Méditerranée Mer Vivante 20e édition

(jfmeinesz) #1

192 Méditerranée - Mer vivante


Gardons la mer vivante


Le mouillage des bateaux sur les petits fonds est de plus en
plus destructif
Alexandre Meinesz, professeur émérite, Université Côte d’Azur (CNRS UMR 7035 « ECOSEAS »)
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Jeter l’ancre, « accrocher » son bateau dans une
baie ou crique non loin de la Terre fut pendant
longtemps un geste anodin.
Mais deux données factuelles font que ce geste
ancestral devient une réelle menace croissante
pour la vie sous-marine de certaines zones trop
fréquentées.
La première raison tient du fait que les zones
les plus recherchées par les plaisanciers - à l’abri
du vent et de la houle, près de la terre avec des
paysages agréables - sont peu nombreuses.
La seconde raison tient à l’augmentation sensible
du nombre de bateaux dans ces zones favorables.

Cet accroissement de la fréquentation de nos
côtes est lié à plusieurs facteurs :


  • les ports de plaisance sont souvent bondés l’été,
    ainsi les plaisanciers ne trouvant pas de place ou
    ne souhaitant pas payer (ou bien par confort),
    séjournent au mouillage dans les zones abritées,

  • des ports de plaisance ont été construits
    récemment en Italie sur un littoral rectiligne
    peu abrité (comme à l’ouest de la Ligurie).
    Aussi, de plus en plus de plaisanciers, provenant
    de ces nouveaux ports, affluent vers les côtes
    environnantes où des sites naturels et agréables
    de mouillage existent notamment devant la Côte
    d’A zur, le Var et la Corse.

  • Le nombre de grands navires de plaisance
    (>20m), fréquentant en particulier la Côte
    d’A zur, a fortement progressé. Certains yachts
    sont loués l’été à la semaine et les skippers, en
    attente d’une utilisation, préfèrent, par économie
    ou manque de places adaptées, mouiller sur les
    petits fonds.


Sous l’eau le résultat du labourage des ancres est
désolant à constater. Ce sont les baies les plus
calmes, les plus abritées où les conséquences sont
les plus visibles. Le principal écosystème atteint
est l’herbier de posidonies. Or, sur les fonds
calmes où cette plante n’est jamais confrontée à
un fort hydrodynamisme, les rhizomes et racines
sont peu fixés sur le sol marin. La moindre
traction arrache des plants de Posidonie voir des
© Andromède Océanologie monticules d’herbier (la « matte »). De véritables
Tranchée creusée par une ancre.

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