Notre Temps N°597 – Septembre 2019

(Tuis.) #1
Avec ma copine,
nous économisions »
Nadine Desforges, 61 ans, Lamaids (03)
« Dans mon enfance, pour la fête des mères, papa
m’emmenait acheter une bouteille d’eau de Cologne
et c’est lui qui payait. Ce n’est qu’à 16 ans, quand
je suis rentrée interne au lycée à Montluçon, que j’ai
reçu mon premier argent de poche, sans jamais l’avoir
demandé... Je n’aurais pas osé! Chaque lundi matin,
papa me donnait 10 francs. Ça a duré deux ans, mais
seulement les semaines d’internat. Avec ma copine,
nous économisions et comptions tout le temps
pour réussir à nous acheter un peu de maquillage,
un bijou fantaisie ou un sous-vêtement. Je savais
qu’il n’y avait pas beaucoup d’argent à la maison
et aucun gaspillage, alors merci papa pour cet argent
qui m’était si précieux. » ■

Je le dépensais exclusivement
en bonbons »
Brigitt e Cavelande, 70 ans, Ferrières-sur-Ariège (09)
« Dans les années 1950, dans le Nord, où je vivais
avec mes parents et ma sœur, je me vois serrer
une pièce de un, deux, ou dix centimes de franc dans
ma menotte de 8 ans. Je traversais la rue, où passait
parfois un gros cheval traînant une charrette qui
livrait la petite épicerie d’en face où j’allais précisément
me ravitailler. Je sais que je dépensais cet argent
exclusivement en bonbons. La maman épicière
de ma grande amie Nadine soulevait un comptoir
muni d’une vitre, où s’alignaient les friandises.
Dans les années suivantes l’argent de poche n’était
pas en vogue... Et, même lorsque nous avons
commencé à travailler, ma sœur et moi, nous devions
restituer notre salaire à nos parents. Ce n’est que vers
20 ans que je me suis octroyé le plaisir d’économiser
pour m’acheter une très jolie robe que je convoitais. »

10 centimes par âge et par jour »
Estelle Fruleux, 62 ans, Bouxwiller (67)
« En 1967, quand mon frère a eu 12 ans – j’en avais 11 –,
il m’a parlé de son plan pour demander de l’argent
de poche à nos parents. Personnellement, je disposais
toujours d’un peu de sous, car je faisais souvent
les courses et ma mère ne me demandait jamais
la monnaie. Mais l’idée d’une rentrée régulière
m’intéressait. Sur la suggestion de mon frère, nous
avons demandé 10 centimes par âge et par jour, ce
qui faisait en moyenne 36 francs par mois pour lui et
33 pour moi. L’intérêt de cette formule étant que nous
étions augmentés à chaque anniversaire. Les parents
furent d’accord, moyennant certains petits travaux
domestiques. J’ai proposé cette formule à mes
enfants, mais sans contrepartie et en l’actualisant
au coût de la vie. Ma fi lle en fut satisfaite, mais
mon fi ls trouva qu’il était plus rentable de n’avoir
aucune somme fi xe à gérer et de demander, au fur
et à mesure de ses besoins et envies... Tout compte
PVDE/RUE DES ARCHIVES - RICHARD PHELPS/GAMMA-RAPHOfait, il avait raison. Autre temps, autres mœurs! »


Autrefois, les enfants att endaient avec patience
la fi n de semaine pour recevoir leur argent de poche...
Un rituel un peu moins en vogue aujourd’hui.

Recto d’un billet de banque de 10 francs,
avec le portrait de Voltaire près du Louvre, 1965.

Septembre 2019 • NOTRE TEMPS • 103
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