En dangEr près dE chEz vous 5 / 5
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Dorian
rollin pour Télérama.
merci au
na
Tur
opar
c De HunawHir en
alsace
Par Vincent Remy
Le grand hamster
d’Alsace fauché
par l’autoroute
cet été, Télérama part
à la rencontre des espèces
en danger un peu partout
en France. urbanisation,
pollution, agriculture intensive...
les menaces sont multiples.
no culture du maïs sur des parcelles
toujours plus grandes, rases, sans
haies ni bosquets. Dans cette plaine
autrefois giboyeuse, l’effondrement
de la biodiversité est foudroyant.
Le hamster est en première ligne.
Au mois d’avril, quand il sort de terre
après six mois d’hibernation, il a deux
préoccupations : s’alimenter et se
repro duire. Le mâle doit trouver une
femelle. Le champ de maïs, alors à nu,
ne procure aucune alimentation, et
l’expose aux prédateurs. Dans les pé
riodes de canicule, le hamster, qui ne
boit pas une goutte d’eau, allait autre
fois chercher de la luzerne ou des bet
teraves pour l’apport hydrique. Perdu
dans sa grande parcelle de maïs, ne
parcourant pas plus de 300 mètres au
tour de son terrier, il est fichu. D’au
tant que, selon des chercheurs du
CNRS, la surconsommation de maïs
entraîne un déficit en vitamine B et in
duit au can nibalisme, les femelles
mangeant les jeunes à la naissance...
Dans les années 1980, les asso cia
tions environnementales tirent la son
nette d’alarme. Et en 1993, en voie
d’extinction, le hamster fait le grand
saut : de nuisible, il passe à la caté go rie
des espèces protégées. En 2000, l’Of
fice national de la chasse et de la faune
sauvage est chargé d’établir un Plan
national d’action, reconduit depuis
tous les cinq ans. « Notre première
tâche, c’est le suivi des populations », dit
Julien Eindenscheck, responsable de
ce plan hamster. Pas facile, l’animal
séjourne 90 % de sa courte vie — deux
ans — sous terre. Il est photogénique,
mais même lorsqu’il abondait on ne le
croisait guère! Il faut donc compter les
terriers. Chaque jour du mois d’a vril
depuis 2001, des équipes de mar
cheurs arpentent 1 800 hectares de
champs céréaliers : « Chaque terrier est
géo-référencé, poursuit Julien Eiden
schenck. A la fin du mois, on est en me-
sure de présenter des cartes de présence
aux deux cents agriculteurs contractuel-
lement engagés dans la protection de
Ce sont des images de désolation. Au
nordouest de Strasbourg, dans le Ko
chersberg, berceau de la flamme
kueche (tarte flambée) et plaine de
grande fertilité, la terre est éventrée,
mise à nu sur de gigantesques éten
dues par les bulldozers du groupe Vin
ci. Rien n’y a fait, ni les manifestations,
grèves de la faim et multiples recours
portés par les maires des villages, ni
les avis défavorables des instances en
vironnementales d’Etat. La saignée
du GCO (Grand Contournement
ouest) est censée soulager la quatre
voies gratuite qui traverse l’ouest
strasbourgeois, encombrée par les
milliers de camions européens qui
font un détour par la capitale alsa
cienne pour... échapper à la taxe auto
routière allemande. Parmi les vic
times de ce projet d’un autre temps,
pensé il y a un demisiècle, les habi
tants des nombreux villages sur le par
cours du GCO, mais aussi un petit ha
bitant discret, et fortement médiatisé,
le grand hamster d’Alsace...
Alsacien, vraiment, le grand hams
ter? Euh, plutôt immigré oriental.
Venu des plaines steppiques d’Eu
rope centrale, il arrive dans la région
au Moyen Age, sur des terres défri
chées, ou caché dans des sacs de
grain, rappelle Stéphane Giraud, pré
sident d’Alsace Nature. La bestiole
progresse vers l’ouest mais ne pros
père que dans la plaine alsacienne,
grâce au sol lœssique, un nirvana.
Suffisamment meuble pour être creu
sé, résistant pour que le terrier ne s’ef
fondre pas, et sans risque de remon
tée de nappe phréatique — l’eau est
son pire ennemi. Dans les années
1950, on compte jus qu’à une centaine
de terriers à l’hectare. Le rongeur
mange blé, luzerne, chou. Bref, ra
vage les cultures. Jetz awer langst!
(maintenant, ça suffit). Les paysans
noient les terriers. Les maires oc
troient des primes à la patte ou à la
queue. Des gamins se paient leur pre
mier vélo avec ces trophées. Arrive
« la révolution verte », c’estàdire chi
mi que. La bestiole est classée nuisible,
l’éli mination devient scientifique. On
distribue aux agriculteurs de petites
plaquettes d’un produit qui provo que
des hémorragies. Mais ce qui vien dra
à bout de l’animal, c’est la modernité
des Trente Glorieuses : développe
ment de l’habitat et des réseaux rou
tiers, remembrement... La fertilité
des ter res lœssiques conduit à la mo
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