Sports
SUD OUESTVendredi 2 août 2019
Thierry Vautrat
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«J
e préfère Rafael Nadal. »
Rencontrer Loris Benito,
joueur suisse d’origine es-
pagnole, à quelques heures d’un
40 e « Fedal » en demi-finale de
Wimbledon, imposait la ques-
tion. « Mais quand même, je suis
très respectueux de ce que réussit
Federer! »
La préférence en faveur du Ma-
jorquin, au fond, allait de soi, pour
ce garçon né de parents d’origine
ibérique, qui s’amuse de ses pro-
pres paradoxes. « Je me sens espa-
gnol quand je suis en Suisse mais
suisse quand je suis en Espagne! »
Il pouvait pourtant difficile-
ment naître plus au cœur de l’Hel-
vétie qu’à Aarau, capitale de l’Ar-
govie, ce canton coincé entre ceux
de Bâle, Zurich et Lucerne. C’est là
que les parents de son père et
ceux de sa mère, venus d’Espagne,
s’étaient installés. Là également
qu’ils s’étaient rencontrés.
Relégué avec Aarau
Lui commença à jouer au football
au FC Aarau, petit club, qui aime
batailler avec les grands. « J’ai dé-
buté en pro l’année où le club est
descendu (en 2009 - 2010) pour la
première fois en vingt ans. Ce fut
un moment difficile à vivre »,
avoue-t-il.
Notre homme évolua deux ans
en Challenge League (D2), puis fi-
la au FC Zurich. « Pour moi, c’était
un pas en avant énorme », dit-il.
« Tu sais que tu es dans un club
qui se bat dans le haut du tableau
tous les ans. Ludovic Magnien, qui
jouait à mon poste, s’est retiré. J’ai
pu être aligné tout de suite. Là-
bas, tu vis des matches dans une
ambiance incroyable, notam-
ment celui contre Bâle. C’est
comme un Classico, avec interdic-
tion de perdre. Avec Aarau, je
n’avais jamais connu ça. Ces mo-
ments m’ont marqué à vie. »
Loris Benito a passé trois super-
bes années à Zurich avant d’être
contacté par Benfica à l’aube de la
saison 2015- 2016. « C’est une offre
qui ne se refuse pas. » Malheureu-
sement, il se blessa au talon dès
son arrivée au Portugal et resta
trois mois sur le flanc... Il était dif-
ficile dès lors de se faire une place
dans un effectif qui tournait.
Titré avec Young Boys
Sollicité par Young Boys au merca-
to d’hiver, l’Argovien saisit l’occa-
sion. « J’ai beaucoup discuté avec
Vladimir Petkovic, le sélection-
neur de l’équipe nationale
suisse », explique-t-il. « Je voulais
jouer l’Euro 2016. Revenir au pays
était un choix qui devait me per-
mettre de retrouver la sélection.
Je voulais me rapprocher de ma
famille, jouer régulièrement et lut-
ter pour le titre. Young Boys avait
de grosses ambitions à ce ni-
veau. » Il ne joua pas l’Euro, pour-
tant. À peine arrivé à Berne, il se
déchira les ligaments du genou. Il
lui fallut du temps pour revenir.
Mais ensuite, il connut deux sai-
sons intenses, conclues sur les ti-
tres de 2017 et 2018.
« Ce furent vraiment deux bel-
les années. Le premier titre a eu
un impact énorme, parce que ce-
la faisait 32 ans que Young Boys
n’avait plus été couronné. La
deuxième fois, on a vécu une sai-
son triomphale. On a gagné avec
20 points d’avance sur Bâle, avec
91 points, ce qui ne s’était jamais
vu. On a battu 6/7 records. C’était
une saison pour les livres d’or! »
Ceux qui l’ont vu jouer disent
qu’il prit une part importante
dans la conquête de ces deux ti-
tres, par son dynamisme, son
punch sur le flanc gauche.
Le voici à Bordeaux, recruté
pour le poste d’arrière gauche.
Avec toujours la même ambition,
retrouver la « Nati ». Ce ne sera pas
facile car Ricardo Rodriguez et
François Moubandjé sont des ha-
bitués de la sélection.
Mais Benito, dont la préparation
a été perturbée par une blessure
aux ischios, entend bien trouver
une place de titulaire. « Cela ne me
fait pas peur, je ne change pas de
club pour avoir peur. Avec Max, on
va se jouer la place! »
GIRONDINS DE BORDEAUX Le défenseur suisse va vivre à Bordeaux sa deuxième expérience
à l’étranger. L’ex-joueur des Young Boys vient pour s’imposer et se faire une place en équipe nationale
Benito sans complexe
FOOTBALL LIGUE 1 (J-7)
Loris Benito: « Je viens pour faire le match avec Max. » PHOTO FABIEN COTTEREAU
C’est Eduardo Macia lui-même qui a
présenté hier au Haillan les deux re-
crues de l’été, le défenseur Loris Be-
nito et l’attaquant Hwang Iu Jo. On a
ainsi appris qu’il suivait le Sud Co-
réen depuis longtemps et qu’il avait
cherché à le faire venir, en janvier
2018, à l’OH Louvain, club de D2
belge racheté par Leicester. « Mais fi-
nancièrement, ce n’était pas possi-
ble », explique-t-il.
Il continua malgré tout à suivre
l’attaquant du Gamba Osaka. « Nous
avons effectué plusieurs voyages en
septembre-octobre et avons cons-
taté une nette amélioration », expli-
que Macia. « En juin, l’opportunité
de le faire venir s’est présentée, nous
l’avons saisie, en dépit de la concur-
rence de clubs allemands et belges.
C’est un joueur polyvalent, qui de-
vrait parfaitement s’intégrer dans
le style de jeu que Paulo Sousa veut
installer. »
Des transitions plus rapides
Pour Hwang Iu Jo, la proposition des
Girondins est tombée au bon mo-
ment. « J’avais besoin de vivre une
nouvelle expérience », explique-t-il.
« J’ai longuement réfléchi mais Bor-
deaux était un club réputé, j’ai ac-
cepté. »
Le Sud Coréen est conscient de la
difficulté de sa mission. « Il faudra
d’abord que je m’adapte au jeu de
mes coéquipiers, à ce que le coach
demande », dit-il. « Le jeu au Japon est
très technique mais ici, tout va plus
vite. Les transitions entre la défense
et l’attaque sont beaucoup plus ra-
pides. »
Sa polyvalence sera un atout,
comme celle de Loris Benito, capa-
ble de jouer à d’autres postes défen-
sifs. « J’aime bien jouer en défense
centrale », a-t-il confié. « J’ai été for-
mé n°6, avant de devenir arrière
gauche. Être face au jeu dans l’axe
est quelque chose que j’apprécie. »
Pavon à Bordeaux?
Le Suisse fut souvent utilisé à ce
poste la saison dernière par Gerar-
do Seoane, notamment lors du
match de Ligue des Champions
contre la Juventus, gagné 2-1.
« C’est l’un de mes meilleurs souve-
nirs », révèle-t-il. « Même si la Juve
était déjà qualifiée, elle avait aligné
son onze titulaire. Ce fut une saison
incroyable. C’est comme jouer à Old
Trafford, c’est inoubliable. »
Le positionnement de Loris Benito
dépendra sans doute de l’éven-
tuelle arrivée de Laurent Koscielny,
qu’Eduardo Macia apprécie beau-
coup. « C’est l’un des meilleurs dé-
fenseurs et l’un des plus intelligents
que j’ai vus », dit-il. Pour l’instant, les
choses sont au point mort avec Ar-
senal.
En attaque, Bordeaux, selon une
info de L’Équipe, essaie d’obtenir le
prêt de Christian Pavon, l’ailier in-
ternational de Boca Juniors. L’Argen-
tin, attaquant vif, rapide et altruiste,
a signé 4 buts et 3 passes décisives
la saison dernière. C’est un joueur
très apprécié, convoité un temps
par PSG et Arsenal. Ce serait un su-
perbe coup pour les Girondins. Mais
ils ne sont pas seuls sur ce dossier...
Hwang Iu Jo. FABIEN COTTEREAU T. V.
Hwang Iu Jo, une adaptation à peaufiner
À Bordeaux, dans un environne-
ment multiculturel, Loris Benito
est très à son aise. Il parle sept
langues! Il maîtrise l’anglais car
sa compagne est originaire du
Royaume-Uni. Il a appris l’espagnol
à la maison, le Schweizerdeutsch
(dialecte des Suisses alémaniques)
dans la vie de tous les jours, l’alle-
mand et le français à l’école, l’ita-
lien, parce que sa famille comptait
beaucoup d’Italiens et le portugais
à Lisbonne. Excusez du peu!
Benito, joueur
polyglotte!
L’INFO
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