Le Monde - 11.03.2020

(avery) #1
0123
MERCREDI 11 MARS 2020 france| 13

A Strasbourg, poker


menteur pour la mairie


Trois candidats issus de la majorité municipale s’affrontent,


faisant des alliances d’entre­deux­tours un enjeu majeur


strasbourg ­ envoyé spécial

D


epuis longtemps, la
politique strasbour­
geoise laisse per­
plexes nombre d’ob­
servateurs parisiens, qui peinent
à comprendre cette ville où cha­
cun a pris l’habitude de se poser
en chantre de l’« humanisme rhé­
nan ». Autrement dit, un terroir
où à peu près tout le monde, à
l’exception des extrêmes, joue sa
partie au centre. Sur un échiquier
politique repeint d’un peu de
vert, époque oblige.
Cette proximité a ses avantages.
Le pragmatisme et les accords de
circonstance sont plus faciles. Elle
a aussi son inconvénient. Dans ce
magma idéologique pas toujours
bien différencié, les querelles de
personnes prennent aisément le
pas sur la bataille des idées. « On
ne voit pas bien les grandes lignes
de clivage... », euphémise le poli­
tologue Richard Kleinschmager,
spécialiste du cru.
Sur la ligne de départ du pre­
mier tour, le 15 mars, trois candi­
dats visant une présence au se­
cond tour (le seuil est à 10 % des
suffrages exprimés) sont ainsi is­
sus de la majorité municipale de
gauche constituée en 2014 autour
du socialiste Roland Ries, maire
depuis 2008. Cette fragmenta­
tion est une conséquence de
l’onde de choc de l’élection d’Em­
manuel Macron, qui a fait valser
les étiquettes.

Des camps rivaux, mais pas trop
M. Ries, aujourd’hui âgé de 75 ans,
a prévenu très vite que ce mandat
qui s’achève serait son dernier.
Les appétits de ses « camarades »
ont eu le temps de s’aiguiser et
d’éparpiller les troupes façon

puzzle. Dans des camps rivaux,
certes, mais pas trop. Chacun a
conscience que l’élection se
jouera entre les deux tours. Il ne
faut donc pas insulter l’ave­
nir. Des listes devront fusionner
pour s’imposer.
Le dernier sondage en date, réa­
lisé pour Europe 1 et Orange par
BVA trois semaines avant le scru­
tin, place Alain Fontanel (La Répu­
blique en marche, LRM) en tête du
peloton des prétendants, au pre­
mier tour, à 27 %. Jeanne Barse­
ghian (Europe écologie­Les Verts,
EELV), le suit de près, à 25 %. Der­
rière le duo, un troisième mem­
bre de la famille atomisée pointe
son nez : Catherine Trautmann
(Parti socialiste, PS), à 17 %. Elle est
au coude­à­coude avec Jean­Phi­
lippe Vetter (Les Républicains, LR),
à 15 %. La candidate du Rassem­
blement national (RN), Hombe­
line du Parc, est créditée de 10 %.
Cette photo de l’opinion ne vaut
pas augure ; les écarts restent
dans « l’épaisseur du trait »,
comme disent les sondeurs.
M. Fontanel, le candidat du
« nouveau monde », a grandi dans
l’ancien. Il en maîtrise parfaite­
ment les codes. A 51 ans, visage
éternel de premier communiant,
raie sur le côté toujours impecca­
ble, cet énarque chemine au gui­

don d’une bicyclette électrique,
dans la vraie vie comme sur Insta­
gram. Un modèle d’un vert pro­
fond, fabriqué dans les Vosges
voisines, comme il se doit.

Secret de Polichinelle
Ancien cadre de la rue de Solfé­
rino, où il était secrétaire national
aux fédérations, M. Fontanel a re­
joint LRM en 2017. Ce fan de Baron
noir, la série qui puise son inspira­
tion dans les turpitudes du PS, a
grandi dans l’ombre protectrice
de M. Ries. L’édile a levé début fé­
vrier un secret de polichinelle en
soutenant officiellement son pre­
mier adjoint. Sans se soucier que
son poulain ait troqué la rose
contre un bâton de marcheur.
M. Ries lui­même a été mis au ban
du PS fin 2019 pour avoir fait par­
tie des signataires d’une tribune
demandant la création d’« un pôle
de gauche indépendant de LRM au
sein de la majorité présidentielle ».
Au sein de l’état­major de LRM,
où l’on s’attend à une bérézina gé­
nérale aux municipales, Stras­
bourg fait figure de rare espoir.
M. Fontanel, dont la femme Marie
a été camarade de promo d’Em­
manuel Macron à l’ENA puis l’une
de ses conseillères à l’Elysée, peut
permettre au parti présidentiel
d’afficher un succès dans une
grande ville.
La partie, cependant, est loin
d’être jouée. M. Fontanel ne fanfa­
ronne pas : « Je suis serein parce
que j’ai un projet ambitieux pour la
ville. Mais ce sont les Strasbour­
geois qui trancheront. » Ici, l’éti­
quette LRM est probablement
moins un repoussoir qu’ailleurs.
Emmanuel Macron a fait dans la
capitale alsacienne un score
confortable à la présidentielle
(près de 28 % au premier tour et

81 % au second) et sa liste, surtout,
s’y est bien maintenue aux euro­
péennes (27,7 %). Mais, depuis,
beaucoup d’eau a coulé dans le
Rhin. Les écologistes, notam­
ment, peuvent se prévaloir d’avoir
le vent en poupe, poussés par l’air
du temps. Dans cette ville étu­
diante, la population évolue vite,
et l’opulence satisfaite du centre­
ville masque 25 % d’habitants qui
vivent sous le seuil de pauvreté.
La tête de liste EELV, Jeanne Bar­
seghian, était inconnue au ba­
taillon lorsqu’elle est devenue
conseillère municipale en 2014
sur la liste de M. Ries. Mais elle n’a
pas traîné en route. Les écologis­
tes ont posé les jalons de leur
émancipation en quittant fin
2018 l’exécutif de la métropole,
pour protester contre la construc­
tion du grand contournement
ouest. Quatre voies de bitume
longues de 24 kilomètres,
conçues pour désengorger la
ville, en traversant des collines où
s’épanouit le grand hamster d’Al­
sace, dont le sort est devenu un
drame régional.
Mme Barseghian l’assure :
l’heure verte va sonner. « On as­
siste à la fin d’un cycle. On doit en
ouvrir un nouveau, qui donnera la
tonalité des trente ans à venir »,
estime cette éco­conseillère de
39 ans, qui promet une ville « rési­
liente » et « zéro carbone ». La
dynamique, assure­t­elle, est
concrète. « Des gens qui ne fai­
saient pas de politique nous rejoi­
gnent. Des parents qui veulent
pouvoir dire à leurs enfants, face à
l’urgence climatique : “J’ai fait
quelque chose”. »

Surprise de dernière heure
Pour corser la partie, M. Fontanel
doit aussi faire face, avec Mme
Trautmann, au retour d’un spec­
tre de la politique strasbour­
geoise. La vice­présidente de la
métropole est la statue du com­
mandeur des socialistes locaux.
Elle est aussi la surprise de der­
nière heure de cette campagne. A
69 ans, l’ancienne ministre de la
culture de Lionel Jospin a pris la
tête de la liste PS au début du mois
de février, à la suite du « retrait »
du candidat désigné. Mathieu
Cahn, dont la campagne ne décol­
lait pas, a dû renoncer à se présen­

ter après avoir été épinglé pour
des comportements inappro­
priés. Comme l’a révélé Media­
part, il est soupçonné d’avoir pu­
blié des photos de femmes nues
sur un blog, sous pseudonyme, il
y a une dizaine d’années, et
d’avoir eu naguère des relations
sexuelles tarifées, ce qu’il dément.
Ce naufrage a paradoxalement
ravivé les espoirs roses. Alors que
le PS local menaçait ruine et que
M. Cahn n’était pas sûr d’attein­
dre la barre des 10 %, Mme Traut­
mann apparaît protégée d’un
fiasco par le bouclier de sa noto­
riété. Elle fait même mine de
croire qu’elle va emballer le sprint
final : « J’écoute les Strasbourgeois,
pas les sondages. Beaucoup nous
disent qu’ils ont peur des écologis­
tes et qu’ils ne veulent plus de La
République en marche. »
Plus sûrement, Mme Trautmann
peut espérer se retrouver en posi­
tion de faiseuse de roi, ou de
reine, entre M. Fontanel et
Mme Barseghian. La rumeur stras­
bourgeoise prête à l’ancienne mi­
nistre d’avoir moins envie de re­
devenir maire, un poste qu’elle a
déjà occupé de 1989 à 1997 puis
en 2001 et dont elle connaît les
contraintes, que d’obtenir la pré­
sidence de l’agglomération. « Où
est son intérêt? Elle s’alliera avec
ceux qui seront les mieux placés
pour lui garantir l’Eurométro­
pole », pronostique ainsi un ob­
servateur. En politique madrée,
l’intéressée laisse les spéculations
filer bon train. En prenant soin de
ne fermer aucune hypothèse.
Du côté d’EELV, on veut croire
que la candidate socialiste privilé­
giera une alliance verte­rose. « On
a une responsabilité forte à ras­
sembler autour de notre projet »,
anticipe Mme Barseghian. « Traut­
mann fait monter les enchères

mais à la fin, elle viendra avec
nous », ajoute­t­on dans son en­
tourage. Les écologistes, qui refu­
sent un rapprochement avec
« M. Fontanel ou tout candidat en­
core plus à droite », ont besoin du
PS pour convaincre ceux qui dou­
tent de leur capacité à exercer le
pouvoir. L’hypothèse d’une vic­
toire verte inquiète les milieux
économiques, qui n’ont guère le
goût de l’aventure.

Autre carte à droite
Dans cette partie de poker men­
teur, M. Fontanel dispose d’une
autre carte, à sa droite cette fois.
Le candidat LRM laisse circuler
l’idée qu’un accord entre les deux
tours est aussi envisageable avec
le candidat LR. A Strasbourg, l’im­
probable n’est pas impossible :
l’Eurométropole a accouché, ces
dernières années, d’une majo­
rité... gauche­droite.
Jean­Philippe Vetter, 40 ans, est
un ancien attaché parlementaire
de Fabienne Keller, maire UMP de
la ville de 2001 à 2008. Son ex­pa­
tronne, dont il s’est émancipé, a
déjà franchi le Rubicon vers la
Macronie. Cette juppéiste vient
de se faire élire députée euro­
péenne sous la bannière du prési­
dent de la République. Son micro­
parti, Agir, soutient M. Fontanel.
Elle­même reste, pour l’heure, si­
lencieuse.
M. Vetter se laissera­t­il
convaincre, si M. Fontanel lui
tend la main? « Cette question n’a
pas de sens avant le premier tour »,
élude­t­il. Dans les rangs LR, on
rêve à haute voix d’un scénario fa­
vorable, qui permettrait de la
jouer en solo : un RN sous la barre
des 10 % au premier tour, qui as­
surerait une réserve de voix, et
des listes concurrentes incapables
de s’entendre. « Les trois autres
ont appartenu à la même majo­
rité, pas moi. Les gens veulent du
changement », espère M. Vetter.
Dans cette campagne, beau­
coup de choses se joueront sur­
tout en quelques heures, entre di­
manche soir et mardi, où il faudra
déposer les listes de second tour.
Les discussions s’annoncent ani­
mées, pour adapter les program­
mes à d’éventuels accords et se ré­
partir les postes.
pierre jaxel­truer

Au sein de l’état-
major de LRM,
où l’on s’attend
à une bérézina,
Strasbourg fait
figure de rare
espoir

A La Réunion, la perspective d’un troisième tour judiciaire


Dans 23 communes de l’île sur 24, des élus ou des candidats aux municipales sont plombés par des affaires de justice


saint­denis (la réunion) ­
correspondance

U


ne perquisition a été me­
née, mardi 3 mars, dans
les bureaux de la direc­
tion des ressources humaines de
la ville de Saint­Denis de La Réu­
nion. Le procureur Eric Tufféry et
les gendarmes de la section de re­
cherches ont saisi une dizaine de
dossiers d’agents, de membres du
cabinet et de chargés de mission
soupçonnés d’être des emplois de
complaisance directement recru­
tés par le maire socialiste, Gilbert
Annette. Ce dernier n’a pas réagi
publiquement mais son entou­
rage s’est ému qu’un tel événe­
ment survienne à deux semaines
du premier tour des élections mu­
nicipales, les 15 et 22 mars.
Cette perquisition vient rappeler
le poids des affaires judiciaires
dans la campagne. Nombre de
candidats de premier plan sont vi­
sés par des enquêtes, se trouvent
en situation d’être bientôt jugés
ou ont déjà été condamnés. A
Saint­Denis, Gilbert Annette,
après deux mandats successifs, ne
figure pas comme tête de liste
mais en huitième place sur la liste
d’Ericka Bareigts (Union de la gau­
che), députée et ex­ministre des
outre­mer. En plus de ce dossier
d’embauches de proches, le par­
quet de Saint­Denis enquête sur
des marchés publics dans le sec­
teur du gardiennage passés par la
commune. Ses adversaires ne se
privent pas de rappeler que Gilbert

Annette avait été condamné,
en 1996, à une peine de détention
et à une amende pour corruption
liée à un contrat pour la gestion de
l’eau lors de son premier mandat
de maire, entre 1989 et 1994.

Rien d’exceptionnel
D’autres candidats à la mairie de la
première ville de l’île (150 000 ha­
bitants) sont eux aussi mis en
cause dans plusieurs affaires. Nas­
simah Dindar (UDI, soutenue par
LRM) devrait être jugée devant le
tribunal judiciaire de Saint­Denis
le 3 avril pour prise illégale d’inté­
rêts liée à deux contractuels – un
jardinier et une femme de ménage
qui auraient travaillé à son domi­
cile – recrutés de façon irrégulière
à l’époque où elle présidait le ser­
vice départemental d’incendie et
de secours. La sénatrice est égale­
ment au centre d’une enquête
ouverte par le Parquet national fi­
nancier (PNF) sur l’achat à bas prix
d’une villa créole et les travaux
qu’elle a fait réaliser. Le PNF est
aussi saisi d’un signalement de la
Haute Autorité pour la transpa­
rence de la vie publique (HATVP)
sur sa déclaration d’intérêts et le
non­respect des règles d’écrête­
ment de ses revenus publics.
En lice, Alain Armand (divers
gauche), ancien adjoint de Gilbert
Annette, a, lui, été condamné en
novembre 2019 par la cour d’appel
de Saint­Denis à dix ans d’inéligi­
bilité pour prise illégale d’intérêts.
L’élu présidait une société publi­
que de logements sociaux ainsi

qu’une société de consulting qui
avait passé des contrats avec la pre­
mière. Il a maintenu sa candida­
ture en formant un pourvoi en
cassation. Enfin, Didier Robert (di­
vers droite), président de la région
Réunion, attend de savoir si le par­
quet va le renvoyer ou pas devant
des juges pour ne pas avoir déclaré
son salaire à la HATVP quand il
présidait la société publique locale
Réunion des musées régionaux.
8 400 euros octroyés dans un pre­
mier temps sans autorisation du
conseil d’administration. Par
ailleurs, la région est ciblée par des
enquêtes sur les marchés de tra­
vaux de la route du littoral et pour
la construction de lycées.
Ce cas de figure d’élus plombés
par des affaires n’a rien d’excep­
tionnel à La Réunion. Les 24 com­
munes de l’île, sauf une, sont
concernées. A Saint­Louis, les
deux anciens maires, Cyrille Ha­
milcaro (divers droite, soutenu par
LRM) et Claude Hoarau (ex­Parti
communiste réunionnais) avaient

dû, chacun son tour il y a plusieurs
années, quitter leur fonction à
cause de condamnations à des pei­
nes de prison avec sursis et d’inéli­
gibilité en raison de malversa­
tions. Cyrille Hamilcaro risque
d’être prochainement jugé pour
avoir poursuivi son activité dans
l’ombre malgré l’interdiction de la
justice. Il est aussi soupçonné
d’avoir détourné le fichier des
2 500 employés communaux pour
leur envoyer un tract électoral.
A Saint­Paul, sur la côte ouest, Jo­
seph Sinimalé (LR), lui aussi sou­
tenu par La République en marche,
a effectué treize mois de prison à la
fin des années 1990. Il affirme
avoir « lavé [s]on honneur et [s]a di­
gnité » après avoir reconquis la
mairie en 2014. Mais la présence
en cinquième position sur sa liste
du président de la Chambre de
commerce et d’industrie de La
Réunion, Ibrahim Patel,
condamné en mars 2019 à huit
mois avec sursis et cinq ans d’inéli­
gibilité pour escroquerie, abus de
biens sociaux et faux et usage de
faux dans une affaire de loyers de
locaux commerciaux, provoque
un malaise grandissant. Ibrahim
Patel doit être rejugé en appel en
février 2021. Auparavant, il compa­
raîtra en correctionnelle en octo­
bre pour des faits de harcèlement
moral sur trois employés de l’insti­
tution consulaire.
Dans l’est de l’île, à Saint­André,
le maire Jean­Paul Virapoullé (di­
vers droite) est convoqué le 3 avril
devant les juges dans un dossier de

prise illégale d’intérêts liée à
l’achat d’un terrain et d’une mai­
son par la commune. Quant à ses
opposants, Eric Fruteau (ancien
maire) et Joé Bédier (ancien ad­
joint), ils ont été entendus par les
policiers dans une enquête tou­
chant à un marché de la commu­
nication de la ville. L’inflation d’af­
faires touchant à des manque­
ments à la probité de responsables
publics et du favoritisme a déjà
conduit plusieurs fois les autorités
judiciaires locales à lancer des
messages d’alerte. Plusieurs pro­
cureurs en poste ont déjà déploré
que La Réunion souffre d’un défi­
cit d’enquêteurs spécialisés dans
les affaires financières.

« Déficit de culture politique »
En 2018, la chambre régionale des
comptes (CRC) Réunion­Mayotte a
effectué treize signalements dits
« lourds » aux deux parquets de
l’île. Soit autant que les CRC des ré­
gions Ile de France et Provence­Al­
pes­Côte d’Azur.
Elu d’opposition à Sainte­Marie,
une ville ciblée par sept enquêtes
judiciaires liées au mandat de l’an­
cien maire Jean­Louis Lagourgue
(divers droite) devenu sénateur fin
2017, Christian Annette (PS) dit
être « effrayé ». « C’est extrêmement
grave, observe­t­il. Il existe comme
une fatalité chez beaucoup d’élec­
teurs. Ils se disent “zot tout’i vole”
(« ils volent tous »). Comme si la
captation d’argent public était na­
turelle chez les dirigeants publics
ou faisait partie de la fonction. »

Dans sa commune, la majorité est
au pouvoir depuis trente ans. L’op­
posant et candidat déplore « un dé­
ficit de culture politique et de for­
mation civique ». Dans beaucoup
de communes de l’île, où le taux de
chômage est de 24 %, la ville reste
le principal employeur. Le vote des
agents communaux est détermi­
nant. « Moi j’entends beaucoup : “je
vote pour le maire : c’est mon pa­
tron”. C’est du paternalisme. Des ci­
toyens qui se décident en fonction
de ce qu’ils ont obtenu de la com­
mune », ajoute Christian Annette.
Les affaires judiciaires touchant
des élus pèseront­elles sur les ré­
sultats de ce scrutin municipal
toujours très personnalisé? Cela
reste une inconnue. Dans son dis­
cours de rentrée, le 31 janvier, le
procureur général, Denis Chausse­
rie­Laprée, a annoncé que les pro­
cédures prêtes à être jugées le se­
ront après les élections « afin de ne
pas perturber le processus démo­
cratique et voir la justice instru­
mentalisée ». « La justice pénale re­
prendra son cours normal pour ce
type de contentieux une fois les
élections passées », a­t­il ajouté.
Le procureur général a prévenu
que de lourdes peines d’inéligibi­
lité « seront requises si nécessaire ».
« La légitimité tirée de la loi a, de
mon point de vue, autant de force
que la légitimité issue du suffrage »,
prévient­il afin « d’éviter d’inutiles
polémiques futures ». Ce qui indi­
que que ces élections connaîtront
un troisième tour judiciaire.
jérôme talpin

M. Fontanel doit
faire face, avec
Mme Trautmann,
au retour d’un
spectre de
la politique
strasbourgeoise

La chambre
régionale
des comptes
a effectué treize
signalements
dits « lourds »
aux parquets
de l’île, en 2018
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