Le Monde - 03.04.2020

(lu) #1

10 |coronavirus VENDREDI 3 AVRIL 2020


0123


Les détails du second tour des municipales fixés


Si le scrutin n’a pas lieu avant fin juin, les électeurs seront de nouveau convoqués pour deux tours


L

e ministre de l’intérieur,
Christophe Castaner, a
présenté en conseil des
ministres, mercredi
1 er avril, une ordonnance préci­
sant les dispositions électorales
de la loi d’urgence sanitaire du
23 mars. Celle­ci prévoit que dans
les communes où un second tour
des élections municipales est né­
cessaire, il est reporté au plus tard
à la fin juin. La date en est fixée
par décret en conseil des minis­
tres au plus tard le 27 mai, après
avis du conseil scientifique.
Si la situation sanitaire ne per­
met pas l’organisation du second
tour avant la fin du mois de juin,
les électeurs des communes non
pourvues lors du premier tour,
qui s’est tenu le 15 mars, seront de
nouveau convoqués par décret
pour les deux tours de scrutin.
Le mandat des conseillers mu­
nicipaux et communautaires,
d’arrondissement, des conseillers
de Paris et des conseillers métro­
politains sortants est prolongé
pour une durée fixée par la loi.
Dans tous les cas, l’élection des
conseillers municipaux et com­
munautaires, d’arrondissement,
des conseillers de Paris et des con­
seillers métropolitains de Lyon
élus dès le premier tour organisé
le 15 mars, reste acquise.
L’ordonnance du 1er avril tire les
conséquences du report du se­
cond tour, s’il peut se tenir avant
la fin juin. D’une part, pour que ce
report n’altère pas la sincérité du
scrutin, les listes électorales arrê­
tées pour le premier tour seront
reprises pour le second, et seule­
ment ajustées des électeurs deve­
nus majeurs dans l’intervalle ou
ayant acquis la nationalité fran­
çaise inscrits d’office par l’Insee.
Les autres inscriptions sur les lis­
tes électorales, effectuées par le
maire ou la commission de con­
trôle, ne prendront effet qu’au

lendemain du second tour. De
même qu’aucune radiation en cas
de déménagement ne pourra de­
venir effective avant.
En ce qui concerne le dépôt des
candidatures, il pourra s’effectuer
au plus tard le mardi suivant la
publication du décret de convoca­
tion des électeurs, comme l’indi­
quait la loi. Celles qui ont déjà été
déposées les 16 et 17 mars restent
valables ; il ne sera pas nécessaire
de faire de nouvelles démarches.
Il reviendra au futur décret de
convocation des électeurs de fixer
l’ouverture d’une période com­
plémentaire de dépôt des candi­
datures et de permettre aux can­
didats ayant déjà déposé la leur de
la retirer, éventuellement.
Dans les communes de moins
de 1 000 habitants non entière­
ment pourvues dès le premier
tour, le nombre de sièges restant
à pourvoir s’établit en fonction
du nombre d’élus au premier
tour de scrutin. Les vacances,
pour cause de décès ou autre, in­
tervenues entre­temps ne sont
pas prises en compte.
La loi du 23 mars a reporté la
date limite de dépôt des comptes
de campagne à la Commission
nationale des comptes de campa­
gne et des financements politi­
ques (CNCCFP) au 10 juillet pour
les listes non qualifiées pour le se­
cond tour ou ayant retiré leur can­
didature, dans les communes de

élu dès le premier tour, pour
cause de cumul par exemple, ne
prend effet qu’à son entrée en
fonction effective.

Décalage des étapes suivantes
Enfin, l’ordonnance tire les consé­
quences du report au 11 septem­
bre de la date limite de dépôt à la
CNCCFP des comptes des partis et
groupements politiques. Elle ré­
percute ce décalage sur les étapes
suivantes destinées à établir la se­

conde fraction de l’aide publique
aux partis politiques : la première
fraction est déterminée par le
nombre de voix obtenues au pre­
mier tour des élections législati­
ves par les formations dont les
candidats ont obtenu au moins
1 % des voix dans au moins 50 cir­
conscriptions ; la seconde frac­
tion par le nombre de parlemen­
taires déclarant, chaque année, se
rattacher à telle ou telle forma­
tion politique. La première partie

est fixe, la seconde dépend des
déclarations annuelles de ratta­
chement. Habituellement, cha­
que parlementaire doit commu­
niquer sa déclaration de rattache­
ment avant le 31 décembre. Ce
délai est porté au 31 janvier 2021.
La date de versement de l’aide pu­
blique aux partis politiques, qui
intervient généralement en fé­
vrier, ne devrait cependant pas en
être affectée.
patrick roger

Lors du premier tour des élections municipales, à Lyon, le 15 mars. BRUNO AMSELLEM/DIVERGENCE POUR « LE MONDE »

La « prime Macron » défiscalisée


pourra atteindre 2 000 euros


De nombreux groupes de distribution ont déjà prévu de verser cette somme exceptionnelle


L


a « prime Macron » pourra
atteindre 2 000 euros fina­
lement. Et les entreprises
qui verseront cette prime défisca­
lisée pourront la moduler en
fonction des conditions de travail
liées à l’épidémie, selon l’ordon­
nance adoptée, mercredi 1er avril,
en conseil des ministres. « Afin de
permettre de récompenser plus
spécifiquement les salariés ayant
travaillé pendant l’épidémie de
Covid­19, un nouveau critère de
modulation du montant de la
prime pourra également être re­
tenu par l’accord collectif ou la dé­
cision unilatérale de l’employeur
mettant en œuvre cette prime » ,
souligne l’ordonnance.
L’entreprise pourra ainsi légale­
ment distinguer ses salariés
devant se rendre sur leur lieu de
travail – comme les caissières
dans la grande distribution ou les
ouvriers sur un chantier – des
autres en télétravail, ce qui était
demandé par les fédérations pa­
tronales. « Il s’agit de récompenser
les salariés au front qui tiennent
leur poste de travail pendant cette
période » , a justifié la ministre du
travail, Muriel Pénicaud, à l’issue
du conseil des ministres.
Le 24 mars, le ministre de l’éco­
nomie avait décidé de faire sauter
le verrou qui bloquait la distribu­
tion de la « prime Macron » dans
les PME. Largement distribuée
par les petites entreprises
en 2019, après la crise des « gilets
jaunes », la prime du pouvoir
d’achat promettait de s’essouffler

en 2020. Les conditions impo­
saient en effet aux entreprises de
passer par un accord d’intéresse­
ment – peu courant dans les TPE –
pour donner une aide aux sala­
riés. Cependant, dans les entre­
prises où un accord aura été
négocié d’ici au 31 août, le niveau
de la prime pourra être porté à
2 000 euros.
Dans le contexte actuel, le Syndi­
cat des indépendants (SDI), qui
avait réclamé en vain ce change­
ment dès décembre 2019, reste
perplexe. « Pour les entreprises
d’au moins 20 salariés, cela peut
avoir un sens, mais les plus petites
n’y voient que de la provocation.
Elles ne savent même pas com­
ment elles vont pouvoir payer leurs
salariés et leurs charges courantes
d’ici lundi 6 avril, alors parler de
prime... » , s’exclame Marc Sanchez,
le secrétaire général du SDI.

Définir « une juste gratification »
Jean­Eudes du Mesnil, secrétaire
général de la Confédération des
petites et moyennes entreprises,
confirme : « La première urgence
pour les petites entreprises est
d’assurer la trésorerie et le paie­
ment des salaires. Enormément de
TPE sont touchées, car la crise des­
cend en cascade. Mais, pour les
grands groupes organisés avec
des indépendants, c’est tant
mieux. Les premiers concernés
sont ceux de la distribution. »
Dès la mi­mars, plusieurs
grands groupes de ce dernier
secteur ont décidé l’attribution

de « primes Macron » dans le ca­
dre d’un accord d’intéressement
pour reconnaître l’engagement
des personnels dans une situa­
tion de travail inédite. La Fédéra­
tion générale des travailleurs de
l’agriculture, de l’alimentation,
des tabacs et des activités
annexes (FGTA), soulignant
l’oubli des salariés des franchisés
(Casino, Auchan, Carrefour,
Leader Price, Franprix, Monop’)
et des indépendants (Leclerc,
Hyper U, Super U, Intermarché),
avait revendiqué pour eux une
prime de reconnaissance. « La
priorité numéro un, c’est la sécu­
rité, qui évolue dans le bon sens.
Notre seconde demande, c’est la
prime, car les salaires sont bas.
Ces travailleurs sont en première
ligne et, sans la pression des grou­
pes, les franchisés ne feront rien » ,
explique Dejan Terglav, secré­
taire générale de la FGTA­FO.
Les distributeurs comme Le­
clerc, Intermarché ou Système U
ont lancé le mot d’ordre, à toutes
les entités de leur marque, de dis­
tribuer une prime exception­

nelle : « Il a été décidé entre la
plupart des distributeurs qu’une
prime de 1 000 euros pourrait
récompenser les personnels de
terrain mobilisés dans cette crise
(...). L’enseigne invite l’ensemble
des magasins indépendants de
son réseau à définir les modalités
d’organisation d’une juste gratifi­
cation » , écrivait Michel­Edouard
Leclerc, dans un communiqué du
24 mars.

« Mépris pour la vie humaine »
Avant même l’intervention du
ministre de l’économie, Intermar­
ché avait appelé les indépendants
qui constituent son réseau de
points de vente Intermarché et
Netto à tout faire pour « mettre en
œuvre une rétribution annuelle ex­
ceptionnelle à l’ensemble des colla­
borateurs ». Même engagement
chez Système U : « Les patrons de
magasins indépendants de notre
groupement coopératif sont appe­
lés, en fonction des moyens de leur
entreprise, à mettre en œuvre le
même principe de prime excep­
tionnelle pour les salariés, en ma­
gasin et dans les drives. »
Il est encore trop tôt pour faire
le bilan de ce que les PME feront
de cette prime. Mais pour la
Fédération du commerce et des
services de la CGT, ce n’est qu’un
encouragement à travailler dans
des conditions dangereuses. Cela
relève « du mépris le plus total
pour la vie humaine » , déplore le
syndicat sur son site.
anne rodier

« Les plus petites
entreprises
n’y voient que de
la provocation »
MARC SANCHEZ
secrétaire général du
Syndicat des indépendants

9 000 habitants et plus. Cette date
vaut également pour l’ensemble
des listes dans les communes où
le conseil municipal a été élu dès
le premier tour.
Pour celles présentes au second
tour, cette date a été reportée au
11 septembre. Conséquence : le dé­
lai d’instruction de la CNCCFP
pour statuer sur les recours est
porté à trois mois au lieu de deux.
L’ordonnance précise également
que la démission d’un candidat

La Foire du Trône annulée


malgré les espoirs des forains


L


es forains étaient déjà sur place. Ils avaient monté la plu­
part des attractions, et voulaient croire que la foire finirait
par ouvrir ses portes, une fois le confinement levé. Malgré
leur pression, la Foire du Trône n’aura pas lieu cette année.
Compte tenu de l’épidémie de Covid­19, la maire de Paris et le
préfet de police ont décidé conjointement, mercredi 1er avril,
d’annuler l’édition 2020 de la plus grande fête foraine de France.
Cette année, la fête devait se tenir du 27 mars au 24 mai dans le
12 e arrondissement de Paris, à la lisière du bois de Vincennes. La
date d’ouverture avait déjà été repoussée, mais les forains instal­
lés dans leurs caravanes gardaient un mince espoir de sauver la
foire malgré tout. Mardi, sentant l’annulation arriver, ils ont mis
sur la table une ultime contre­proposition. Puisque le ministre
de l’éducation, Jean­Michel Blanquer, évoquait une possible
réouverture des écoles le 4 mai, les dirigeants de l’association des
forains, Le Monde Festif, ont écrit à
Anne Hidalgo et Didier Lallement pour
proposer de décaler la foire. Dans ce
scénario, elle se serait tenue du 8 mai
au 14 juin. Cela « permettrait de sauver
au moins une partie de l’économie du
monde forain », écrivaient les responsa­
bles, en insistant sur l’enjeu économi­
que et social. La Foire du Trône, qui ac­
cueille environ trois millions de visi­
teurs par an, fait travailler 2 000 per­
sonnes sur le site. « A elle seule, elle représente un bon tiers du
chiffre d’affaires annuel des forains concernés », avance Marcel
Campion, le « roi des forains », par ailleurs candidat aux munici­
pales à Paris – ses listes ont recueilli 0,4 % des suffrages exprimés.
Cette proposition n’a pas convaincu le préfet de police ni la
maire de Paris. « Même si le déconfinement a lieu en mai, il sera
progressif, et il ne paraissait pas possible de maintenir un grand
rassemblement dans ces conditions, explique Emmanuel
Grégoire, premier adjoint d’Anne Hidalgo. Nous avons préféré
anticiper une décision assez inéluctable et prévenir d’emblée les
forains. » Les quelque 200 familles déjà installées sur place sont
néanmoins autorisées à y demeurer jusqu’au 14 juin, date pré­
vue initialement pour leur départ.
La Ville de Paris se dit prête à « accompagner les forains »,
notamment en les aidant à bénéficier des dispositifs de soutien
aux acteurs économiques mis en place par l’Etat. « Mais évidem­
ment, il y a beaucoup de cash dans ce genre de foire, tout n’est pas
déclaré, ce qui rend plus difficile une couverture totale par des
assurances ou l’Etat », glisse un expert.
denis cosnard

LES 200 FAMILLES 


DÉJÀ INSTALLÉES 


SONT NÉANMOINS


AUTORISÉES 


À RESTER SUR PLACE


La date
du second tour
doit être fixée
par décret
en conseil des
ministres au plus
tard le 27 mai
Free download pdf