PORTO RICO PORTO RICO LES ÎLESLES ÎLES
les multinationales — non seulement les routes portori-
caines sont peuplées de véhicules américains, de fast-foods
américains, de supermarchés américains, mais Total,
L’Oréal, Monsanto ou Ferrero y ont implanté des liales.
Résultat de ces exploitations politiques et économiques
successives, la société portoricaine reste culturellement
hybride. Le mode de vie à l’américaine n’a pas supplanté
l’identité hispano-caribéenne. Ici, tout le monde parle es-
pagnol, chez soi, dans la rue, au restaurant. Peu maîtrisent
totalement l’anglais, pourtant langue o cielle... En faisant
le tour de l’île principale, on se sent parfois à La Havane,
parfois sur une version du Strip de Las Vegas, sans touristes.
Se juxtaposent parkings privés et places de village, auto-
routes à quatre voies et ruelles pavées. Les néons tapageurs
des casinos côtoient les cabanes de plage improvisées, les
chaînes de sushi voisinent avec les carrioles de plantain frit.
Anomalie désenchantée, Porto Rico est un écrin de verdure
intensément fertilisé d’engrais américain — un organisme
génétiquement modi é par le capitalisme.
« Le système libéral et colonial doublé du manque d’éduca-
tion nous ont rendus totalement dépendants des Etats-Unis,
vitupère Dalma Cartagena, son pantalon de jogging rose se
fau lant entre les plants de coriandre et de piment jalapeño.
Celui qui vous nourrit vous contrôle : nous devons apprendre
à nous nourrir seuls. C’est un droit humain fondamental. »
Elle évoque la disparition de la culture de la terre, celle que
lui a enseignée son grand-père indépendantiste dans sa n -
ca d’Orocovis, la ferme où il cultivait café, taro, patate
douce, courge et tabac. « Toute mon enfance j’ai vu, senti, tou-
ché, goûté la nourriture de nos terres. Travailler à nouveau ☞