Libération - 06.04.2020

(Axel Boer) #1

26 u http://www.liberation.fr f facebook.com/liberation t @libe Libération Lundi 6 Avril 2020


culture/


grâce et de la beauté. Avec Nino Laisné, évi-
demment. Le plus moderne des vidéastes et
musiciens baroques, compagnon de création
du danseur et chanteur François Chaignaud,
propose sur sa page Facebook un de ses courts
métrages, l’Air des infortunés (2019), produit
par le Frac Franche-Comté où il se trouvait
­récemment en résidence. On y voit un méca-
nisme d’horlogerie rutilant, réplique des en-
trailles d’un automate offert à Marie-Antoi-
nette. On y entend la voix sublime du «ténor-
baryton» Marc Mauillon interpréter une
romance de Berquin. Et on y découvre un tra-
velling arrière ahurissant où, entre les plaintes
feutrées de la partition, collisionne un chaos
d’époques autour de la figure des prétendus
Louis XVII. Magnifique, baroque et vision-
naire. G.Ti.
https://vimeo.com/372126002

4 Avec une pittoresque
galeriste
Les œuvres vous manquent? Les galeries
aussi? En attendant le déconfinement, on
peut toujours se bercer de la voix éraillée et
de la présence chaleureuse de Suzanne Tara-
sieve, filmée par Rima Samman et intervie-
wée par Béatrice Andrieux dans Suzanne Ta-
rasieve, vocation galeriste, un film de 2016. Ce
sage portrait de la pittoresque galeriste instal-
lée dans le Marais, mis exceptionnellement
en ligne sur le site de la galerie, suit pas à pas
la «bohémienne» Tarasieve, haute comme
trois pommes, dans son amour de l’art et des
artistes. Aux fourneaux en train de décon­-
geler un plat ou dans ses réserves pleines
d’œuvres («il faut savoir tout faire quand on
est galeriste»), la pasionaria revient sur son
parcours de peintre ratée, ses rencontres de
jeunesse (Philippe Noiret, Laurent Le Bon ou
Jean Marais) et sur son premier espace situé
à Barbizon, haut lieu de la peinture et an-
cienne base militaire de l’Otan. C.Me.
http://suzanne-tarasieve.com/current /

5 Avec du reggae anglais
Ourdie par quelques enfants d’immi-
grés caribéens à la fin des années 70 avec la
volonté de satisfaire leurs plus sombres per-
versions romantiques, mais aussi d’irriter les
puristes réfractaires à l’idée d’écouter autre
chose que du roots jamaïcain, le lovers rock
est la mutation la plus scandaleusement com-
merciale, féministe et délicieuse du reggae
à être advenue en territoire britannique. En
France, seule Sade, starlette du genre avant
de devenir star du smooth tout court en 1984,
a eu les faveurs du grand public. Pour rattra-
per le plaisir, plusieurs compilations ont vu
le jour chez Soul Jazz, qui documentent par-
faitement le premier âge d’or des divas Carroll
Thompson et Janet Kay ou des politiques
Brown Sugar. Celle-ci est plus relax, pleine de
reprises de tubes funk à la cool (Do Me Baby
de Prince, Free de Deniece Williams) et de
grandes voix à redécouvrir (Peter Hunnigale).
Irrésistible. O.L.
For the Love of You
(Athens of the North).
En écoute sur https://aotns.bandcamp.com/
album/for-the-love-of-you.

En guerre contre l’ennui :


des VF virales, une galeriste


allumée et du reggae sensuel


Chaque jour de la semaine,
«Libération» vous propose
une sélection culturelle
adaptée à la vie en
confinement, en attendant
la capitulation du Covid-19.


1 Avec de l’imagerie laser
Se pourrait-il que la Forteresse noire,
seul et unique film fantastique de Michael
Mann, son plus maudit aussi, soit enfin vi­-
sible quelque part en VOD? Réponse positive
et décrochages de mâchoire en vue chez quel-
ques «Michael Manniaques» qui ont dû subir
la découverte de l’étrange objet d’après une
cassette VHS rincée. Ce «conte pour adultes»
narrant la confrontation d’un escadron nazi
et d’une créature ancestrale dessinée à l’ar­-
rache par Enki Bilal ressemble à un crumble
de nazisploitation et d’ésotérisme cheap. Le
film garde un charme fou pourtant, grâce aux
décors incroyables de la forteresse (du «Albert
Speer médiéval»), le recours improbable à
l’imagerie laser et quelques scènes d’antholo-
gie que seul un Mann, même en galère, pou-
vait imaginer. O.L.
La Forteresse noire
de Michael Mann en VOD sur Orange.


2 Avec de faux doublages
On n’est pas complètement transporté
par l’humour «tire-mon-doigt» un peu systé-
matique des détournements d’Erin Brocko-
vich et de Closer, entre adultes consentants.
Bon. Visiblement passionné – comme Jean-
Marie Bigard doit sûrement l’être – par les
épopées intestinales qu’entraîne parfois le co-
ronavirus, le duo Creustel (contraction de Ma-
rion Creusvaux et Julien Pestel) n’en reste pas
moins le pourvoyeur chéri de web-vidéos dé-
connantes grâce auxquelles ce couple de co-
médiens s’est hissé, depuis le 18 mars, en nou-
velles stars de la Covidie. A revoir sur leurs
pages Facebook, Twitter ou Instagram, leurs
faux doublages d’une scène de Shining avec
un Jack Nicholson tapant ses attestations de
sortie sur imprimante, d’Independence Day
à la rencontre du docteur Raoult, ou d’Inter-
stellar avec un Matthew McConaughey en en-
gueulade Skype avec Jessica Chastain. È.B.
https://www.instagram.com/creustel


3 Avec une horlogerie
baroque
Chut. Laissons les experts s’époumoner dans
la télé éteinte et retrouvons le chemin de la


1
OCS

3
Zorongo Production. Nino Laisné

4
Filigranes DR^5
Free download pdf