lecture, l’autre moitié était expliquée par des
gestes que les personnes testées imitaient (voir la
figure p. 43). Ces paroles apprises par les gestes
ne sont pas seulement restées dans la mémoire
beaucoup mieux pendant une courte période,
mais même 14 mois après leur première
mémorisation!
LES VERTUS DU MIME POUR
L’APPRENTISSAGE DES LANGUES
J’ai obtenu des résultats similaires en 2011
dans une étude menée avec Thomas Knösche à
l’institut Max-Planck des neurosciences cogni-
tives et neurologiques de Leipzig : cette fois, les
sujets ont appris des phrases abstraites avec un
total de 92 mots. Ici aussi, les mots enrichis d’un
geste ont été mieux retenus à court et à long
terme. Plusieurs groupes de recherche tra-
vaillent actuellement sur l’effet du geste dans
l’acquisition d’une seconde langue. Dans
diverses expériences, trois facteurs se sont révé-
lés essentiels pour obtenir des résultats d’ap-
prentissage optimaux. D’abord, les gestes
doivent être signifiants. Dans une étude que j’ai
réalisée avec Angela Friederici et Karsten
Müller, également à l’institut Max-Planck de
Leipzig, les personnes testées mémorisaient plus
facilement des mots lorsque les gestes qui les
accompagnaient évoquaient leur sens d’une
façon ou d’une autre. Faire des mouvements plus
amples, comme étirer les bras ou sauter sur
place, n’avait pas d’effet facilitateur.
Deuxièmement, le gain d’apprentissage est
plus net si les élèves ne se contentent pas de voir
les gestes, mais les exécutent par eux-mêmes. À
l’université de la Sarre, en Allemagne, Johannes
Engelkamp et ses collègues ont décrit pour la pre-
mière fois cet aspect en 1994, et l’ont appelé effet
d’autoexécution. Dans notre propre étude menée
avec Kirsten Bergmann, de l’université de
Bielefeld, nous avons fait apprendre aux étudiants
45 mots d’une langue artificielle : nous leur avons
présenté 15 mots sous une forme à la fois écrite et
audiophonique, et 15 autres pour lesquels un ava-
tar humain sur un écran exécutait en plus un geste
évocateur (voir la figure page 46). Enfin, avec
UN VOCABULAIRE « CLÉS EN MAIN »
D
ans cette expérience, des
participants placés dans
une IRM lisaient et entendaient
des mots qu’ils avaient
précédemment appris à l’aide
de gestes. En plus des zones
cérébrales directement
associées à la parole,
les structures de la mémoire
procédurale (qui code les
séquences de mouvements)
étaient également actives :
les zones du cortex moteur,
le cervelet et les noyaux gris
centraux. Par conséquent,
le vocabulaire est ancré dans
le cerveau au sein d’un réseau
neuronal beaucoup plus vaste
que celui de la parole. De ce
fait, non seulement il reste plus
longtemps dans la mémoire,
mais il est aussi plus facile
à retrouver!
© Yousun Koh
Cortex prémoteur
Cortex moteur
Noyaux gris centraux
Cervelet