Les Echos - 09.03.2020

(Steven Felgate) #1
La loi prévoit la création
d’un holding des sociétés
de l’audiovisuel public
dénommé « France Médias ».
Photo Emile Luider/RÉA

confie aux « Echos » John Paton,
président du conseil du titre.

Marketing ciblé
Lors de sa première année sans édi-
tion papier, « The Independent »
avait p erdu 15 millions, pour
des revenus de 14 millions. Le
revenu doit croître encore de 10 %
pendant l’exercice en cours (une
hausse de 17 % a déjà été engrangée
sur le premier semestre) et la prévi-
sion est qu’il atteindra 100 millions
dans quatre ans, dit John Paton.
« The Independent » a 95 mil-
lions de visiteurs uniques mensuels
dans le monde dont 30 millions aux
Etats-Unis (où il a 22 journalistes) et

25 millions en Grande-Bretagne, ce
qui le classe en tête des quotidiens,
assure John Paton. L a croissance de
ses revenus vient de son expansion
géographique et, explique John
Paton, du savoir-faire de son équipe
numérique, considérablement ren-
forcée, pour « traiter des informa-
tions très sérieuses pour qu’elles
deviennent virales comme BuzzFeed
sait le faire : cela nous permet de cap-
turer une bonne part de la croissance
de la publicité numérique que Google
et Facebook ne s’approprient pas ».
La publicité représente l’essentiel
du chiffre d’affaires et le titre, qui
veut rester surtout gratuit, veut
accroître son audience pour en

La publicité représente l’essentiel du chiffre d’affaires du titre,
qui veut rester gratuit. Photo « Les Echos »

sommes arrivés à la conclusion que
maintenir la publication n’était pas
faisable pour HBG. »
L’annonce intervient au lende-
main d’une manifestation de dizai-
nes d’employés d’Hachette qui sont
sortis vendredi de leurs bureaux à
New York pour dénoncer la publica-
tion du livre. Cette manifestation
était intervenue après les protesta-
tions émises par le journaliste du
« New Yorker » Ronan Farrow, frère
de Dylan, lauréat du prix Pulitzer
2018 pour son enquête sur les agres-
sions sexuelles commises par l e pro-
ducteur de cinéma Harvey Weins-
tein. Lui qui a toujours défendu sa
sœur avait indiqué mardi avoir
appris par la presse que le groupe
Hachette (également éditeur, par
l’intermédiaire d’une autre de ses
filiales, de son propre livre « Catch
and Kill » sur les dessous de l’affaire
Weinstein) allait publier le livre de
son père. Immédiatement, il a
annoncé qu’il ne travaillerait plus
avec le groupe français.
A la différence de Roman
Polanski, q ui avait reconnu sa culpa-
bilité dans l’affaire Samantha
Geimer en 1977, le cinéaste
d’« Annie Hall » et de « Manhattan »
a toujours clamé son innocence,
rappelant qu’après deux enquêtes
de plusieurs mois dans les années
1990 l e procureur du Connecticut en
charge du dossier avait décidé de ne
pas l’inculper. Soutenue par son
frère et par sa mère (Mia Farrow),
Dylan Farrow a réitéré ses alléga-
tions au début de 2018, d ans la foulée
du mouvement #MeToo. Cette
affaire p èse de plus en plus lourd sur
la carrière du réalisateur. C’est la
deuxième fois depuis octobre 2017
que Woody Allen voit un contrat
annulé. Le studio Amazon avait
auparavant cessé sa collaboration
avec le cinéaste, bloquant la sortie
aux Etats-Unis de son dernier film,
« A Rainy Day in New York » (« Un

d’« Apropos of Nothing. » Quatre
maisons d’édition américaines
avaient déjà refusé de publier les
Mémoires du réalisateur. Les édi-
teurs contactés avaient justifié leur
refus par la « négativité », voire « la
toxicité » d’un projet de collabora-
tion avec Woody Allen.
A l’arrivée, la décision d’Hachette
intervient dans un contexte particu-
lièrement lourd (post #Metoo), suc-
cédant de surcroît au procès du pro-
ducteur Harvey Weinstein ainsi q u’à
« l’affaire Matzneff », écrivain long-
temps publié par Gallimard (groupe
Madrigall) dans un milieu de l’édi-
tion française cruellement épinglé
ces dernières semaines par la presse
américaine pour l’impunité accor-
dée à ses auteurs vedettes. Stock,
également filiale du groupe, devrait
publier les Mémoires de Woody
Allen le 29 avril sous le titre « Soit dit
en passant ». On ignore désormais
quelle sera sa décision.n

Nicolas Madelaine
@NLMadelaine

Le titre britannique « The Indepen-
dent », un des très rares quotidiens
établis à avoir totalement mis fin à
son édition papier (en mars 2016),
se félicite d ’avoir repris le chemin de
la croissance et d’afficher sa qua-
trième année de profits tout en
maintenant ses investissements
dans sa rédaction.
Pour l’exercice clos en septem-
bre 2019, « The Independent », un
titre datant de 1986 et de centre gau-
che, affiche ainsi une hausse de ses
revenus de 9 %, à 27 millions de
livres (31 millions d’euros). L’entre-
prise a enregistré des profits opéra-
tionnels de 2,3 millions, contre
3 millions lors de l’exercice précé-
dent, mais, en raison d’une hausse
de ses coûts de 3 millions, notam-
ment de 12 % pour le recrutement
de journalistes.
Le titre compte 109 journalistes
salariés dans 12 villes du monde en
plus de Londres, et environ le
même nombre de contributeurs
extérieurs ou pigistes. « Depuis le
virage numérique, nous avons multi-
plié par deux le coût de la rédaction »,

PRESSE


Le titre britannique
a mis fin à son édition
print en 2016.

Il est depuis rentable
et a même doublé
ses investissements
rédactionnels.

« The Independent » a renoncé


au papier, pas à la rentabilité


Hachette ne publiera pas les Mémoires


de Woody Allen aux Etats-Unis


Véronique Richebois
@VRichebois

A peine retombés le bruit et la
fureur autour de la 45e cérémonie
des Césars, qui avait récompensé
Roman Polanski comme « meilleur
réalisateur » pour son film
« J’accuse », voici qu’un nouveau
scandale médiatique et sociétal se
profile. Vendredi, assailli de criti-
ques, Grand Central Publishing
(Hachette Livre) a déclaré qu’il
renonçait à publier l’autobiographie
du réalisateur new-yorkais Woody
Allen, accusé d’avoir abusé sexuelle-
ment de sa fille adoptive Dylan Far-
row en 1992, alors qu’elle avait sept
ans.
Après avoir annoncé, lundi,
l’acquisiton les droits de ces Mémoi-
res ( intitulés « Apropos of
Nothing ») et prévu sa sortie pour le
7 avril aux Etats-Unis, la filiale du
leader français de l’édition – par
ailleurs troisième éditeur mondial
en littérature générale – a donc fait
machine arrière. « La décision
d’annuler le livre de M. Allen a été dif-
ficile [...] ; nous n’annulons pas de
livre à la légère », a indiqué dans un
e-mail à l’A FP Sophie Cottrell, porte-
parole de Hachette Book Group
USA (HBG). « Ces derniers jours, la
direction de HBG a eu de longues
discussions avec le personnel et
d’autres. Après avoir écouté, nous

ÉDITION


Critiqué, le leader
français de l’édition
renonce à publier
l’autobiographie du
cinéaste new-yorkais,
accusé d’avoir abusé
sexuellement de sa fille
adoptive Dylan Farrow,
pendante est cependant à écrire. en 1992.
Un amendement inclut ainsi
explicitement les mandats de
commercialisation parmi les
critères susceptibles d’être pris
en compte par décret pour défi-
nir la production indépendante.
« La valeur est dans la commer-
cialisation des droits d’une œuvre
audiovisuelle. Or nombre de pla-
teformes ont des modèles avec des
mandats de commercialisation
partout dans le monde. L’objectif
est que les producteurs conser-
vent ces mandats », explique
Aurore Bergé.
En séance, certains députés
pourraient aller encore plus loin
en proposant des amendements
sur une part minimale de pro-
duction indépendante. En
revanche, des amendements
pour définir précisément la pro-
duction déléguée n’ont pas été
adoptés. Certaines plateformes
travaillent régulièrement avec
des producteurs relégués au
rang de sous-traitant, ce que
voudraient éviter plusieurs
députés.

Marchandage complexe
Au-delà de ces amendements,
un grand marchandage très
complexe est en train d’avoir
lieu dans lequel tout le monde a
peur de perdre. Netflix, habitué
au système américain, mais
aussi Amazon Prime Video et
bientôt Disney+ tentent d’allé-

ger les contraintes qu’on cher-
che à leur imposer pour qu’ils
investissent dans les séries et le
cinéma français.
De leur côté, les chaînes fran-
çaises, et en particulier Canal+,
veulent également davantage de
droits sur les œuvres qu’elles
financent. Mais elles ont aussi
peur de faire les frais de conces-
sions que le gouvernement
ferait aux plateformes.

TVA à 10 % pour Netflix
Le Centre national du cinéma
(CNC) a ouvert une réforme
de la chronologie du cinéma,
un accord interprofessionnel
définissant le financement des
films par chacun de ses diffu-
seurs (salles, télévisions, plate-
formes, etc.) qui remettrait en
question la place centrale de
Canal+ dans le septième art au
profit de Netflix. La société de
Reed Hastings pourrait égale-
ment pousser pour que le taux
de TVA sur son abonnement
soit abaissé de 20 % à 10 %, celui
de Canal+ depuis 2012.
L’ idée est de diversifier le
financement des œuvres hexa-
gonales avec leurs nouveaux
diffuseurs. Mais, d’ici à la fin de
l’année, ce sont donc des réfor-
mes fiscales, réglementaires,
législatives et interprofession-
nelles qu’il faut faire aboutir.
Pas simple.
—N. M. et M. A.

difficile inclusion


générer encore plus, mais il tire
aussi des revenus de syndication de
ses contenus à d’autres titres à
l’étranger et génère 2 millions de
livres d’abonnements pour ceux
qui ne veulent pas voir de publicité.
Le groupe a aussi une activité
d’e-commerce (recommandation
de produits mis en avant sur le site).
Un des objectifs des prochaines
années sera de récolter, par exem-
ple en proposant davantage de con-
tenus dans des « verticales » (sport,
business, etc.), une base d’adresses
e-mail importante pour faire du
marketing ciblé et de l’e-commerce.
« Cela pourrait peser 25 millions »,
dit John Paton. L’idée est d’obtenir
de la data de première main alors
que les internautes et les autorités
sont de plus en plus rétifs aux coo-
kies tiers.
« The Independent » est détenu
par Evgeny Lebedev tout comme le
« Evening Standard », dont George
Osborne, l’ancien chancelier de
l’Echiquier, est le rédacteur en chef.
Le « Guardian », un autre quoti-
dien britannique, a également
réussi un retournement spectacu-
la ire puisque, après des années de
pertes abyssales, il est en croissance
et autosuffisant financièrement en
partie grâce aux intérêts générés
par l’argent du trust qui le détient.n

95


MILLIONS
de visiteurs uniques
sont recensés chaque mois sur
le site de « The Independent ».

ventes auxenchères publiques //


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MARCQ-EN-BAROEUL (59)

59 )


jour de pluie à New York »), projeté
en France en ouverture du Festival
du cinéma américain en septem-
bre 2019. Le cinéaste avait attaqué la
plateforme devant la justice améri-

caine pour rupture abusive de con-
trat, lui réclamant 68 millions de
dollars avant d’abandonner les
poursuites en novembre dernier,
étant parvenu à trouver un accord.
D’où la surprise, générale, ayant
accompagné l’annonce de Grand
Central Publishing de la publication

L’annonce intervient
au lendemain d’une
manifestation de
dizaines d’employés
d’Hachette qui
dénonçaient la
publication du livre.

Les Echos Lundi 9 mars 2020 HIGH-TECH & MEDIAS// 25

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