Coup de Pouce - (09)September 2020

(Comicgek) #1
Quel effet cela aura-t-il sur l’organisation de la ville,
sur l’offre de services?» Il est vrai que nous nous
sommes tous promenés dans notre quartier et avons
acheté localement, dans les épiceries, pharmacies,
boutiques et magasins près de chez nous.
Gestionnaire dans une petite compagnie sher-
brookoise, Myriam croyait plus ou moins aux vertus
du télétravail. Or la pandémie l’a forcée à réviser sa
position! «Notre vingtaine d’employés a d’abord tra-
vaillé de la maison, puis on a invité chacun à revenir
au bureau... Peu d’entre eux se sont montrés intéres-
sés!» L’efficacité a-t-elle été au rendez-vous? Myriam
n’hésite pas: «Oui! Ça s’est beaucoup mieux passé que
ce à quoi je m’attendais.» Elle ajoute que les liens se
sont même renforcés: elle et ses collègues de la direc-
tion ont décidé de soutenir au maximum tous les
employés pendant la crise. Ils ont entre autres fait
livrer des chaises ergonomiques à tous ceux qui le
souhaitaient... et sont allés eux-mêmes porter des
plantes vertes en cadeau aux domiciles de leurs em-
ployés. «C’était pour leur rappeler qu’on pense à eux»,
raconte Myriam.

Selon Rose-Marie Charest, «plusieurs se sont
révélés» pendant la crise du coronavirus. «La moti-
vation intrinsèque est importante, note-t-elle. Et en
télétravail, personne n’est surveillé. Malgré cela, les
gens, habités par le sentiment de vouloir se réaliser,
de rendre service, quel que soit le domaine, ont tra-
vaillé très fort.» Anne-Marie, pigiste dans le domaine
des communications depuis 10 ans, a ressenti très fort
ce désir d’aider. En début de crise, elle a repoussé ses
contrats pour aller prêter main-forte dans un CHSLD,
où les besoins étaient criants. «J'ai découvert que je
suis faite pour travailler en santé, et particulièrement
auprès des aînés et des personnes vulnérables. Je
songe à me réorienter», témoigne-t-elle.

DES INÉGALITÉS EXACERBÉES
Pour Hélène Belleau, sociologue et professeure à
l’Institut national de la recherche scientifique, la pan-
démie a révélé toutes les inégalités de notre société,
qu’elles soient de genre (le partage des tâches, la
conciliation et la charge mentale portés majoritaire-
ment par les femmes), de revenu (que l’on pense aux
pertes d’emplois), de race (les femmes immigrantes
font partie du groupe de la population le plus appelé
au front) ou de génération (les personnes âgées iso-
lées dans les CHSLD)... «On a pris conscience de ces
inégalités, affirme Mme Belleau. Le confinement aura
eu des conséquences négatives, comme des sépara-
tions, des divorces et une hausse du décrochage sco-
laire; et des effets positifs, comme la popularité du
télétravail et la relance de la solidarité familiale.»
Que garderons-nous de tout cela? «Le premier ré-
flexe, ce sera de reprendre nos vieilles habitudes,
avance Daniel Weinstock. L’être humain n’aura pas
changé fondamentalement; sa nature va revenir au
galop. Par ailleurs, je crains que la grande frustration
liée aux restrictions et à la perte de droits causera une
explosion de consommation et de déplacements...
alors que le problème du réchauffement climatique est
toujours là!»
Alors qu’Hélène Belleau croit que la pandémie can-
tonnera les gens dans leurs positions, Rose-Marie
Charest allègue qu’elle pourrait avoir permis une cer-
taine prise de conscience. «On a peut-être été forcés
de vivre ensemble, confinés, pendant tout ce temps,
dit-elle, mais au fond, chacun vit sa vie et cherche
l’équilibre. Les liens, dans certaines familles et cer-
tains couples, seront extrêmement solides à la suite
de cette phase.» Reste à voir ce qu’une deuxième vague
potentielle de COVID-19 apportera en réflexions...
et transformations. • PHOTO: GETTY IMAGES/E.

Je ne veux clairement pas
revenir au rythme d’avant. Je veux
moins de stress dans ma vie, bouger,
être avec ma famille. Et être moins
dans la performance.»


  • Anouk | La Prairie


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SEPTEMBRE 2020
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