Marie Claire N°805 – Septembre 2019

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Musique 98


Micaiah carter.

L’éclosion soul-pop de MorMor Las de composer


des mélodies pour des documentaires dans son sous-sol de Toronto,


le Canadien à fleur de peau Seth Nyquist rompt son isolement avec


le projet MorMor. Et le chante à merveille. Par charline Lecarpentier


“Quand j’étais
enfant, on
m’a toujours dit
que j’avais
une jolie voix.”

Avec son riff d’ouverture entêtant et sa voix tendre se
plaisant dans les hauteurs, Heaven’s only wishful raconte
l’aube d’un chaos. C’est un de ces morceaux qui rentre
dans les foyers par le biais de YouTube, au hasard
d’une playlist, et fait partie des murs à mesure
d’écoutes répétitives. Aujourd’hui, le titre compte plus
de 4 millions de vues, sans l’intervention d’une major
ni le moindre plan de communication. Seth Nyquist a
27 ans et nous parle au téléphone depuis Londres, où il
prépare son premier album, très attendu après deux EP
troublants, indie-pop nourrie de soul et de funk filant
le même thème de l’attente, sublimée par des clips en
clair-obscur. Ses textes disent sa vulnérabilité sur le fil,
sa voix tremblant parfois comme lorsqu’il nous parle
au téléphone de son extrême timidité. On l’a vu sur
scène grignoter un début de concert puis s’évanouir le
titre d’après, rendant chaque prestation de sa première
tournée un peu plus intense.


Une timidité maladive
« Avant, j’avais l’impression d’être dans une sorte de pur-
gatoire. J’avais une vie stagnante, isolé en hiver dans mon
appartement en sous-sol à Toronto et je voulais que ma
musique soit partagée. » Il enchaînait alors petits travaux
et musique pour des documentaires mais sa voix, aiguë
et élastique, n’a jamais vraiment été un secret. « Quand
j’étais enfant, on m’a toujours dit que j’avais une jolie voix,
on voulait me donner le premier rôle dans les spectacles à
l’école. Mais pour le timide maladif que j’étais, c’était très
difficile, on me forçait à chanter des choses que je ne vou-
lais pas chanter, comme des comédies musicales »,
raconte-t-il, désormais heureux d’interpréter ses
propres textes cathartiques avec son projet MorMor.
La ballade Some place else et la plus enlevée Outside,
aux mélodies évaporées et aux synthés brumeux, sont
des tentatives de trouver sa place. Le nom MorMor
est un hommage à sa grand-mère –  c’est le surnom
qu’on leur donne en Suède, lui-même ayant grandi


dans une famille d’accueil avant d’être adopté par une
famille suédoise. « Je me souviens de la première mélo-
die que j’ai inventée, à 3 ou 4 ans. Mais je ne me suis
jamais considéré comme un musicien, même si c’est un
peu plus terre à terre que le terme d’artiste », explique-
t-il avec l’ancrage de ces êtres pourtant capables de
nous faire décoller d’un corridor d’ennui.
EP Some place else (Kobalt/Awal).
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