108 Méditerranée - Mer vivante
Gardons la mer vivante
On trouve les vélelles au large d’à peu près toutes
les mers chaudes et tempérées du globe. Par
temps calme, telles de petits voiliers, elles flottent
et dérivent à la surface des eaux. Ce mode de
déplacement donne à ces petits animaux leur
nom scientifique (Velella velella, de velum : voile)
comme leurs noms communs (« Vélelles » chez
nous, « By-the-wind-sailor » pour les anglophones,
« Barchetta di San Pietro » pour les italiens).
Entraînées par les vents et courants de surface,
leur dernière destination est souvent une plage!
Certaines années (généralement au printemps en
Méditerranée), des millions de ces petites méduses
s’échouent sur nos rivages. Au niveau du ressac,
elles peuvent alors former un ruban bleu large de
© Jean-Claude WOLLES © David LUQUET
Coquille molle et translucide du Cymbulia peronii Le mollusque : Cymbulia peronii
Jean-Michel Cottalorda, ingénieur à Université Côte d’Azur(CNRS UMR 7035 « ECOSEAS »)
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Qu’elle est cette délicate « structure »
transparente? Une sculpture moderne? La
création d’un talentueux joaillier? Un sabot de
cristal oublié par une minuscule sirène?
Que cache ce nom plein de poésie? Sur terre, ce
nom désigne une superbe orchidée. En milieu
marin, il fait référence à la coquille molle d’un
petit gastéropode planctonique de 4 à 6,5 cm de
long : le Cymbulia peronii. Transparente, cette
coquille à la consistance de caoutchouc, ressemble
à un casque triangulaire allongé, bordé de petites
pointes. C’est l’équivalent de la coquille calcaire
dont sont munis la plupart des autres mollusques.
Ce petit animal, également désigné sous
l’appellation de « Papillon de Mer », vit et nage
librement en haute mer. Son corps, logé dans le
creux de la coquille molle, comporte deux lames
musclées dirigées vers l’avant. En battant comme
des ailes, ces extensions le propulsent en pleine
eau, sans toutefois lui permettre de lutter contre le
courant. Il se nourrit d’organismes planctoniques.
Après la mort du mollusque, sa coquille flotte un
certain temps et s’échoue parfois sur le rivage.
Vous pouvez la toucher sans crainte. Trempez là
dans l’eau : vous serez surpris de la voir disparaître
tant la matière organique de cette coquille molle
est translucide.
Le sabot de Vénus Cymbulia peronii
plusieurs dizaines de centimètres sur plusieurs
kilomètres de long!
Pour les scientifiques, ces échouages massifs
seraient dus à la combinaison de facteurs favorables
à la croissance et à la multiplication de ces petits
organismes (température, nourriture en quantité..).
Sur le rivage, les vélelles meurent et pourrissent
rapidement. Ceci explique l’odeur « nauséabonde »
qui se propage parfois lorsqu’elles sèchent en
grande quantité sur nos plages. Aucun danger pour
les baigneurs en tous cas. Le poison urticant de
ces petites méduses est inoffensif pour l’homme.
Il est cependant déconseillé de les toucher puis
de se toucher le visage ou les yeux, sous peine
d’irritations!