans l’Oise. Dans certains maga-
sins, les ventes de pâtes ont même été
multipliées par 5, et le taux de rup-
ture s’est vu, lui, multiplié par 7 » ,
souligne la consultante Mathilde
Moussard.

Passage probable au stade 3
Po ur Nielsen, si les consomma-
teurs ont surréagi, c’est parce que
beaucoup avaient subi l es b locages
des « gilets jaunes ». Chez Super U,
on rappelle aussi que lorsque les
clients touchent leur salaire en
toute fin de mois, ils sont tentés
d’acheter en plus grande quantité.
Le phénomène pourrait se tasser
maintenant que les stocks sont
constitués. La crise du coronavirus
constitue une bonne affaire
pour les distributeurs. Les volu-
mes de vente des produits du quo-
tidien s’érodent parce que les Fran-
çais consomment mieux.
L’épidémie les fait remonter. Niel-
sen enregistre une hausse globale
de 5 % la semaine passée. L’année
2019 s’était achevée par une baisse
de 1,4 %, selon IRI. Reste à connaî-
tre les conséquences du passage
probable au stade 3 de l’épidémie.
Les distributeurs estiment que
toute mesure de restriction des
approvisionnements ne ferait que
provoquer la panique.n

lLes ventes de pâtes et de riz ont explosé de 50 % à 100 % en France la semaine passée.


lDe nombreux rayons sont en rupture, mais les distributeurs réapprovisionnent sans peine les magasins.


Le coronavirus vide les rayons des

supermarchés mais pas leurs stocks

Philippe Bertrand
@Bertra1Philippe


Les photos de rayons vides ont fait
le tour des réseaux sociaux. A
Paris, mais surtout en Province,
beaucoup de consommateurs les
ont vus. L’épidémie du coronavirus
a poussé les Français à des achats
de précaution. Les distributeurs
écartent cependant le risque de
pénurie dans l’Hexagone.
« Il existe des ruptures partielles
en fin de journée
, explique-t-on
dans une grande enseigne fran-
çaise qui ne veut pas être citée.
Mais les magasins sont réapprovi-
sionnés dès le lendemain. Les four-
nisseurs honorent les c ommandes et
ne signalent pas de risques »
. « Les
stocks sont l à »
, résume l a porte-pa-
role d e la Fédération du commerce
et de la distribution. Les réunions
se multiplient entre les pouvoirs
publics et les acteurs de la filière
agroalimentaire et personne n’a
pour l’heure tiré le signal d’alarme.
« On n’entend pas parler de pro-
blème de nourriture en Chine »
, pré-
cise un observateur.


Pas encore la panique
La ruée est bien là. Elle ne s’est pas
encore transformée en panique. Le
seul problème identifié porte sur
les gels hydroalcooliques dont les
ventes ont triplé en février, selon
Nielsen. « Les stocks sont bas et il
existe peu de solutions de réapprovi-
sionnement »
, pointe un distribu-
teur. Mais les achats de précaution
portent d’abord sur les pâtes, le riz,
la farine ainsi que sur les articles
pour bébés comme les couches.
Nielsen a mesuré sur la semaine
du 20 février au 1er mars, par rap-
port à une semaine normale, une
hausse de 17 % des ventes de pro-
duits d’épicerie, de 15 % des soins
pour bébés, de 14 % des produits de
santé. Pour l’anecdote, les aliments
pour chiens et chats ont progressé
de 11 %. En Allemagne, on appelle
cela des « achats de hamster ». Les
panels dessinent la courbe de la
montée de la constitution des
stocks. La semaine du 17 au
23 février, Nielsen constatait une
baisse de 0,4 % des ventes de pro-
duits de grande consommation
qui correspond à la déconsomma-
tion en cours depuis plusieurs
mois. Au même moment, en Italie,


DISTRIBUTION


+ 15 %


LA HAUSSE DES VENTES
DE SOINS POUR BÉBÉS
selon Nielsen, sur la semaine
du 20 février au 1er mars,
par rapport à une semaine
normale. Les produits de santé,
ont, eux, augmenté de 14%.

Alexandre Counis
@alexandrecounis
— Correspondant à Londres

Av ant même le coronavirus, c’est la
panique qui gagne les consomma-
teurs o utre-Manche. S elon le
« Times », les supermarchés britan-
niques, en particulier ceux situés
dans des zones où des malades ont
été recensés, ont dû faire face ces
derniers jours à un pic de demande
sur les denrées de première néces-
sité, comme le riz, les pâtes et le
papier toilette. Certains Britanni-
ques se ruent aussi sur les packs de
bouteilles d’eau alors même qu’il n’y
a aucun risque de contamination de
l’eau du robinet, ou encore sur les
boîtes de paracétamol.
La plateforme en ligne Ocado, qui
livre à domicile, a elle aussi été prise
d’assaut : « une demande exception-
nellement élevée » l’a obligée à allon-
ger ses délais de livraison de plu-
sieurs jours supplémentaires. Pour
une commande passée mardi soir,
par exemple, les premiers créneaux
disponibles étaient ainsi proposés
pour samedi matin.

Sur l e site Mumsnet, où les
parents parlent aux parents, cer-
tains ont expliqué qu’ils consti-
tuaient actuellement des stocks
pour le cas où leur famille devrait
rester enfermée chez elle jusqu’à
deux semaines. Bref, ils se préparent
à soutenir un siège. D’après une
étude Retail Economics et Squire
Patton Boggs réalisée auprès de
2.000 personnes, un tiers des con-
sommateurs s'inquiètent de pénu-
ries et près d’un sur dix (9 %) a déjà
commencé à faire des stocks.
La panique est telle chez certains
consommateurs que le conseiller
scientifique en chef du gouverne-
ment, Patrick Vallance, a dû monter
au créneau, à l’occasion, mardi, de
la présentation du plan de Boris
Johnson contre le virus, pour appe-
ler à la raison. « Il n’y a absolument
aucune raison pour réaliser des
achats d’aucune sorte sous le coup de
la panique » , a-t-il martelé.
Si les magasins sont pris d’assaut
et certains rayons dévalisés, aucun
distributeur ne semble néanmoins à
ce stade en rupture de stock. Le seul
article fréquemment indisponible
au niveau national est le gel hydroal-
coolique, dont le prix a triplé le mois
dernier par rapport à 2019, selon
Kantar. La plupart des sites Internet
des distributeurs sont épuisés – c’est
le cas notamment chez Sainsbury’s.
Les pharmacies Boots, qui disposent
encore de stocks, limitent les ventes
à deux flacons par client. A ce jour,
85 cas de coronavirus ont été recen-
sés au Royaume-Uni, dont 34 de
plus en vingt-quatre heures. n

Le prix du gel
hydroalcoolique a
triplé le mois dernier
par rapport à 2019.

ENTREPRISES


Vendredi 6 et samedi 7 mars 2020 Les Echos

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