Les Echos Lundi 23 mars 2020 FINANCE & MARCHES// 31
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tre les impayés des PME et ETI
françaises avait déjà é té évoquée
il y a quelques jours mais le gou-
vernement a décidé de le con-
crétiser devant les remontées
du terrain. « C’est une action un
peu préventive, explique-t-on à
Bercy, à ce stade nous n’avons pas
encore observé de coupure mas-
sive de couverture mais il y a déjà
des mouvements qui risquent de
s’amplifier. »
Ces derniers jours, le gouver-
nement avait demandé aux
assureurs-crédit de respecter
une convention adoptée après
- Via celle-ci, les acteurs du
secteur s’e ngagent à ne pas
réduire trop drastiquement et
rapidement leurs couvertures
au détriment des entreprises et
à être à transparents vis-à-vis de
leurs assurés et de leurs clients.
Soutenir les entreprises
exportatrices
Officiellement les acteurs
jouent le jeu. « Si le profil de ris-
que d’une entreprise se dégrade,
Coface s’efforcera d’ajuster ses
garanties de manière progressive
tout en renforçant la communi-
cation envers les entreprises », a
ainsi assuré Coface jeudi.
Et l’entreprise, acteur majeur
du secteur, de promettre, une
« plus grande flexibilité quant au
délai de paiement des primes
dues». Un engagement pris par
l’ensemble des assureurs jeudi.
A l’heure où le coronavirus per-
turbe l’ensemble des chaînes de
production dans le monde,
l’exécutif ne veut pas non plus
laisser sur le carreau les PME et
ETI ayant des d ébiteurs à
l’étranger. Il s’engage donc à
muscler son dispositif de réas-
surance publique Cap Fran-
cexport. Lancé en 201 8, celui-ci
permet à bpifrance de réassu-
rer les assureurs-crédit privés
qui avaient accepté de couvrir
les entreprises françaises
exportant dans des pays où
sévissent des problèmes politi-
ques et commerciaux.
Le plafond d’encours réassu-
rable par l’Etat sera porté de 1 à
2 milliards d’euros. Et le dispo-
sitif, qui concernait jusque-là
les exportations vers u ne grosse
quinzaine de pays, parmi les-
quels l’Angola, l’Ethiopie, le
Nigeria ou encore l’Ouzbékis-
tan, « sera élargi à un plus grand
nombre de pays de destination »,
a souligné Bercy. Là encore, le
ministère s’est inspiré de ce qui
avait été fait dans la foulée de la
crise de 2008 et avait bénéficié
« à plus de 1.500 entreprises »,
selon le gouvernement.n
Le gouvernement
promet 10 milliards
d’euros pour aider les
fournisseurs à se couvrir
contre le risque d’im-
payés de leurs clients
français. Il a aussi décidé
de renforcer le dispositif
permettant à bpifrance
de sécuriser les transac-
tions des PME et ETI
exportatrices.
Impayés :
le gouvernement
met 10 milliards
pour protéger
les entreprises
de refus de l’ordre de 25 % des dos-
siers présentés par les courtiers. Et
un « blocage progressif du secteur du
crédit », s’alarme l’Association pro-
fessionnelle des intermédiaires en
crédits. Dans un courrier a dressé, la
semaine dernière, au ministre de
l’Economie, l’association demande
donc de « suspendre les préconisa-
tions du HCSF ». Pour Philippe
Taboret, cette mesure n’a plus de
sens alors même que la production
s’est arrêtée pour plusieurs
semaines.
L’association souhaite égale-
ment des « mesures de soutien pour
le crédit aux particuliers », comme
l’allongement des délais des clauses
suspensives à 90 jours ou l a possibi-
lité de reporter les échéances de
remboursement. « Il s’agit à la fois
d’éviter une explosion des conten-
tieux quand l’activité repartira et de
permettre d’aider les ménages à tra-
verser cette période difficile », expli-
que Philippe Taboret.
Pas de moratoire,
du cas par cas
Pour l’heure, pourtant, pas de ques-
tion de moratoire pour les ména-
ges. « Nous avons décidé de concen-
trer nos efforts sur les entreprises et
les commerçants et nous avons mis
en place des filets de sécurité très
important pour les ménages », a
expliqué Bruno Le Maire jeudi der-
nier. De son côté, la Fédération ban-
caire française, recommande, pour
les personnes en difficulté, « de con-
tacter son conseiller bancaire pour
examen de son cas particulier, et
notamment de regarder [...] la possi-
bilité d’activer, à la demande du
client, des dispositions de report de
prêts ». Ces dispositions existent
dans de nombreux contrats, mais
pas dans tous, tant s’en faut.
Toutefois, les banques devraient se
montrer bienveillantes, d’autant
que le coût de ce report, à charge du
client, est faible compte tenu du
niveau des taux. Société Générale a
annoncé la gratuité de l’échelonne-
ment des échéances pour les per-
sonnes en chômage partiel. Et une
grande banque accepte de porter à
90 jours le délai de l’offre de crédit.
« Les banques font leur maximum
et se montrent souples, reconnaît
Philippe Taboret. Mais alors, pour-
quoi ne pas généraliser ces mesures
pour ne pas ajouter des problèmes
aux problèmes? »n
Eric Benhamou
[email protected]
« L’activité a été stoppée net. » Ludo-
vic Huzieux, cofondateur du cour-
tier en crédit immobilier Artémis
Courtage, ne compte désormais
que « quelques dossiers ouverts par
jour contre une centaine en moyenne
auparavant ». Avec le confinement
de la population depuis une
semaine, c’est toute la chaîne de
production de crédit immobilier
qui est à l’arrêt : plus de visites, plus
de promesses de vente, plus d’offres
de crédit, plus de notaires.
« Les banques ne prennent plus de
dossiers, elles gèrent l’urgence et sont
mobilisées, à effectifs réduits, sur les
entreprises », confirme Philippe
Taboret, directeur général du
réseau de courtiers Cafpi.
« Paradoxalement, nous conti-
nuons de traiter énormément de
demandes d’informations en plus de
la gestion des dossiers en cours »,
observe Philippe Taboret. Et, préci-
se-t-il, « nous renouons a vec nos par-
tenaires bancaires car nous avons
besoin les uns des autres ».
Blocage du secteur
du crédit immobilier
Les relations entre courtiers et ban-
ques s’étaient sensiblement dégra-
dées depuis le début de l’année,
après la décision du régulateur de
limiter l’octroi de crédit en plafon-
nant les remboursements à 33 %
des revenus.
Cette recommandation du Haut
Conseil de stabilité financière
(HCSF) avait été suivie à la lettre par
les banques, provoquant des taux
La production de crédit
immobilier à l’arrêt
Face au blocage des
transactions dans l’immobi-
lier, les courtiers en crédit
militent pour des mesures
de soutien aux ménages
et la suspension
des recommandations
du régulateur. Les banques
multiplient les initiatives
pour aider leurs clients.
Avec le confinement de la population depuis une semaine, c’est toute la chaîne de production
de crédit immobilier qui est à l’arrêt : plus de visites, plus de promesses de vente, plus d’offre
de crédit, plus de notaires. Photo iStock
Solenn Poullennec
@SolennMorgan
Le gouvernement complète sa
boîte à outils pour aider les
entreprises à faire face à la pan-
démie de coronavirus. Après
avoir proposé un filet de sécurité
de 300 milliards d’euros sur les
crédits bancaires, il s’est engagé
jeudi à déployer un parachute
de 10 milliards d’euros pour
l’assurance-crédit. De quoi per-
mettre aux entreprises d e
mieux se protéger contre les
impayés à l’heure où ceux-ci ris-
quent d’exploser. L’exécutif a
déjà tiré l a sonnette d’alarme sur
le sujet. « Certaines entreprises
s’estiment exonérées du paie-
ment de leurs factures à cause de
la crise sanitaire que nous vivons.
C’est inacceptable et c’est dange-
reux pour des milliers de petites et
moyennes entreprises prestatai-
res », a déclaré jeudi le ministre
de l’économie, Bruno Le Maire.
Afin d’éviter une explosion des
délais de paiement, le ministre a
donc demandé à son adminis-
tration (la DGCCRF) de veiller
au r espect des règles en la
matière.
Pour préserver le crédit inte-
rentreprises, un marché de
700 milliards d’euros (selon le
Trésor), présenté comme un
« maillon essentiel du finance-
ment d es entreprises », le g ouver-
nement a décidé d e compléter et
soutenir l’action des assureurs-
crédits. Ces acteurs, que sont
Euler Hermes, Coface ou encore
Atradius, assurent les fournis-
seurs qui ont accordé des délais
de paiement à leurs acheteurs.
Alors qu’ils couvrent quelque
200 milliards d’euros de créan-
ces, la crise pourrait les pousser
à réduire leurs garanties. Afin
d’éviter de laisser des entrepri-
ses démunies face aux impayés,
l’Etat a donc décidé de répliquer
un dispositif qui avait fait ses
preuves après la crise de 2008.
Concrètement, le projet de loi de
finances rectificative actuelle-
ment en discussion doit accor-
der une garantie publique à
hauteur de 10 milliards d’euros
sur un an. Lors de la crise finan-
cière, la garantie avait porté sur
8,4 milliards sur deux ans. La
Caisse Centrale de Réassurance
(CCR), l’entreprise publique qui
joue un rôle clé dans la couver-
ture des catastrophes naturelles
dans l’Hexagone, sera grâce à
cette garantie à même de sup-
porter les risques boudés par les
assureurs-crédit. La mise en
place de ce filet de sécurité con-
L’ Etat a décidé
de répliquer un
dispositif qui avait
fait ses preuves
après la crise
de 2008.
« Certaines
entreprises
s’estiment
exonérées
du paiement
de leurs factures
à cause de la
crise sanitaire
que nous vivons.
C’est
inacceptable. »
BRUNO LE MAIRE
Ministre de l’Economie
et des Finances