Investir, le Journal des Finances / N° 2379 / 10 août
06 / ÉCONOMIE
CONJONCTURE
L’Allemagne, proche de la récession, inquiète
L’
industrie allemande
est fortement pénali-
sée par la guerre
commerciale menée
par Washington. En juin, la pro-
duction industrielle a reculé de
1,5 %, soit un repli de 5 % en un
an! Une tendance qui n’augure
rien de bon pour l’ensemble de
son économie. Certains experts
craignent une prochaine réces-
sion. A l’inverse, la France fait
preuve de résilience. Certes, les
chiffres de la croissance du
deuxième trimestre ont été
modérés : + 0,2 %, après + 0,3 %
au premier trimestre. Malgré
les mesures de soutien budgé-
taires prises par le gouverne-
ment après la crise des gilets
jaunes, la consommation des
ménages a ralenti (+ 0,2 %,
après + 0,4 %).
ACCÉLÉRATION DE
L’INVESTISSEMENT
Mais, tandis que le commerce
extérieur est neutre sur la crois-
sance du PIB, l’investissement a
nettement accéléré, de 0,9 %,
après 0,4 % les trois mois précé-
dents. « En particulier, l’investisse-
ment des entreprises accélère
(+ 1,2 %, après + 0,7 %) : les dépen-
reste de l’année) était de 1 % à
fin juin. A quelques encablures
de la croissance de 1,4 % atten-
d u e p a r l e g o u v e r n e m e n t
sur l’année et de 1,3 % anticipée
par le FMI. L’institution de
Washington, dans ses dernières
prévisions, estime à seulement
0,7 % la croissance de l’économie
allemande!
CROISSANCE DES SERVICES
L’Hexagone se trouve donc en
tête du trio des premières éco-
nomies de la zone euro. « Il est
frappant que l’écart, à l’avantage
de la France, entre les indices PMI
français et allemand dans le sec-
teur manufacturier soit le plus
grand jamais enregistré depuis
1999, date de création de l’euro »,
i n d i q u e B r u n o C av a l i e r,
chez Oddo.
Plus notable encore, le senti-
ment des entreprises est, selon
l’Insee, bien supérieur à sa
moyenne dans tous les autres
s e c t e u r s , t a n d i s q u e l a
confiance des ménages s’est
améliorée pour le septième
mois consécutif. De quoi rester
serein pour les prochains mois.
Les chiffres déjà publiés pour le
mois de juillet laissent présager
un prolongement de cette ten-
dance. « L’économie française
a de nouveau été portée par les
bonnes performances du secteur
des services en juillet, la crois-
sance soutenue de l’activité des
prestataires de services ayant lar-
gement compensé le recul de
la production obser vé dans
l’industrie manufacturière »,
indique Eliot Kerr, économiste
à IHS Markit. - C. M.
Comparaison des indices PMI manufacturiers français
et allemand
France Allemagne
65
60
55
50
45
40
Août 2016 Août 2017 Août 2018 Août 2019
49,
43,
Tauxd’intérêtà 10 ans
FRANCE – 0 ,27 %
ALLEMAGNE – 0 ,57 %
ROYAUME-UNI 0 ,49 %
ÉTATS-UNIS 1 ,71 %
JAPON – 0 ,22 %
Matièrespremières
PÉTROLE(BRENT)
58 , 60 $ – 4 ,3 %
ONCED’OR
- 496 , 42 $3,9%
Devises
€/$ 1 , 1195 0 ,8 %
€/CH 1 , 0901 – 0 ,1 %
€/£0, 9271 1 ,5 %
$/¥ 105 , 82 – 0 ,7 %
$/YUAN 7 , 0577 1 ,7 %
€ / $
1 , 0
1 , 1
1 , 2
1 , 3
2014 15 16 17 18 2019
1,
Le chiffre de la semaine
- 1,5 %
Récession L’industrie allemande est en contraction. La production a reculé de
1,5 % en juin (– 5,2 % en un an), soit – 6,3 % depuis le plushaut de fin 2017.
Les Européens de plus en plus europhiles
Confiance Le projet européen trouve un nouveau souffle. Les citoyens de l’Union européenne sont plus
confiants dans les institutions, mais aussi dans la monnaie unique. L’immigration et le changement climatique
demeurent les principales préoccupations. La coalition gouvernementale italienne éclate en morceaux.
L
es Européens convaincus
ne peuvent que s’en féli-
citer : l’Europe a de plus
en plus la cote. Ce constat
peut paraître surprenant, mais il
correspond au sentiment mesuré
par une enquête de grande enver-
gure (plus de 20.000 personnes
réparties dans les 28 pays de
l’Union européenne [UE] et les
cinq pays candidats). Cet Euroba-
romètre est publié deux fois par
an. Sa dernière version (réalisée
en juin et en juillet) montre ainsi
que la confiance et l’optimisme
dans l’Union ont atteint leur
niveau le plus élevé depuis 2014.
Il est surtout un plébiscite en
faveur de l’euro. Quelque 76 % des
sondés habitant dans la zone euro
expriment leur soutien à la mon-
naie unique, contre 62 % au plus
bas, il est vrai, en pleine crise sou-
veraine (2010-2012). Ce soutien
est stable (62 %) pour les citoyens
de l’UE.
Merci au Royaume-Uni, qui a
démontré, ces derniers mois,
la complexité, voire l’impossibi-
lité, de quitter la seule UE.
Alors, quant à abandonner la
zone euro...
Déjà, la Grèce avait reculé malgré
la mise en place d’un gouverne-
ment qui avait fait campagne
pour une telle issue. Il avait
retourné sa veste une fois aux
manettes. Celui-ci vient d’ailleurs
d’être mis à la retraite par le peu-
ple grec. Le nouveau Premier
ministre, Kyriakos Mitsotakis,
veut effacer cette parenthèse.
L’optimisme est aussi marqué sur
le futur de l’UE (61 %). Même
l’aspect démocratique de
l’Europe est apprécié! En effet,
55 % des Européens déclarent
être satisfaits du fonctionnement
de la démocratie dans l’Union.
C’est le meilleur résultat depuis
l’automne 2004. Ainsi, une large
majorité d’Européens estiment
que « leurs voix » comptent dans
l’UE (56 %, soit 11 points de plus
depuis le printemps 2018).
P r è s d e s t r o i s q u a r t s d e s
interrogés se sentent d’ailleurs
citoyens européens, avec un
record au Luxembourg (93 %), et
même une majorité en Italie
(52 %), un pays où la situation
politique est très compliquée.
SALVINI
À LA MANŒUVRE
Le patron de la Ligue et
ministre de l’Intérieur, Mat-
teo Salvini, a exigé, jeudi,
des élections anticipées.
La coalition gouvernemen-
tale vit donc ses derniers
jours. Le chef du gouverne-
ment, Giuseppe Conte, a
réagi avec colère. La Ligue,
nationaliste, veut batailler
avec Bruxelles (lire page 13).
Globalement, les préoccupa-
tions évoluent en Europe.
L’immigration reste en tête des
sujets d’inquiétude des Euro-
péens, mais avec toutefois un
peu plus de sérénité. Certes, 34 %
des sondés citent en premier lieu
ce sujet, mais c’est 6 points de
pourcentage de moins qu’à
l’automne 2018. Le changement
climatique bondit de la 5
e
place à
la 2
e
.
Enfin, la situation économique et
l’état des finances publiques
occupent la même position
(18 %), malgré les récentes inter-
rogations, faisant craindre une
récession outre-Rhin en 2020.
Les Européens ont donc retrouvé
le moral, en dépit des rebondisse-
ments du Brexit. Le Vieux Conti-
nent est même préparé à un hard
Brexit, estime la Commission
européenne. Ce scénario est le
plus vraisemblable après la venue
à Bruxelles de David Frost, le
principal conseiller du nouveau
Premier ministre britannique,
Boris Johnson. Aucune solution
n’a émergé de cette rencontre de
hauts fonctionnaires, notam-
ment sur la question de la fron-
tière irlandaise. Il faudra attendre
le G7 de Biarritz, du 24 au 26 août,
pour espérer des avancées si
Boris Johnson accepte de ren-
contrer le président français,
Emmanuel Macron, et la chance-
lière allemande, Angela Merkel...
- PHILIPPE WENGER
Sources
:Commission
européenne,
La Banque
Postale
Asset
Management.
Photo
:IH
eart
EU
E
S
2004 2006 2008 2010 2012 2014 2016 2018
62
64
splushésitants
2003 2005 2007 2009 2011 2013 2015 2017 2019
30
35
Lituanie Danemark Estonie Italie France Grèce Royaume-Uni
37
33
32
29
(1) Descitoyensde la zoneeuro. (2) DesEuropéens.
L’Europerassure... lespetitspays
En%d’opinion favorable(1)
Soutienenfaveurdel’euro
66
68
70
72
74
76
Moyennedansl’UE,en %(2)
Confiancedansl’Unioneuropéenne...
En %
...dontlespluspositifs
Les
40
45
50
55
60
76
44
72
68
60
3
...
« La libre circulation
est également
plébiscitée,
cet atout que
les Britanniques
sont prêts
justement à
abandonner »
ZOOM SUR...
La confiance plafonne
aux EtatsUnis
Les Européens sont confiants et les Américains également. Il semble
toutefois que leur moral plafonne depuis quelques mois, en tout cas
tel qu’il est mesuré par des indices comme ceux du Conference Board
ou de l’université du Michigan. Ce n’est pas suffisant pour craindre
une récession économique aux EtatsUnis, comme les marchés
obligataires ne cessent de l’anticiper (la courbe des taux est toujours
inversée). Mais c’est la guerre commerciale qui risque de déclencher
cette contraction de l’activité tant attendue, plutôt qu’une perte de
confiance des ménages. Le renchérissement des importations amé
ricaines n’a, en outre, aucun effet sur le commerce extérieur améri
cain. Les exportations chinoises ont encore augmenté en juillet de
3,3 % (en un an), alors que les importations chinoises, elles, se sont
contractées de plus de 5 %. En revanche, le pouvoir d’achat des
Américains est affecté et la confiance des chefs d’entreprise pourrait
défaillir. « La récession américaine pour 2020 prend forme », avertit
Philippe Waechter, chef économiste d’Ostrum. A. M.
Variations sur la semaine
ses dans l’information-communi-
c a t i o n e t l e s s e r v i c e s a u x
entreprises rebondissent »,
détaille l’Insee. L’institut calcule
ainsi que l’acquis de croissance
2019 (si le PIB restait étal sur le