Libération - 07.04.2020

(Nancy Kaufman) #1

6 u Libération Mardi 7 Avril 2020


nes contaminées (moins de 4 000 pour la
seule région de Rome) incite les habitants à
enfreindre les interdictions. Rien que pour la
seule journée de samedi, près de 10 000 in-
fractions ont été constatées par les forces de
l’ordre dans le pays.

Masque obligatoire
En réaction, les autorités siciliennes ont par
exemple décidé de bloquer presque totale-
ment la traversée du détroit de Messine alors
que des dizaines d’automobilistes conti-
nuaient d’embarquer sur les ferrys. Et les au-
torités religieuses ont décidé d’intervenir
pour contester l’appel du leader de la Ligue,
Matteo Salvini, à rouvrir les églises pour les
fêtes de Pâques au prétexte que «nous avons
aussi besoin de la protection du cœur imma-
culé de Marie».
Par ailleurs, depuis dimanche, la Lombardie
a décrété pour tous ses habitants l’obligation
de se couvrir le bas du visage, la bouche et le
nez par un masque ou, à défaut, un foulard
avant toute sortie. La Toscane et d’autres ré-
gions devraient suivre, et à Rome le gouverne-
ment envisagerait une mesure similaire «pour
sortir graduellement» de la pandémie. A pas
très comptés.
Éric Jozsef
Correspondant à Rome

Pour le gouvernement, cette perspective de se-
conde phase permet aussi d’envisager l’assou-
plissement des restrictions, afin de faire repar-
tir d’ici au 14 avril une partie de l’économie.
Fin mars, l’Italie était allée jusqu’à réserver
l’ouverture des entreprises aux seuls secteurs
«strictement essentiels». Aujourd’hui, on es-
time qu’environ 70 % des sociétés italiennes
sont à l’arrêt. L’exécutif travaille ainsi sur la
possibilité d’autoriser la réouverture des
­entreprises en mesure de garantir des distan-
ces minimales entre les travailleurs. Celles-ci
devront avoir souscrit un «pacte de sécurité»
avec les syndicats. Les artisans travaillant
seuls dans leurs boutiques pourraient être
aussi concernés par cette reprise, à la diffé-
rence des centres commerciaux, de la restau-
ration, des théâtres et des cinémas.
Reste que le gouvernement redoute que ces
assouplissements n’entraînent un relâche-
ment. «La phase 2 ne veut pas dire que tout le
monde est libre de ses déplacements, cela
­signifie remettre en marche une partie de
l’économie», a insisté le dirigeant du Mouve-
ment 5 Etoiles et ministre des Affaires étran-
gères, Luigi Di Maio, alors que les chiffres ras-
surants des derniers jours et l’arrivée du
printemps ont poussé nombre d’Italiens à
sortir de chez eux. En particulier dans le Sud,
où le nombre relativement faible de person-

­à Milan, la capitale régionale, le nombre de
personnes contaminées continue de croître
(plus de 400 dimanche). En revanche dans le
sud du pays, la progression reste contenue.
La crainte que la maladie ne se diffuse massi-
vement dans le Mezzogiorno, où le système
sanitaire est souvent défaillant, est pour
l’heure écartée.

Assouplissements
«La courbe [des contaminations] a commencé
à descendre, celle des morts aussi. Nous de-
vrons commencer la phase 2 si ces chiffres se
confirment», a avancé dimanche soir Silvio
Brusaferro, le président de l’Institut supérieur
de la santé. Pour les experts médicaux, la
phase 2 consiste à contenir l’épidémie pour
éviter une saturation mortifère des services
de soins intensifs. L’objectif est, en particulier,
de commencer à se concentrer sur les princi-
paux foyers de contamination, à savoir les hô-
pitaux, les maisons de retraite et les cercles
familiaux. Les autorités envisagent notam-
ment d’isoler davantage les personnes infec-
tées dans les structures accueillant aussi
­d’autres patients, d’effectuer des tests plus
systématiquement dès l’apparition des pre-
miers symptômes en se rendant au domicile
des malades, qui pourraient alors être isolés
de leurs proches.

I


l aura fallu quatre semaines de confine-
ment, mais l’Italie reprend espoir. Chaque
soir, dans son pull-over sombre, le respon-
sable de la protection civile, Angelo Borrelli,
égrène à 18 heures son bulletin de guerre du
coronavirus, avec son cortège de morts qui se
comptent encore quotidiennement par cen-
taines. La tempête sanitaire, qui fait de la pé-
ninsule le pays européen le plus frappé par la
pandémie (avec plus de 16 500 décès, dont
636 enregistrés lundi, après deux journées
consécutives de baisse), n’est pas encore sur-
montée, mais le nombre de nouveaux cas de
contamination a nettement diminué, tout
comme celui des patients en réanimation, en
recul depuis trois jours.
«C’est une première bonne nouvelle», titrait
lundi matin le quotidien La Repubblica,
même si la prudence demeure. Car si dans
l’ensemble la tendance est encourageante
en Lombardie – la principale région touchée ,

En Italie, de «premières bonnes


nouvelles» et beaucoup de prudence


La baisse globale du nombre
de décès quotidien depuis deux
semaines permet aux autorités
d’envisager une nouvelle phase.
Mais celles-ci craignent un
relâchement si certaines mesures
de restriction sont levées.

Distribution de masques à Milan, lundi. Depuis dimanche, en Lombardie, il est obligatoire de se couvrir le bas du visage pour sortir. Photo Claudio Furlan. LaPresse. AP

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