Les Echos - 10.03.2020

(Rick Simeone) #1

24 // PME & REGIONS Mardi 10 mars 2020 Les Echos


innovateurs


Léa Delpont
— Correspondante à Lyon


« Merci de nous avoir fait monter
dans l’“Airbus des batteries” alors
que nous n’étions pas sur la liste
d’embarquement. »
Bruno Gas-
tinne, président du conseil de sur-
veillance d e Carbone S avoie,
s’adresse à la secrétaire d’Etat
Agnès Pannier-Runacher, venue
inaugurer le 20 février un nouveau
four de cuisson à Vénissieux.
L’investissement de 11 millions
d’euros, dernière tranche d’un plan
de modernisation de 40 millions
depuis 2016, améliore la perfor-
mance énergétique de 40 à 50 % et
diminue de 10 % le coût de revient
du graphite destiné à la production
d’aluminium.
Mais Carbone Savoie espère bien
faire fructifier ce nouvel équipe-
ment ultra-compétitif dans un autre
domaine que l’aluminium – 80 % de
ses débouchés. Aujourd’hui,
l’Europe a besoin de graphite, aussi
indispensable que le lithium, le
cobalt ou le manganèse, pour les
batteries de voiture électrique. Dans


le cadre du projet IPCEI (Important
Project of Commun European Inte-
rest) d’« Airbus des batteries »,
visant à assurer l’indépendance vis-
à-vis de l’Asie, Emmanuel Macron a
visité le 30 janvier le site où Automo-
tive Cells Company (ACC) dévelop-
pera la batterie auto de demain.
« Mais 95 % du graphite mondial
pour batterie vient de Chine, et 5 % du
Japon : il n’y a pas de fabricant euro-

péen », explique Bruno Gastinne.
« Une opportunité à saisir » pour
Carbone Savoie.
L’entreprise, historiquement pro-
ductrice de graphite solide, a mis au
point une poudre au dixième de
micron pour les anodes. Le procédé
encore en R&D a besoin de « plu-
sieurs dizaines de millions d’euros
pour son industrialisation », précise
le PDG, Sébastien Gauthier, heu-

55 %, le fonds M Capital ainsi que
l’ancien président Loïc-Marie
Péquignot et des business angels
ont cédé à la proposition de rachat
de Proxiserve. Loïc-Marie Péqui-
gnot conserve toutefois la filiale
Bugbusters, spécialisée dans les
services d’informatique et de télé-
communication d’entreprises, qui
réalise un chiffre d’affaires de
10 millions d’euros avec 72 salariés.

Numéro deux sur Linky
Rebaptisée Onefield, l’ancienne
société Bugbusters a été relancée en
2016 par Loïc-Marie Péquignot, qui
a diversifié l’activité dans l’installa-
tion des compteurs électriques
intelligents Linky pour Enedis et
des bornes de recharge de voiture
électrique. Le chiffre d’affaires du

groupe a ainsi bondi de 8 à 44 mil-
lions d’euros entre 2015 et 2019, et
son effectif est monté à 750 salariés
en France, en Belgique et au Maroc.
Onefield est devenu le deuxième
installateur des compteurs Linky
avec 3,5 millions d’unités à poser
d’ici à 2022.

En Belgique aussi
Puis l e groupe s’est tourné vers l ’ins-
tallation des bornes de recharge
électrique avec sa filiale ZEborne,
créée en 2018, qui représente 19 %
de son chiffre d’affaires et croît rapi-
dement. « Nous avons gagné beau-
coup de contrats avec les construc-
teurs PSA, VW, Ford, Mazda, Toyota
et Kia pour installer les bornes de
recharge chez les particuliers et les
concessionnaires, explique Loïc-

Laurent Marcaillou
— Correspondant à Toulouse


Le toulousain Onefield, fournisseur
de services de télécoms aux entre-
prises et installateur de compteurs
Linky, vient d’être racheté par le
groupe de services pour l’habitat
Proxiserve.
Après être resté douze ans au
capital de Onefield, dont il détenait


OCCITANIE


Le groupe de services
à l’habitat a racheté
un concurrent dans
l’installation de bornes
de recharge électrique.


Installé depuis 2007 à Voray-
sur-l’Ognon (Haute-Saône), le spé-
cialiste des sondes à ultrasons Ima-
sonic vient de s’offrir une nouvelle
informatique, un nouveau centre
d’usinage cinq axes et une ving-
taine de binoculaires dernier cri.
Un nouveau bâtiment suivra en
2021 à côté de l’actuel. En 2019, la
PME avait recruté 20 personnes
portant son effectif à 115 salariés :
des experts en physique, des ingé-
nieurs en micromécanique, en chi-
mie des matériaux ou encore des
spécialistes en acoustique ou
modélisation qui assurent la con-
ception et la simulation de fais-
ceaux acoustiques.
Imasonic a été créée en 1989 par
quatre anciens salariés d ’une entre-
prise d’ultrasons de Tours (Indre-
et-Loire) qui avaient identifié deux

marchés, le médical et l’industrie,
et le bassin d’emploi de Besançon,
ville microtechnique. Trente ans
plus tard, deux des fondateurs sont
toujours aux c ommandes. Couple à
la ville, Monique Mathieu est direc-
trice générale et Gérard Fleury pré-
sident. Désormais, Monique
Mathieu partage la direction géné-
rale avec Céline Fleury-Mathieu et
Alain Fleury, deux de leurs trois
enfants.

Diagnostic et traitement
Des essais cliniques doivent être
lancés d’ici peu pour deux projets
européens. L’un pour le diagnostic
du cancer du sein, l’autre pour c elui
de la maladie de Crohn. « Ces pro-
jets constituent des alternatives à la
mammographie, pour le premier, et
facilitent le diagnostic délicat de la

Date de création : 2014
Président : Arnaud Legrand
Montant : 4,5 millions
Effectif : 20 personnes
Secteur : énergie

Stanislas du Guerny
— Correspondant à Rennes

Les technologies logicielles
développées par Energiency
permettent aux usines de réali-
ser des économies d’énergie,
« généralement supérieures à
15 % », chiffre Arnaud Legrand,
le PDG de l’entreprise rennaise.
Pour européaniser son dévelop-
pement, il annonce ce mardi,
après avoir réuni 2,7 millions
d’euros en 2017, le bouclage de sa
deuxième levée de fonds à hau-
teur de 4,5 millions d’euros.
« Nous faisons entrer au capital le
groupe d’énergie luxembour-
geois, Encevo, qui nous ouvre les
portes de nouveaux marchés
européens. Il est accompagné par
nos actionnaires historiques
comme Go Capital, West Web
Valley, InnoEnergy et 50 Par-
tners », précise-t-il.
Cet apport va se traduire par
un doublement de l’effectif de
l’entreprise, comprenant actuel-

DR

lement 20 collaborateurs. Des
ingénieurs, et surtout des com-
merciaux et vont rapidement
intégrer les rangs d’Energiency
dont la clientèle se compose
aussi bien de PME et ETI que de
groupes internationaux.

Intelligence artificielle
Les technologies déployées par
Energiency font appel à l’intelli-
gence artificielle. Ses logiciels
captent et analysent les données
des différentes lignes de produc-
tion, s’adaptant à tous les modè-
les, toutes les marques et tous les
secteurs d’activité. Un mauvais
réglage ou un dysfonctionne-
ment entraînant une hausse
anormale de la consommation
d’énergie est immédiatement
repéré et pourra être corrigé par
les équipes de maintenance de
l’usine, alertées en temps réel.
« Nos technologies intéressent
d’autant plus des clients comme
ArcelorMittal, SKF ou Faurecia,
mais a ussi des entreprises de taille
moyenne comme Hénaff qu’elles
leur permettent de réduire sensi-
blement leur empreinte car-
bone », estime Arnaud Legrand.
Le secteur étant jugé « très
concurrentiel », le président
d’Energiency entend aller vite
sur la voie de l’internationalisa-
tion. S’il vise en priorité l’Europe,
il commence aussi à s’intéresser
à l’Asie, où il vient de décrocher
ses premiers contrats. C réée i l y a
sept ans, la société rennaise n’a
pas encore atteint l’équilibre
financier, mais son P DG e spère y
arriver au c ours d es vingt-quatre
prochains mois et se prépare
déjà à lancer une troisième levée
de fonds.n

LA LEVÉE DE FONDS ENERGIENCY


4,5 millions pour booster


la performance des usines


Marie Péquignot. Et nous en avons
placé dans les entreprises. »
De nombreux contrats ont été
remportés contre Proxiserve, inci-
tant ce dernier à racheter Onefield.
Le groupe toulousain s’est aussi
implanté en Belgique en acquérant
la société de télécoms d’entreprise
Wan Services (180 salariés) en
mai 2018, qui représente un quart
de son chiffre d’affaires.
Ex-filiale de Veolia, Proxiserve a
racheté Onefield pour se renforcer,
notamment dans les bornes de
recharge, une activité pour laquelle
il est leader e n France avec
50.000 installations. Le groupe de
services à l’habitat (chauffage,
maintenance, comptage et gestion
de l’électricité) emploie désormais
plus de 4.000 salariés.n

Proxiserve embarque Onefield


dans les bornes de recharge


maladie de Crohn, pour le second,
explique Céline Fleury-Mathieu.
Les ultrasons, c’est non invasif et
plus fiable. » D’autres projets sont
en cours pour le traitement de can-
cers, cette fois, avec la destruction
de tumeurs sans chirurgie, ou pour
celui de l’endométriose.
Le médical pèse un tiers de l’acti-
vité, les deux autres tiers concer-
nent les industries du transport et
de l’énergie. Là, les ultrasons per-
mettent de r éaliser d u contrôle non
destructif, des échographies de
matériaux ou pièces de structure
aéronautiques, automobiles o u fer-
roviaires. A 13,5 millions d’euros,
réalisés à 75 % à l’export, le chiffre
d’affaires 2019 d’Imasonic est sta-
ble. Le nouveau bâtiment, en 2021,
devrait lui permettre d’accélérer à
nouveau à nouveau.n

reux d’entendre la secrétaire d’Etat
confirmer sa participation finan-
cière « par la porte, par la fenêtre ou
par la cheminée ». Le gouvernement
« a tendu l a main » à Carbone Savoie,
Petit Poucet qui a candidaté tardive-
ment à l’« Airbus des batteries »,
préempté par Total, PSA et Arkema.
Le passager de dernière minute joue
la carte des matières premières. Les
besoins européens sont estimés à
130.000 tonnes en 2025, l’équivalent
de la production mondiale
aujourd’hui. « Une Tesla, c’est 70 kg
de graphite », rappelle Régis Paulus,
directeur de la R&D.

Condamnée en 2014
Héritier de 120 ans de savoir-faire et
des dernières technologies mises en
œuvre chez Carbone Savoie, la pou-
dre « battery anode material » est
produite « avec deux fois moins
d’énergie et de déchets », assure
Bruno Gastinne, convaincu de
pouvoir construire une filière euro-
péenne à la fois plus écoresponsa-
ble et moins chère que sa concur-
rente asiatique.
L’histoire est d’autant plus belle
pour Carbone Savoie que la société
avait été condamnée à la fermeture
en 2014 par son propriétaire Rio
Tinto, avant d’être cédée au fonds de
retournement Alandia en 2016.
« Elle perdait plusieurs dizaines de
millions d’euros par an pour un chif-
fre d’affaires de 60 millions », se sou-
vient Sébastien Gauthier, associé
chez Alandia Industrie. Elle a ter-
miné l’année 2019 à 127 millions de
revenus et 17 de résultat net, avec
une productivité en hausse de 60 %
et à effectif constant.n

AUVERGNE-
RHÔNE-ALPES


Spécialiste du graphite
pour le marché de
l’aluminium, la PME
prépare sa diversifica-
tion dans le graphite
high-tech pour les
batteries de véhicules
électriques.


Carbone Savoie monte


dans l’« Airbus des batteries »


Des barres de graphite sortent du four de cuisson rénové
de l’entreprise Carbone Savoie. Photo Lotfi Dakhli

Les sondes à ultrasons d’Imasonic


contribuent à la médecine du futur


Date de création : 2013
Fondateurs : Maxime
Piquette et Charles de Potter
Montant : 1,2 million d’euros
Effectif : 20 personnes
Secteur : Internet

Nicole Buyse
— Correspondante à Lille

Spécialiste de l’audio en ligne,
iCreo a créé Ausha en octo-
bre 2018. Moins de dix-huit mois
plus tard, cette plateforme
dédiée à l’hébergement et à la
distribution de podcasts en
compte déjà 2.600 sur des sujets
aussi variés que le foot, la politi-
que, l’histoire..., destinés aussi
bien aux enfants qu’aux collabo-
rateurs d’entreprises. Parmi ses
clients figurent des médias et
grands comptes comme EDF,
AXA, BNP Paribas o u Decathlon
dont les podcasts prodiguent
des conseils et racontent des his-
toires de grands sportifs. « Le
podcast va devenir un mode de
communication, d’information
et d’éducation incontournable
pour les nouvelles générations »,
explique Maxime Piquette, qui a
cofondé iCreo en 2013 avec Char-

les de Potter, à la Plaine Images à
Tourcoing. Les deux entrepre-
neurs ont commencé en lançant
Radio King, qui permet de créer
sa propre radio sur Internet.
Pour assurer le développe-
ment d’Ausha, iCreo annonce ce
mardi le bouclage d’un premier
financement de 1,2 million
d’euros, dont 750.000 euros en
capital. Nord France Amorçage
et IRD Gestion investissent
500.000 euros et cinq business
angels, dont Alexandre Bouche-
rot, cofondateur d’Ulule ou
Jean-Baptiste Defossez de
KaraFun, apportent les autres
250.000 euros. L’opération est
complétée par 450.000 euros de
prêts bancaires et de bpifrance.
Les deux fondateurs restent lar-
gement majoritaires.

Poursuivre la R&D
Pour Ausha, l’objectif est de
conforter son a ssise dans
l’Hexagone et de s’ouvrir le mar-
ché européen. La start-up qui
totalise déjà 1.200 clients, vise les
5.000 podcasts hébergés à la fin
2020 et les 30.000 d’ici à 2 023.
Elle va d’abord ouvrir un bureau
à Paris et recruter une équipe
dédiée à l’international. Avec ce
financement, Ausha va aussi
poursuivre sa R&D. « Il s’agit de
voir comment d onner plus
d’informations à nos clients sur
les utilisateurs de leurs podcasts :
quand les écoutent-ils et durant
combien de temps, mais aussi
comment les aider à rendre leurs
produits plus visibles et à accroî-
tre leur audience », précise
Maxime Piquette.n

DR

LE FINANCEMENT ICREO


Ausha veut être l’hébergeur


européen de podcasts


Monique Clémens
_@moclemens—
Correspondante à Besançon


LA PME À SUIVRE
BOURGOGNE-
FRANCHE-COMTÉ


Cette entreprise
familiale de Haute-
Saône est impliquée
dans des projets
de recherche médicale
prometteurs.


La deuxième
génération
de dirigeants arrive
aux commandes.

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