J'irai manger des khorovadz

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J'irai manger des khorovadz

Nous retournons ensuite en voiture à l’endroit où est garé mon vélo.
Eux aussi partent en voyage : devant leur église un bus les attend avec
d’autres personnes. Après les dernières photos nous nous saluons avec
beaucoup d’émotion. Je ne sais comment les remercier. Leur bébé de
quelques mois dans les bras je les vois encore rejoindre le groupe tenant
à la main un vulgaire sac plastique contenant leurs effets. Pas de sac à
dos ni de bagage de marque. Un dernier signe en guise d’au revoir et ils
disparaissent en montant les marches du bus. Je reste seul et désemparé
avec le gardien des lieux en finissant de ranger mes affaires. Le calme
après l’effervescence une impression de vide après ce moment
relationnel intense. Pourrais-je encore éprouver des moments plus forts?
Dans la simplicité ce couple irradie d’amour pour les autres. Pas
besoin de mots. Juste l’envie de le vivre. Je ne regrette pas d’avoir perdu
mon téléphone... même si ma femme qui ne peut plus me joindre n’est
pas du même avis! Que valent quelques grammes de technologie face à
des tonnes d’amour? Une leçon dans ce monde où l’on privilégie
souvent la possession à la relation.


J’envisageais de passer par Tiraspol la capitale de ce pays qui n’existe
pas : je vais la contourner par inadvertance en suivant les panneaux de
direction qui me dirigent vers Odessa. Peut-être la mauvaise signalisation
n’a-t-elle d’autre but que de faire éviter cette ville aux voyageurs. En
traversant la Transnistrie on croirait effectuer un saut en arrière dans
l’histoire des pays de l’Est. Ambiance quelque peu lugubre voire
sinistre. Beaucoup de militaires et de policiers peu d’activité rigueur
soviétique oblige. Ce territoire russophone et communiste appartient
officiellement à la Moldavie. Sur ces terres la Russie maintient en
permanence près de 2 000 soldats. On le surnomme aussi « plaque
tournante du trafic de personnes d’armes et de drogues » « trou noir de
l’Europe » ou « dernier bastion soviétique ». Un endroit oublié sans
liberté de presse que Jean-Baptiste Naudet^55 qualifie de « véritable
conservatoire historique ». La Transnistrie qui abritait d’importantes


(^55) Grand reporter à l’Obs.

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