Libération Samedi 7 et Dimanche 8 Mars 2020 u 53
Dan, qui possède aujourd’hui seize
établissements.
L’American Colony, lui, est, à
l’origine, une maison édifiée au
XIXe siècle par le pacha Rabah Ef-
fendi el-Husseini pour ses quatre
épouses. L’histoire veut que certai-
nes chambres, dotées de portes
communicantes, servaient au maî-
tre d’accès pour rendre visite à ses
conjointes... Après sa mort, la bâ-
tisse est reprise par un couple de
chrétiens venu de Chicago, les Spaf-
ford. D’où le nom d’Américan
vernement.» Dans ces cas-là, qui a
droitaux deux principales suites à
6 000 dollars [5 300 euros] la nuit?
«Ce sont les services de sécurité qui
ont le “final cut”», précise Sheldon
Ritz, le directeur commercial du
groupe Dan. Il a accueilli pas moins
de cinq présidents américains dans
les lieux. Lorsque Donald Trump
s’installe dans sa suite, ses
bodyguards exigent que les vitres,
bien qu’à l’épreuve des balles,
soient masquées par des plots en
béton ce qui ne contribue pas
vraiment à l’éclairage naturel des
lieux.
Le vaste lobby du King David, dont
les pavés sont ornés des signatures
de toutes les célébrités qui y ont sé-
journé, laisse une large place aux
arts et aux lettres. Le comédien Mi-
chael Douglas a ainsi choisi l’hotêl
pour la bar-mitsva de son fils. Reste
tout de même que le pouvoir et la
notoriété se doivent de composer
avec le calendrier de Jérusalem. Il
y a quelques années, Vladimir
Poutine avait ainsi prévu de s’ins-
taller à l’hôtel au moment de la cé-
lébration de la pâque juive. Une pé-
riode durant laquelle le King David
est complet et les chambres réser-
vées jusqu’à un an à l’avance. Le
président russe a donc été poli-
ment, mais fermement, prié de
s’installer dans un établissement
voisin. On ne badine pas avec les fê-
tes religieuses.•
Y aller
Israël est desservi
depuis la France
en vols directs par cinq
compagnies aériennes :
Air France, El Al, Transavia,
EasyJet et Ryanair.
Il faut compter entre 150
et 750 euros pour un
aller-retour suivant les
saisons et les transporteurs.
Depuis l’aéroport
Ben-Gourion de Tel-Aviv,
un train relie Jérusalem
en vingt minutes.
Y dormir
Pour le visiter sans avoir à
en payer le prix, juste en
face du King David, l’hôtel
Eldan offre de chambres
à un prix accessible.
Rens. : Eldanhotel.com
L’Olive Tree, situé à
une centaine de mètres de
l’American Colony, permet
à ceux qui veulent s’installer
à Jérusalem-Est de se loger
à un tarif plus modéré.
Rens. : Olivetreehotel.co.il
Chambres
avec vues
Voyages/
gouvernement britannique en vi-
site officielle à Jérusalem s’était
installé... à l’hôtel King David.
Depuis que le processus de paix est
au point mort dans la région, l’Ame-
rican Colony est moins prisé par les
élus de tous bords. «Notre position-
nement axé sur la neutralité nous
coûte cher, estime Jeremy Berko-
vitz, notre clientèle ne compte
que 5 % de clients venus du monde
arabe et 15 % d’Israéliens.» Les
Etats-Unis, l’Allemagne ou encore
la Suisse fournissent les plus gros
bataillons d’hôtes prêts à payer en
moyenne 350 euros la nuit. A ce
prix, ils peuvent dormir dans l’une
des 92 chambres conservées dans
leur jus, avec carreaux d’époque
patinés par le temps au sol et bai-
gnoire à l’ancienne. Le bar, où il
n’est pas toujours possible de
distinguer avec précision qui est at-
tablé, demeure néanmoins un lieu
de rendez-vous à fort enjeu. Les
chefs d’entreprises israéliens et pa-
lestiniens s’y retrouvent souvent
pour négocier leurs deals en toute
discrétion.
Plots en béton. Pendant ce
temps, le King David doit parfois
gérer de manière diplomatique des
délégations officielles qui arrivent
en même temps. «Pour les funé-
railles de Shimon Pérès [l’ex-Pre-
mier ministre israélien, ndlr] , nous
avons reçu 25 chefs d’Etat et de gou-
Colony. Depuis, l’hôtel est toujours
détenu par une soixantaine de per-
sonnes physiques de nationalités
américaine, britannique ou suisse.
La distance entre les deux établis-
sements n’excède pas deux kilomè-
tres. Pourtant, l’un comme l’autre,
ont leur clientèle et leurs aficiona-
dos. «Les politiques qui veulent ren-
contrer des officiels israéliens et pa-
lestiniens descendent chez nous»,
précise Jeremy Berkovits, dirigeant
de l’American Colony. Arrivé de
Londres il y a quarante ans, et em-
bauché comme comptable, il pré-
side aujourd’hui le conseil d’admi-
nistration de l’établissement et
manie aussi bien l’anglais que
l’hébreu et l’arabe. Signe du posi-
tionnement de l’American Colony,
l’ex-Premier ministre Tony Blair y
a passé de longs séjours lorsqu’il
était l’envoyé du quartet (ONU,
Etats-Unis, UE et Russie) dontl’ob-
jectif était alors de réveiller le dia-
logue israélo-palestinien. Toute-
fois, quelques années plus tôt, le
même Tony Blair, alors chef du
l’American Colony à Jérusalem-Est. L’hôtel revendique un positionnement axé sur la «neutralité».