LeSoir - 2019-08-14

(ff) #1
entretien

Q


uand on a rencontré Tuur Florizoone,
l’accordéoniste belge, pour cette in-
terview, il allait partir à Arles. Heu-
reux. Le photographe Harry Gruyaert
y exposait et il avait demandé à Tuur de
l’illustrer musicalement, en direct. Mais cela,
c’est aujourd’hui du passé, et ça s’est remar-
quablement bien passé, merci. Le présent de
Tuur, c’est le Festival d’art de Huy, où il fête
les vingt ans du trio Tricycle, qu’il a créé avec
Philippe Laloy au sax soprano et à la flûte et
Vincent Noiret à la contrebasse. D’ailleurs,
ils viennent d’enregistrer leur quatrième al-
bum, qui sortira en novembre, avec un
concert le 11 à l’AB et une tournée de trente
dates en Belgique.
Tricycle ne renie ni le
folk ni le jazz mais offre
un crossover subtil,
nuancé, aux composi-
tions envoûtantes, aux
sonorités subjuguantes.
Ce Tricycle pédale juste
et beau, sans craindre les
échappées soudaines et
inventives, sans hésiter à
faire décoller ses deux
roues arrière du sol. Il
baguenaude dans des
paysages musicaux poé-
tiques et entraînants.

Vingt ans de Tricycle,
c’est quelque chose.
Vingt ans, oui. Ça fait
la moitié de ma vie, j’ai
40 ans. Après avoir vé-
cu un an au Brésil, j’ai
rejoint Bruxelles. Dans
ma classe au conservatoire, il y avait
Vincent Noiret. On a commencé à jouer
avec lui et avec Philippe Laloy. Il jouait
très peu du saxophone, je jouais à peine de
l’accordéon. Nous avons d’abord appris à
jouer.

L’accordéon n’est pas votre premier
instrument?
Non. J’ai d’abord joué du piano. C’est au
Brésil que j’ai vraiment découvert l’accor-
déon. Et puis on m’a demandé d’accompa-
gner un groupe de cirque en Allemagne.
C’est comme ça qu’est né Tricycle.

Du cirque?
C’est l’époque où je quittais ma jeunesse, je
jouais du théâtre, du piano, de la batterie
et j’étais à l’Ecole du cirque de Louvain, où
je faisais du monocycle et de la jonglerie.
Au Brésil, où j’ai été à 17 ans, j’ai travaillé
avec des enfants des rues dans une école de
cirque. Si la musique est une base de ma
vie, le théâtre et le cirque le sont aussi. Et si
ma musique est visuelle, ça vient de cette
époque-là. J’ai vite appris à mettre une
ambiance en musique. Mais attention, si
j’ai commencé dans le cirque, je l’ai quitté :

je voulais que le public vienne me voir
pour ma musique.

Tricycle raconte des histoires. Ce sont les
vôtres?
Les compositions sont en effet les miennes.
Ce sont des structures plus ou moins
claires qui passent ensuite dans le mixeur
Tricycle. On travaille beaucoup aux ar-
rangements dans le trio, pour que cela soit
plus original que ce qu’on peut attendre.
Vincent et Philippe sont improvisateurs,
bien sûr, mais moi je le suis sur une
grande échelle, j’ai tendance à jouer
chaque fois un peu différemment. Avec
eux, j’ai appris à jouer avec plus d’exacti-
tude. Un arrangement bien interprété, c’est
aussi très bien.

Le style de Tricycle, c’est
du belge?
On a créé nous-même le
style du trio. C’est le
nôtre. C’est notre identi-
té. Mais est-elle belge? Il
n’y a pas de style belge ni
de musique belge, on a
été envahi par tellement
de nations. Mais on est
belgissimes puisqu’il y a
un Bruxellois, un Fla-
mand et un Wallon.

Vous ne jouez pas
qu’avec Tricycle, vous
multipliez les projets :
MixTuur, aNoo, duo avec
Didier Laloy, trio avec
Michel Massot et Marine
Horbaczewski. Vous avez
besoin de cette mosaïque de musiques?
J’ai besoin de me multiplier, oui. Musica-
lement comme physiquement, je ne tiens
pas en place. J’ai besoin de bouger, de ten-
ter de nouvelles aventures, de composer de
la musique de film ou de scène. Je suis un
créateur, le moteur de beaucoup de projets.
Mais Tricycle, c’est ma base.
Propos recueillis par
JEAN-CLAUDE VANTROYEN

▶ Tricycle est le vendredi 23 à 21 h 30 dans l’Espace
Saint-Mengold.

« J’ai besoin d’aventures musicales,


mais Tricycle c’est ma base »


Tuur Florizoone et son accordéon.
© JOS L. KNAEPEN

Page 20Mercredi 14 août 2019Mad

L


es Sentiers de Sart-Risbart occupent
une place particulière dans le calendrier
jazz de Belgique. Jules Imberechts vit à
Sart-Risbart, lui qu’on appelait jadis Jules
du Travers, quand il dirigeait ce feu club de
jazz de Saint-Josse, et qui programme tou-
jours les concerts au kiosque du Parc de
Bruxelles les dimanches de juillet. Sart-Ris-
bart, c’est un hameau d’Incourt, dans l’est du
Brabant wallon. Un bled sympa. Avec des
gens sympas. Qui font la fête au jazz et à la
musique quelques jours par an. Sous la fé-
rule passionnée de Jules.
«Nous avons opté cette année pour deux
orchestres jazz de Flandre, cinq plutôt chan-
tants de la Fédération Wallonie-Bruxelles,
un belgo-péruvien attentif, un napolitain au
swing délirant, un marseillais désopilant
folk électrique ou un classique inspiré fran-
co-hongrois. In fine, cette édition retient une
véritable variété d’artistes du monde entier
qui nous apportent leur créativité exem-
plaire et tonique.» Ce sont les mots du Co-
mité du Festival. Enthousiasmant, non?
Epinglons donc les délirants du Flat Earth
Society, quinze musiciens menés par le clari-
nettiste Peter Vermeersch. C’est vivifiant, in-
attendu, exaltant. Le FES existe depuis 1999
mais il n’est guère assoupi. Et puis De Beren
Gieren, le trio qui a fait éclater les frontières
de l’art du trio, le menant vers le classique
contemporain et l’électronique, l’avant-
garde sans jamais oublier le jazz et donc
l’improvisation.
Greg Houben à la trompette et son père
Steve au sax dans le spectacle « Un Belge à
Rio », où Greg se raconte entre Liège et le
Brésil. Martin de Marneffe, le pianiste, qui
voyage avec son quartet dans des univers
funky, latinos, aériens. Arty Leiso et son hip-
hop ensoleillé. La Nouvelle Flibuste, une
fanfare avec ses cuivres bluesy et ses poly-
rythmies afro-caribéennes. Il y a encore le
swing électro de Bomba Titinka. Le mélange
latino-jazz, poésie-musique, franco-hispano-
portugais de Chicos y Mendez. La fanfare de
La Nouvelle Flibuste et le classique du Trio
Becel qui jouera dans l’église.
J.-C. V.

▶ Les Sentiers de Sart-Risbart, du jeudi 22 au dimanche
25 août. Entrée : 15 € par jour, 45 € les quatre jours.
Infos : lessentiersdesartrisbart.be

Les sentiers musicaux


de Sart-Risbart


De Beren Gieren, le trio composé, de gauche à
droite, de Simon Segers (le batteur), de Lieven
Van Pé (le contrebassiste) et de Fulco Otter-
vanger (le pianiste). © GREGOIRE VERBEKE.

Le Festival d’art de Huy
Quand ?Du mercredi 21
au dimanche 25 août.
Où ?Place Verte, Espace Saint-Mengold,
Fort de Huy, collégiale Notre-Dame,
Le Bateau mosan.
Qui ?Stingo, les 20 ans du Monde est un
village (le 21), Sirus Quartet, Keyvan Chemi-
rami avec Hâl (le 22), Oh! Boy, Alfabeto
Runico (le 23), Greg Houben (le 24),
Quentin Dujardin, Anavantou (le 25).
Combien ?Pass 3 concerts 40 €, 5 concerts
60 € sur réservation.
Infos :festivalarthuy.be

JAZZ


musiques

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