0123
JEUDI 9 AVRIL 2020 coronavirus | 5
Les choix de la Suède interrogent les pays voisins
Stockholm refuse de cloîtrer ses habitants, mais inspire Oslo et Copenhague, où le déconfinement s’annonce
malmö (suède)
correspondante régionale
D
epuis un mois, c’est
devenu presque une
obsession. Chaque
jour, dans les pays
nordiques, les médias se livrent
au petit jeu des comparaisons :
nombre de personnes contami
nées, de patients en réanima
tion, et, plus macabre encore, de
décès. On scrute les courbes, leur
évolution. On essaie d’en tirer
des conclusions. De voir qui va
avoir raison.
Car si le Danemark, la Norvège
et la Finlande ont opté très tôt
pour des approches similaires
face au coronavirus, en confinant
leur population, la Suède, elle, fai
sait bande à part. Jusqu’à lundi
6 avril, quand la première minis
tre danoise, Mette Frederiksen, a
annoncé la levée progressive des
mesures de semiconfinement,
en commençant par l’ouverture
des jardins d’enfants et des éco
les, le 15 avril. En Norvège, les crè
ches rouvriront le 20 avril, puis
les école primaires.
En Suède, elles n’ont jamais été
fermés. Pas plus que les collèges,
les piscines et salles de sports.
Seuls sont interdits les rassem
blements de plus de 50 person
nes, les visites dans les maisons
de retraite et le service au bar
dans les cafés et restaurants. Le
télétravail n’est que recom
mandé. Et s’ils sont priés de limi
ter au maximum les interactions
sociales, les Suédois sont toute
fois encouragés à sortir se dé
gourdir les jambes.
Dans les capitales voisines, les
dirigeants se gardent bien d’émet
tre des jugements. Interrogé le
18 mars sur l’approche suédoise,
le ministre norvégien de la santé,
Bent Hoie, tempérait : « Je n’ai pas
le sentiment que la différence soit
si énorme. » Il ajoutait qu’il n’y
avait « pas de réponses toutes prê
tes » et que chacun faisait au
mieux : « L’histoire montrera si le
résultat est différent, en fonction
des approches. »
A Stockholm, le premier minis
tre, Stefan Löfven, fréquemment
questionné sur ce particularisme
suédois, minimise aussi les diffé
rences, dans un entretien au quo
tidien Dagens Nyheter, publié le
3 avril : « Tous les pays réfléchis
sent à la façon de mettre en place
la distanciation sociale et de ren
forcer leur système de santé. En
suite, on le fait différemment. Par
fois, parce que nous sommes dans
des phases différentes. »
Relativement similaires au dé
but de l’épidémie, les courbes
d’évolution se sont disjointes, fin
mars. Alors que le nombre de dé
cès reste encore limité en Fin
lande et en Norvège, avec 34 et
89 morts au total, mardi, le Dane
mark constatait 203 décès et la
Suède, 591 – pour près de deux
fois plus d’habitants que ses voi
sins. A Stockholm, l’épidémiolo
giste en chef, Anders Tegnell, ex
plique les différences par un déca
lage dans l’épidémie : « La
Finlande est plusieurs semaines
après la Suède, tandis qu’en Nor
vège les personnes contaminées
jusqu’à présent étaient plus jeu
nes. Le Danemark suit une évolu
tion comparable. »
C’est une erreur
Mais les signaux envoyés depuis
la capitale suédoise ne rassurent
pas ses voisins. Vendredi, Stefan
Löfven, dont la cote de popularité
a gagné 21 points en un mois, a
averti : « Nous allons compter les
morts par milliers. Autant s’y pré
parer. » A Stockholm, un tiers des
maisons de retraite font part de
contaminations. Les personnels
de santé disent manquer de maté
riel de protection.
« Il y a quelques semaines encore,
beaucoup de Finlandais pensaient
que la Suède avait fait le bon choix,
mais ils sont bien moins nom
breux aujourd’hui », observe Kirsi
Heikel, correspondante de la
chaîne de télévision Yle à Stoc
kholm. A Helsinki, l’homme d’af
faires Hjallis Harkimo, devenu dé
puté, fait partie des sceptiques :
« Je ne comprends vraiment pas ce
que les Suédois fabriquent, à
moins qu’ils sachent quelque
chose que nous ignorons. »
Le 19 mars, la Finlande a fermé
ses frontières, en faisant une ex
ception pour les travailleurs trans
frontaliers. Pour Hjallis Harkimo,
c’est une erreur : « Nous avons
bouclé Helsinki pour empêcher le
virus de se propager en province,
où notre système de santé est fra
gile. Nous ne devrions plus laisser
rentrer personne en Finlande. »
A Rovaniemi, en Laponie (Fin
lande), Markku Broas lui donne
raison. Depuis une dizaine de
jours, ce médecin infectiologue
constate une hausse des conta
minations, pour lesquelles « il y a
une forte suspicion » qu’elles
soient d’origine suédoise. « Le ris
que est significatif quand telle
ment de gens passent la frontière
chaque jour », estime le médecin,
interrogé par Yle.
Mardi 7 avril, le gouvernement
finlandais a annoncé un durcis
sement des règles, qui prend tou
tefois en considération la dépen
dance du système de santé, côté
suédois, au personnel finlandais,
toujours autorisé à passer la
frontière. La veille, le comté de
Norrbotten avait proposé, en
échange, d’accueillir les patients
finlandais, dans ses services de
réanimation.
Au Danemark, même dilemme :
les hôpitaux et les maisons de re
traite ne peuvent pas se passer des
salariés suédois. Mais l’associa
tion de seniors Aeldre Sagen, forte
de 900 000 adhérents, craint des
contaminations : « Les Suédois vi
vent presque normalement, alors
que nous avons choisi une straté
gie complètement différente », ar
gue son président, Bjarne Has
trup. Il propose de tester les trans
frontaliers, « pour que les résidents
des maisons de retraite n’aient plus
peur quand ils entendront parler
suédois dans les couloirs. »
Début avril, pour la première
fois depuis 1945, la Finlande a
ouvert ses réserves de guerre, ul
trasecrètes, devant lui permettre
de ternir plusieurs mois, pour y
prélever des médicaments et équi
pements médicaux. La Suède, qui
en avait elle aussi, les avait détrui
tes à la fin de la guerre froide.
annefrançoise hivert
« L’histoire
montrera
si le résultat
est différent,
en fonction
des approches »
BENT HOIE
ministre norvégien
de la santé
En Belgique, la colère
noire du monde médical
L’annonce de la destruction de six millions
de masques a provoqué un émoi national
bruxelles correspondant
C’
est une fameuse colère,
et elle s’exprime par la
voix du docteur Phi
lippe Devos, qui dirige une unité
de soins intensifs à Liège. Ce pro
fessionnel, président de l’Associa
tion belge des syndicats médi
caux (Absym), affirme au Monde
que « les hôpitaux n’ont jamais pu
vraiment compter sur l’Etat » et
que la crise du à la pandémie de
Covid19 démontre le manque de
prévoyance d’un pays qui
compte, pourtant, entre Etat fédé
ral, régions et Communautés, six
ministres en charge de la santé.
« Nous continuons à manquer de
tout : tabliers, respirateurs, mas
ques chirurgicaux et masques de
protection FFP2 », déclare ce mé
decin, qui a été luimême conta
miné par le coronavirus.
Aujourd’hui, alors qu’un commu
niqué officiel transmis récem
ment à la presse affirmait l’in
verse, c’est une pénurie de médi
caments qui se fait jour.
« On nous demande d’envoyer un
courriel deux jours avant l’épuise
ment de nos stocks et, au bout de
cinq jours seulement, on nous an
nonce qu’un camion de livraison
est en route... Nous devons donc
suspendre des traitements, les mo
difier, où écraser des cachets,
comme au temps où les perfusions
n’existaient pas! », poursuit le
docteur Devos.
Un cri d’alarme, parmi beau
coup d’autres, qui contraste avec
les propos apaisants de la minis
tre de la santé, la libérale fla
mande Maggie De Block. Elle est
accusée d’avoir minimisé les ris
ques et d’envoyer des messages
rassurants alors que la pénurie −
notamment de masques − est de
venue une véritable saga.
L’épisode le plus marquant a
été l’annonce de la destruction
de 6 millions de masques pour
tant promis aux médecins. Cette
« réserve stratégique » avait, en
réalité, été détruite en 2017 ou
2018 : les masques étaient péri
més, leurs élastiques en tout cas.
La ministre De Block avait décidé
de ne pas les remplacer, afin de
« ne pas gaspiller l’argent des con
tribuables ».
« Cacophonie officielle »
« Irresponsable », a jugé Rudy De
motte (PS), l’un des prédécesseurs
de Mme De Block à la tête du dépar
tement de la santé. Entre 2003 et
2007, il avait commandé 38 mil
lions de masques, dont 6 millions
de FFP2. Il a ensuite été découvert
qu’une commande effectuée en
Turquie avait échoué en raison
d’une fraude. Puis, d’autres mas
ques, en provenance de Chine, et
promis aux soignants, se sont ré
vélés d’une qualité insuffisante.
Mme De Block, médecin généra
liste de profession, a été souvent
critiquée pour sa volonté de limi
ter la croissance du budget de son
département. Son cabinet con
teste toutefois qu’elle ait voulu
faire des économies en renon
çant à commander des matériels
essentiels. Elle aurait seulement
souhaité « une réflexion appro
fondie » sur le meilleur moyen de
s’en procurer.
La gauche radicale promet déjà
la convocation d’une commis
sion d’enquête parlementaire
quand la pandémie de Covid
sera terminée. A Liège, le docteur
Devos déplore, en tout cas, une
« cacophonie officielle ». Un der
nier exemple : le pouvoir fédéral
promet, pour la mimai seule
ment, une solution globale au
manque de masques, tandis que
la Wallonie a pris l’initiative d’en
faire fabriquer par une entreprise
de la région.
jeanpierre stroobants
Année 2020 - Pho
tos non contractuelles - LIDL
RCS Créteil 343 262 622 |
AUJOURD’HUIPLUSQUEJAMAIS, LESÉQUIPES
DES1551 SUPERMARCHÉSLIDLSEMOBILISENT
POURVOUSDANSTOUTELAFRANCE.
N
ous sommes engagés sansrelâche
pourréapprovisionnertous les
jours nos supermarchéset ainsi
vous garantirla disponibilité perma-
nente des produits essentiels àvos
besoins quotidiens.Et surtout, nous
sommestotalement impliqués pour
vous assurer une sécurité sanitaire
optimale, indispensable pourfaire
vos courses entoute confiance.Pour
la pr otection detous, des mesures
exceptionnelles sont mises en place
avec la plus grande vigilance.
Toutes nos caisses sont équipées
d’une vitre de protectionet sont
désinfectéesrégulièrement,
des masqueset des gants sontà
dispositiondetoutesnoséquipes.
Le rappel clairdes gestes barrièreset
des distances de sécurité estaffiché
en permanence.Les respecter, c’est
se pr otéger, protéger nos équipeset
protéger les autres.
Soyons solidaireset prenons soin
de nous.
aujourd’huiplus que jamais,
nous sommesengagéspourvous,
pourvos familles, pourvotresanté