Les Echos - 07.04.2020

(Axel Boer) #1

Les Echos Mardi 7 avril 2020 EVENEMENT// 05


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libertés individuelles. « Il n’y a pas
de sanctions en cas de non-respect »
des demandes de confinement,
précise Colin Jones.
Le pouvoir compte donc essen-
tiellement sur le civisme de sa p opu-
lation et le respect de l’autorité pour
faire r especter un confinement s ou-
ple. Et, ainsi, éviter une propagation
du virus qui n’a pour l’instant pas
débouché, dans l’Archipel, sur une
crise sanitaire majeure.

Officiellement, le Japon n’a
recensé que 3.872 contaminations
sur une population de 127 millions
d’habitants et a enregistré moins d e
100 décès liés à la maladie. Mais ces
chiffres ne donnent qu’une idée
partielle de la réalité de la pandé-
mie. Depuis le début de la crise fin
janvier, les autorités ne testent
qu’au compte-gouttes leurs
citoyens pour ne pas submerger les
hôpitaux. Elles doivent légalement
hospitaliser toutes les personnes
qui seraient testées positives au
Covid-19, même celles qui
n’auraient que des symptômes
légers ou pas de symptômes du
tout. Elles ont donc préféré refuser
des tests et demander aux gens
apparemment contaminés de se
mettre en quarantaine chez eux
afin de ne pas encombrer les servi-
ces médicaux dédiés. La priorité
étant de réserver les lits aux person-
nes vulnérables, et notamment aux
personnes très âgées.

Cri d’alerte
arallèlement, le pays a tenté d’iden-
tifier des foyers de contaminations
afin de contrôler et d’isoler systé-
matiquement toutes les personnes
entrées en contact avec des indivi-
dus infectés. Mais ce travail devient
de plus en plus compliqué avec la
multiplication des cas. Dimanche,
la gouverneure de Tokyo, Yuriko
Koike, avait indiqué que ses équipes
ne parvenaient plus à identifier
l’origine de l’infection de plusieurs
dizaines des nouveaux contaminés
et qu’elle redoutait donc une désta-
bilisation rapide du système médi-
cal. Un cri d’alerte qui aura, finale-
ment, été entendu par le Premier
ministre.
—Y. R.

Affirmant que la situation médi-
cale était sous contrôle, le Premier
ministre japonais résistait, depuis
des semaines, à la stratégie du
confinement adoptée désormais
par une majorité de pays occiden-
taux et par de plus en plus de
nations d’Asie. Il redoutait le
scénario d’une paralysie écono-
mique.
Mais il a finalement cédé, lundi
soir, à la pression des gouverneurs
de Tokyo et d’Osaka, ainsi qu’aux
mises en garde inquiétantes de
plusieurs médecins sur la progres-
sion de l’épidémie de Covid-19 d ans
l’Archipel. Le dirigeant a annoncé
qu’il déclarerait formellement dès
mardi l’état d’urgence dans sept
zones de l’Archipel et que des res-
trictions de déplacement seraient
immédiatement instaurées.


Des restrictions « limitées »
Techniquement, le chef du gouver-
nement va user d’une loi amendée
en mars pour d éclarer l’état
d’urgence, pour une durée d’un
mois, à Tokyo et Osaka ainsi que
dans les préfectures de Saitama,
Chiba, Kanagawa, Hyogo et
Fukuoka. Autant de régions qui ont
constaté, depuis la fin mars, une
accélération des cas de contamina-
tions au coronavirus. A la suite de
cette déclaration, les autorités loca-
les déploieront leurs propres plans
de confinement, qui resteront tou-
tefois beaucoup moins stricts que
ceux déployés en France, en Chine
ou aux Etats-Unis. « Les mesures
sont étonnamment limitées et rédi-
gées dans des termes assez vagues »,
note, dans un tweet, le professeur
Colin Jones, un très bon connais-
seur du droit japonais.
Les gouverneurs de ces préfec-
tures vont pouvoir faire fermer
certains lieux jugés non essentiels
comme les musées, les salons de
coiffure ou les grands magasins.
Les supermarchés, les établisse-
ments bancaires et le réseau médi-
cal resteront, eux, ouverts, tout
comme l’essentiel du réseau de
transport public. Les autorités
locales pourront aussi « deman-
der la coopération » des entrepri-
ses et des habitants, qui seront
priés de rester au maximum chez
eux. Mais elles ne pourront pas
forcer légalement cet enferme-
ment du fait d’une forte tradition



  • au moins légale – du respect des


Le Premier ministre
japonais a annoncé lundi
que l’état d’urgence serait
déclaré mardi dans
sept régions du pays,
dont Tokyo et Osaka.


L’archipel bascule dans


un confinement light


Le pouvoir compte
essentiellement
sur le civisme
de sa population et
le respect de l’autorité
pour faire respecter
les mesures prises.

Shinzo Abe, le premier ministre du Japon, doit dévoiler ce mardi
les détails du plan qui sera, selon lui, « équivalent à 20 % du PIB ».

Is sei Ka

to/Reuters

ses, que la planète était sur le point
de vivre, avec la pandémie de
Covid-19, sa pire crise économique
depuis la fin de la Seconde Guerre
mondiale, l’exécutif nippon a tenu
à annoncer des montants bien
supérieurs aux plans présentés
lors des précédentes grands chocs,
comme celui de 2008. A l’époque,
le pouvoir avait présenté un plan
de relance à 56.700 milliards de
yens. « J’ai décidé de déployer le plus
grand plan économique jamais
lancé. Il sera équivalent à 20 % du
PIB » , a martelé Shinzo Abe.

Un chèque aux foyers
démunis et aux PME
Si les détails exacts de ce nouveau
programme ne seront dévoilés que
ce mardi, les officiels notent déjà
que ce plan intégrera les
6.000 milliards de yens de chèques
promis aux foyers les plus dému-

ou par des structures financières
publiques.

Nouvelles obligations
souveraines
Pour financer la partie réelle de sa
relance, qui devrait comprendre
un énième plan de grands chan-
tiers publics, le gouvernement va
devoir émettre de nouvelles obli-
gations souveraines qui viendront
gonfler une dette publique déjà
équivalente à 250 % du produit
intérieur brut.
La semaine dernière, l’agence
Reuters avait estimé que l’Etat
japonais aller augmenter, sur
l’année fiscale commencée au
1 er avril, ses émissions d’obliga-
tions de 16.000 milliards de yens
pour atteindre sur douze mois un
total d’au moins... 145.000 mil-
liards de yens (1.230 milliards
d’euros).n

Le Japon s’invente une relance


à 100.000 milliards de yens


Yann Rousseau
@yannsan
—Correspondant à Tokyo


Pour rassurer les marchés et soute-
nir une économie qui pourrait,
selon les analystes de Citi, se con-
tracter de 4,7 % en 2020, il fallait un
nombre fracassant. Lundi soir, le
Premier ministre japonais a donc
annoncé que son gouvernement
allait approuver, dès ce mardi, un
gigantesque plan de soutien à l’éco-
nomie de... 108.000 milliards de
yens, soit l’équivalent de 920 mil-
liards d’euros. Estimant, en coulis-


Le gouvernement
va présenter, ce mardi,
le plus grand programme
de soutien à l’économie
de son histoire récente,
équivalent à 920 milliards
d’euros.


nis et aux PME particulièrement
malmenées par la crise du corona-
virus, a insi que les 26.000 milliards
déjà consacrés au financement
d’un moratoire sur le paiement de
certains impôts et de cotisations.

Au final, les spécialistes notent
que les montants réellement
dépensés seront, comme c’est
l’habitude, bien inférieurs aux
sommes phénoménales agitées
en conférence de presse. Une
large partie de ces plans japonais
étant généralement constituée
d’offres de prêts garantis par l’Etat

Seul un montant
limité de ce plan
spectaculaire
débouchera sur
des dépenses réelles.
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