Le Monde - 13.03.2020

(Nancy Kaufman) #1
0123
VENDREDI 13 MARS 2020

FRANCE


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L


es études de santé vivent
une petite révolution
cette année sur Parcour­
sup. Alors que le choix
des vœux d’orientation des ly­
céens sur la plate­forme d’admis­
sion dans l’enseignement supé­
rieur s’achève jeudi 12 mars à mi­
nuit, les nombreux candidats qui
rêvent de rejoindre la médecine,
la pharmacie, ou encore l’odon­
tologie et la maïeutique ont dû
s’approprier une nouvelle archi­
tecture. « Compliquée », en­
tend­on déjà dans les familles,
mais « plus ouverte ».
« C’est une chance pour mon
fils », estime Anne, elle­même
médecin généraliste, dont le gar­
çon en terminale scientifique a
coché l’une des nouvelles forma­
tions, une licence de biologie
avec « option santé ». « Le système
est plus complexe qu’avant, mais
c’est positif pour les jeunes tentés
par des études de santé, mais qui
hésitent entre plusieurs projets, et
n’auraient pas voulu aller en Pa­
ces », juge­t­elle.
Jusqu’ici, la fameuse Paces (pre­
mière année commune aux étu­
des de santé) constituait l’unique
voie post­bac pour accéder en­
suite à ces métiers. Ses quelque
57 000 étudiants avaient en ligne
de mire un concours décrié, sou­
vent considéré comme un vérita­
ble « gâchis », avec un « échec »
programmé des trois quarts des
postulants. Annoncée par Em­
manuel Macron en septem­
bre 2018, la suppression du nu­

merus clausus – le nombre de
places déterminé par l’Etat, qui
sera désormais fixé au niveau des
universités – s’accompagne de la
fin de cette Paces.
A la place, les candidats ont
désormais plusieurs possibili­
tés : d’un côté, les parcours spéci­
fiques accès santé (PASS) – les
plus ressemblants à la Paces ac­
tuelle –, qui comporteront
une mineure à choisir dans une
autre discipline ; de l’autre, des li­
cences classiques (en biologie,
économie, droit...), avec une op­
tion accès santé (LAS).

Diversifier les profils
Ces deux types de filières visent à
diversifier les profils des futurs
médecins, et à assurer une pour­
suite d’études en licence, pour
ceux qui échoueront à rejoindre
la médecine, où une barrière sé­
lective va demeurer. A l’issue
d’une année de LAS ou de PASS,
les étudiants pourront tenter leur
chance une première fois vers les
études de santé, avec une se­
conde chance ouverte à l’issue de
leur deuxième ou troisième an­

née d’études. Reste à savoir com­
ment va s’opérer la répartition
des jeunes à l’entrée de ces diffé­
rents cursus. Du côté des univer­
sités, on réfléchit encore à la mé­
canique pour classer les candi­
dats. Le sujet est particulière­
ment sensible : la filière constitue
bien souvent un projet de longue
date dans les familles, et plus
d’un lycéen sur dix a effectué un
vœu en Paces en 2019, parmi les
quelque 700 000 inscrits.
« Il n’y aura pas de modèle uni­
que, cela va varier d’une univer­
sité à l’autre », explique Patrice
Diot, à la tête de la Conférence
des doyens de médecine, qui y
voit « l’adaptation aux différents
écosystèmes » déployés sur les
territoires.
D’après les chiffres du minis­
tère de l’enseignement supé­
rieur, les cursus ont été multi­
pliés par trois, avec 112 sites uni­
versitaires proposant au moins
une formation menant aux étu­
des de santé, contre trente­sept
facultés de santé jusqu’ici. Quant
aux disciplines ouvertes
aux candidats, elles se concen­
trent en sciences et en technolo­
gies, mais aussi en humanités,
droit, économie, ou encore en
psychologie et en sciences et
techniques des activités physi­
ques et sportives (Staps).
Une règle se dessine néan­
moins à l’entrée des parcours
« santé » (PASS), rapporte­t­on
dans nombre de facultés : les ré­
sultats scolaires dans les matiè­

res scientifiques – physique, chi­
mie, sciences de la vie, mathéma­
tiques – vont dominer dans les
critères de classement des candi­
datures. Avec des nuances : l’an­
glais et les notes de français se­
ront aussi importants, envisage­
t­on à l’université de Tours, ou en­
core les résultats dans la matière
de mineure choisie.
Dans les licences avec option
santé (LAS), les dossiers des ly­
céens seront le plus souvent exa­
minés à l’aune des critères appli­
qués par la licence disciplinaire.
« Mais nous allons veiller à asso­
cier des collègues de santé à ces
commissions d’examen », précise
Lynne Franjié, vice­présidente
formation à Lille.
Ici et là, une même diversité de
pratiques s’annonce, concernant
les autres éléments du dossier du
lycéen (lettre de motivation, fi­
lière de bac, lycée d’origine...).
« Nous n’avons pas encore finalisé
l’algorithme qui s’appuiera sur dif­
férents paramètres, dont évidem­
ment les notes des candidats, mais
la réflexion doit avoir lieu sur la
prise en compte du lycée d’origine,
estime Xavier Jeunemaitre,
doyen de la faculté de santé de
l’université de Paris. Il y a d’excel­
lents lycéens partout, c’est une évi­
dence, mais certains lycées ont
une politique élitiste dans la nota­
tion, il faut pouvoir donner un
poids à cela. »
Car chaque détail va compter.
« On bascule dans un système de
sélection à l’entrée, cela va forcé­

ment créer des frustrations », es­
time Djillali Annane, doyen de la
faculté de médecine de Versailles.
Car, jusqu’à aujourd’hui, la Paces
répondait à la demande des ly­
céens. Comme le montrent les
premiers chiffres qui remontent
dans plusieurs universités, la pro­
portion de candidatures devrait y
être similaire, alors que le nombre
de places, lui, sera inférieur. A Ver­
sailles, on doit ainsi passer de
950 places en Paces à 600 en PASS,
ou encore de 2 000 à 2 800 places
à l’université de Paris.

« Le puzzle est compliqué »
Une nécessité pour assurer le
vase communicant des places
vers les autres licences avec op­
tion santé, qui doivent donner
aux étudiants des chances égales
de décrocher sa place en méde­
cine ensuite. « Mais nous ne
voyons pas bien comment assu­
rer à un candidat refusé en PASS
qu’il trouvera une place dans une
LAS... », reconnaît un doyen, qui
espère que les lycéens auront au
moins effectué un vœu dans les
deux types de parcours.
Autre configuration, mêmes
interrogations : à Strasbourg,
comme dans trois autres facs
(Caen, Créteil, Poitiers), il a été
décidé de proposer uniquement
des LAS – pas de PASS.
« On s’attend à des taux de pres­
sion et à une sélectivité plus ou
moins forte d’une licence
à l’autre », explique le doyen
strasbourgeois Jean Sibilia, à pro­

pos des onze parcours avec op­
tion santé. Pour le professeur, si
« le puzzle est compliqué », « les
informations sont bien passées
auprès des familles, grâce aux
proviseurs de lycée », espère­t­il.
Les journées d’information de
l’université, prévues le week­end
du 7 et 8 mars, ont toutefois dû
être annulées pour cause de co­
ronavirus.
camille stromboni

Nouveau bac : le calendrier des


épreuves de contrôle continu assoupli


Jean­Michel Blanquer a dévoilé, jeudi, de premiers aménagements
des E3C introduites en classe de première

U


ne sortie de crise se des­
sine­t­elle au lycée, pour
le bac? Alors que les pro­
jecteurs sont braqués sur l’épidé­
mie due au coronavirus, le minis­
tre de l’éducation nationale a
maintenu son échéancier et an­
noncé, jeudi 12 mars, ce qui doit
changer lors de la passation, en
classe de 1re, des épreuves com­
munes de contrôle continu, les
fameuses E3C. Des aménage­
ments soufflés par le comité de
suivi de la réforme du lycée, qui a
rendu sa copie le 11 mars.
Principale annonce : la première
des trois sessions de contrôle con­
tinu introduites par la réforme du
bac ayant pris du retard, la
deuxième est repoussée. Les pro­
chains écrits pourront avoir lieu,
au choix des lycées, comme prévu
à partir du 20 avril, mais jusqu’à la
fin juin, et non jusqu’en mai,
comme cela avait été initialement
programmé. Quelques semaines
gagnées, pour « créer de la sou­
plesse dans les établissements », a
défendu M. Blanquer sur France­
info, jeudi, et assurer aux élèves
une « durée d’apprentissage suffi­
sante ». « Fin juin, les élèves de 2de
ne sont plus en cours, et les épreu­
ves E3C pourront être organisées
en parallèle des épreuves finales
des lycéens de terminale, comme
lors de journées banalisées », préci­
se­t­on Rue de Grenelle.
Ce réajustement, qui ne sur­
prend pas la communauté éduca­
tive, est aussi une réponse aux
blocages persistants dans les éta­
blissements. Cela ne concerne
plus « que » dix à quinze lycées,
s’accordent à dire le ministre de
l’éducation et les proviseurs du
SNPDEN­UNSA qui n’excluent pas,
pour « tourner la page », de délo­
caliser les dernières épreuves
dans des centres d’examen. Le col­

lectif d’enseignants Stop bac Blan­
quer recense, pour sa part, encore
une cinquantaine de lycées blo­
qués, de La Martinique au Mans
en passant par Paris, Bordeaux,
Marseille ou Nantes. « Il ne reste
qu’une dizaine de milliers de copies
à rentrer, sur 1,7 million », a tempo­
risé M. Blanquer sur Franceinfo.

Autres aménagements possibles
Une autre inflexion concerne la
banque nationale de sujets. Criti­
quée pour son ouverture tardive,
en décembre 2019, soupçonnée
de favoriser fuites et triche, elle
sera ouverte au grand public,
d’abord aux enseignants puis aux
élèves et à leurs parents, dès lors
qu’un nombre suffisant de sujets
par discipline sera atteint. La ban­
que de sujets n’était accessible
jusqu’à présent qu’aux ensei­
gnants de langues et d’histoire­
géographie concernés par la pre­
mière vague d’écrits.
Enseignants et proviseurs s’at­
tendaient à ce que leur ministre
de tutelle abandonne, même mo­
mentanément, la numérisation
des copies, une nouveauté qui a
mis plus d’un d’établissement à la
peine ces dernières semaines. Il
n’en est rien. « Cela reste une inno­
vation très importante, a soutenu
M. Blanquer à la radio. On est le
premier pays au monde à agir
comme cela. C’est un gain pour les
élèves. » Ceux­ci devraient pou­
voir consulter leurs copies corri­

gées ainsi que leurs notes avant
leur départ en vacances d’été, en
se connectant sur Internet.
M. Blanquer s’est engagé, en
revanche, à une « simplification
des modalités de passation, plus
en adéquation avec des épreuves
qui relèvent du contrôle continu ».
Des épreuves normalisées, en
somme, intégrées dans l’emploi
du temps des élèves et se passant
de convocation. Pas sûr que cela
réponde aux attentes du SNES­
FSU, syndicat fer de lance de la
contestation, qui continue de ré­
clamer des « épreuves nationales
et terminales ».
Le ministre de l’éducation ira­
t­il jusqu’au bout de la logique du
contrôle continu, en faisant dis­
paraître les trois vagues de par­
tiels introduites par sa réforme
(deux en 1re, une en terminale, va­
lant pour 30 % de la note finale),
et en ne conservant que les notes
des bulletins scolaires (qui valent
pour 10 % seulement)? « On peut
imaginer d’autres aménagements
pour l’an prochain », a­t­il affirmé
sur Franceinfo.
Le comité de suivi de la réforme
du lycée, copiloté par l’universi­
taire Pierre Mathiot et l’inspecteur
Jean­Charles Ringard, va conti­
nuer de travailler sur le sujet. Sa
nouvelle lettre de mission lui sug­
gère « d’avancer des propositions
afin de trouver le juste point d’équi­
libre entre les critères de simplicité
et ceux d’objectivité ». Un exercice
d’équilibriste. En attendant, une
frange de parents, pragmatique,
s’interroge plus simplement sur
l’impact de la crise sanitaire sur les
épreuves du baccalauréat à venir.
« Nous ne sommes pas sur l’hypo­
thèse d’un report même si l’on tra­
vaille sur tous les scénarios », fait
valoir le ministre de l’éducation.
mattea battaglia

La deuxième
session
de contrôle
continu du bac
est repoussée

Parcoursup : révolution pour les études de santé


Deux accès sont désormais possibles, un parcours spécifique et des licences avec option santé


LES  DATES


12 MARS
Les lycéens et les étudiants en
réorientation devaient boucler la
liste de leurs vœux sur Parcour-
sup au plus tard à 23 h 59, jeudi
12 mars. Ils peuvent faire dix
vœux de formation – dont cer-
tains vœux « multiples », permet-
tant de cocher plusieurs établis-
sements pour une même filière.

2 AVRIL
C’est la date limite pour confir-
mer chacun de ses vœux et com-
pléter son dossier avec les pièces
nécessaires aux candidatures.

19 MAI
Les formations apporteront leurs
réponses aux candidats entre
le 19 mai et le 17 juillet.

Du côté des
universités, on
réfléchit encore
à la mécanique
pour classer
les candidats

PARIS
Musée du quai Branly-Jacque sChirac

Une journée de débats


suivie d’unconcertgnaoua


avec notamment
RokiaTraoré
FatouBensouda
Inna Modja
Adama Paris
Kalista Sy
Azat aSoro
AntoinetteUwimana
Sanou Gning
ZakiaTahiri
Maria Daïf...
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FEMMESAFRICAINES


FEMMESPIONNIÈRES


31


MARS


2020

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