Unepièce afait sensation :“Silence”, de Wang Keping,
sculptureenboisprésentée quelques joursplus tard en “une”
du “New York Times”.Unvisagesans crâne, sansoreilles,
avec un seul œilouvert, un nezsans narines et unebouche
obturée.Unemétap hore de laChinedel’époque.“J ene
connaissaispasl’art oc cide ntal. Tout venait ducœur.Jefaisais
tout ce qui était interdit. Dessujetsérotiques,politiques,
abstraits.Je voulaischanger la société”,dit aujourd’hui l’artiste.
LesÉtoiLesne briLLerontpassur
shanghaï.Àlad emande des autorités locales, les
œuvres dece mouvementfondateur de l’art
cont emporainchinois devraientsagementrester
dans lesréserves du CentrePompidouàParis. Pas
question,pour le moment, de lesexposer dans
l’annexe que le muséeparisien ouvreces jours-ci
dans la deuxième villechinoise, et qu’Emmanuel
Macron doit inaugurer le5novembre.Aucune
rétrospective n’est envisagée non plusàBeaubourg
sur ce co llectif quicélèbrecetteannée ses 40 ans
–unsimple séminairedevait avoir lieu le
15 décembre, mais ilaété reportéàcourantjan-
vier.Seule unepetiteexposition intitulée «Les
Étoiles 1979-2019-Pionniersdel ’artcontemporain
en Chine»évoque l’ événementàlaMaison de ma
Chine jusqu’au 1erfévrier.ÀShanghaï, les lampions
de la fête serontalorséteints depuis longtemps et
les œuvres,politiquementmoins sensibles.
Il est vrai que dans la Chine de XiJinping,
les Étoiles onttout pour déplaire. Plus les années
pass ent, plus leur actedenaissanceparaît insensé
–entout cas impossibleàréitérer aujourd’hui.
Avec sescent aines de caméras de sécuritéet
ses innombrablespoliciersencivil, lecent re
de Pékin est l’un des endroits les plus surveillés
au monde, enparticulieravantlaf êtenationale
du 1eroctobre. Pourtant,le27septembre1979,
c’est là que 23 artistes décidentd’organiser une
exposition sauvage. ÀproximitédelaCitéinter-
dite, près de 150 œuvresrespirantlal iber té
sontaccrochées aux grilles duMusée national
des arts, quiavait refusé de leur prêter une salle.
La plupartpaierontcher cetteaudace. Certains
n’ont, depuis, jamaisremis les pieds dans lepays.
Mais quarante ans plustard,ils font l’objet
de rétrospectivesàl’étranger–notamment
cetautomneàlaMaison de la Chine,àParis –et
quelques-unes de leurstoiles sevendentplu-
sieurscentaines de milliersd’euros.Sansparler
du succèsd’un petit jeune de labande, àl’époque
plutôt enretrait :AiWeiwei.
En 1979,Maoest mortdepuis trois ans. Dirigéepar
Deng Xiaoping, la Chinetentedetourner lapage
de la sinistreRévolution culturelle (1966-1976).Les
modernisation », en l’absencedelaquelle
les autresn’ontaucun sens:ladémocratie.
Unebombequi luivaut son arrestation en
mars1979, et unecondamnationàquinze ans de
priso n–ilvit aujourd’hui aux États-Unis.
Un jeune homme de 26 ans suit alorsces événe-
ments de près:Huang Rui. De retour de Mongolie-
Intérieure, où ilavait ét éenvoyé en rééducation,ce
peintr eest le directeur artistique d’une nouvelle
revue littéraireindépendante :Aujourd’hui.Est-ce
en raison de la magnifiquecouverture qu’il ades-
siné e–deux silhouettesépurées se détachantsur
un fond bleu azur–aux antipodes de l’artmaoïste?
Le premier numéro,vendu en décembre1978
devant le Murdeladémocratie, estrapidement
épuisé. Encouragéparces uccès, Huang Ruipro-
pose àunami, Ma Desheng, defonder un groupe.
Pour en êtremembre, ilfaut êtr eartisteindépen-
dant, ou s’opposeràl’artofficiel. LesÉtoiles sont
jeunes instruits, envoyésàlacampagne travailler
la terreetsefairehumilierparles paysans, retrou-
vent alorsune liberté dontils on tété trop long-
temps privés. Déjà, en 1978, uneexposition de
peinture consacréeàlavie rurale enFranceau
xixesiècleaprovoqué l’enthousiasme des visiteurs,
tantàShanghaï qu’àPékin. Il s’agissait d’une pre-
mière:depuis l’arrivéedes communistes aupou-
voir en 1949, l’artoccidentaln’avait plus le droit de
cité. Danslec entr edePékin, un lieu est aucœur
de ce bouillonnement:leMur de la démocratie.
Ce mur de briques, quirecueillait jusqu’en
octobre1978 despetites annonces, devient
un forum àciel ouvert.C’est surcelui-ci qu’en
décembre, alorsque Deng Xiaoping promet«les
quatr emodernisations»(agriculture, industrie,
sciences ettechnologies, défense nationale),
un électricien du nom deWeiJingsheng affiche un
textedans lequel ilréclame la«cinquième
48
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sArt.LiX
iaobin, avec l’autorisation de la
Fondation
Star
sArt.Huang Rui. Chi Xiaonin, avec l’autorisation de la
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sArt