Le Monde - 02.10.2019

(Michael S) #1

6 |


RENDEZ-VOUS
LE MONDE·SCIENCE & MÉDECINE
MERCREDI 2 OCTOBRE 2019

DES BIBERONS
PRÉHISTORIQUES

Au fil des années, des fouilles
archéologiques ont mis au jour,
sur différents sites préhistoriques
d’Europe, des petits récipients en
poterie dotés d’un bec verseur,
comme ceux que l’on voit sur
cette photographie. Servaient-ils
à nourrir des personnes âgées,
des malades ou des bébés?
Dans une étude publiée mercredi
25 septembre par Nature, une
équipe internationale explique
avoir analysé les résidus de lipi-
des présents sur des poteries de
l’âge du bronze et du fer trouvées
dans des tombes d’enfants en
Allemagne. Les résultats indi-
quent que ces pièces de vaisselle
avaient probablement contenu
du lait de ruminants domesti-
qués. Bien que ce lait n’ait pas les
mêmes qualités nutritives que le
lait maternel et que, non pasteu-
risé, il ait risqué d’entraîner des
contaminations bactériennes,
les auteurs pensent qu’il a pu être
utilisé comme complément
alimentaire pour les enfants en
bas âge, notamment au moment
du sevrage des nourrissons.
(PHOTO : KATHARINA REBAY-SALISBURY)

E. BUSSER, G. COHEN ET J.L. LEGRAND © POLE 2019 [email protected]

La puissance des nombres consécutifs


Bob pose un petit problème arithmétique à Alice.


  1. 32 761 est le carré de 181, mais aussi la différence de deux cubes consécutifs. Lesquels?
    Alice trouve rapidement. Bob poursuit :
    « Drôle de coïncidence : 181 = 9^2 + 10^2 s’écrit comme la somme de deux carrés consécutifs.



  • Ce n’en est pas une. Regarde : 1^3 – 0^3 = 1 = 1^2 et 1 = 0^2 + 1^2 ; 8^3 – 7^3 = 169 = 13^2 et 13 = 2^2 + 3^2. Si la différence de deux
    cubes consécutifs est le carré d’un entier, cet entier est toujours la somme de deux carrés consécutifs. »



  1. Alice a-t-elle raison?


Solution du problème 1113



  1. On peut former 35 triangles de fils tendus.
    C’est le nombre de façons de choisir trois points parmi
    sept. Une partie de ces triangles peuvent cependant être
    aplatis dans certaines configurations.

  2. Les plus petits triangles ont une aire maximale quand
    les segments orange et verts mesurent 40 et 60 cm.
    On pose, avec les notations
    de la figure, x+ y+ z = 1
    (il suffira ensuite de multi-
    plier les longueurs par 240).
    En supposant x< z, les trois
    triangles de plus petite aire
    (à une rotation de 120°
    près) sont ceux qui sont
    colorés. On fait l’hypothèse
    (difficile à démontrer en
    quelques lignes) que la plus petite aire sera maximale
    quand ces trois triangles auront la même aire.
    Deux rappels pour suivre les calculs ci-dessous :



  • O se trouve à √3/6 de chaque côté (le tiers de la hauteur) ;

  • l’aire d’un triangle de côtés aet bautour d’un angle de
    60° est ab√3/4. On calcule alors les aires des trois triangles.

  • Le bleu : OEH = EBH – OBH – OBE
    = (1–x)(x+y)√3/4 – (1+y)√3/12

  • L’orange : ODI = OBD + OBI – BDI
    = (1–y)√3/12 –x(1–x–y)√3/4

  • Le rouge : FGH = xy√3/4
    L’égalité des trois aires donne x= 1/6, y= 7/12 et z= 1/4 (à
    multiplier par 240 cm), chacune des aires valant 7√3/288.


FÊTE DE LA SCIENCE
DU 5 AU 13/10 (FIN)


  • Occitanie (suite)

    • Conférence Comment mentir avec des gra-
      phiques? le 05/10 à 16 h 30 à l’espace Recol-
      lets à Caussade (82). Réflexion sur
      l’utilisation des représentations graphiques
      dans les medias.



  • Atelier L’icosaèdre dans tous ses états, du
    ballon de foot au C60,le 12/10 à 10 h, à l’uni-
    versité de Perpignan, via Domitia. La
    science racontée au travers des maths avec
    un ballon de foot et une molécule géante
    de fullerène C60, en découpages et collages.
    Informations sur http://www.fetedelascience.fr
    FÊTE DES MATHS LE 06/10
    À BEAUMONT-DE-LOMAGNE
    En marge de la Fête de la Science 2019, c’est
    la Fête des Maths, dimanche 6 octobre, à


Beaumont-de-Lomagne. Les animations de
cette journée, de 10 h 30 à 18 h, seront
consacrées aux mathématiques et à leur
lien avec la météo et la climatologie.


  • Dans la maison de Fermat

  • 11 h, salle de conférences, Exploramath,
    one-man-show de Manu Houdart.

  • 14 h, conférence de Christian Tschocke sur
    le climat et la thermodynamique.

  • 16 h 30 à la Cave, Les conteuses de Lomagne.

  • Dans la salle des fêtes et sur le parvis
    Jeux par Tour de Jeux, animations par
    Fermat-Science, atelier Les maths et la neige
    par Les maths en vrac, météo et maths par
    Maths en Scène, origami par Oreille de lapin,
    jeux de logique par Pose ton pion, casse-
    tête par Prise de tête, magie par Dominique
    Souder, jeux mathématiques par l’IRES de
    Toulouse...
    Informations sur http://www.fermat-science.com


CONFÉRENCE MATHS AUTOUR
D’UN PIANO À NANCY LE 17/10
L’étude des sons musicaux remonte à l’An-
tiquité avec l’explication du fonctionne-
ment des cordes vibrantes par Pythagore.
Dans cet exposé du cycle de conférences
« Sciences et société » (jeudi 17/10 à 20 h 30
à l’IUT Nancy-Charlemagne), Patrick Joly
présentera quelques notions de physique
du son et quelques outils mathématiques
permettant de décrire et d'analyser ces sons.
Il montrera, au travers d'illustrations
visuelles et sonores, comment ces outils et
l’utilisation d'ordinateurs permettent de
produire des sonorités synthétiques réa-
listes et même de simuler le fonctionne-
ment d’un instrument de musique
particulièrement complexe : le piano de
concert.
Informations sur http://www.iecl.univ-lorraine.fr

N° 1114

A

O

B C

H

D E

F

I

G

x

x

x
z

z

z

y

y y

E V É N E M E N T
Fête de la science
Pour sa 28e édition, la Fête de la science,
qui se tient en France métropolitaine
du 5 au 13 octobre, et en outremer du 9 au
17 novembre, propose plus de 6 000 anima­
tions gratuites, ouvertes à tous les publics :
conférences, visites de laboratoires, de
musées ou de centres d’information scienti­
fique, de sites industriels... De quoi satisfaire
tous les goûts et toutes les curiosités.
> Programme interactif des manifestations :
Fetedelascience.fr

LE LIVRE


Stephen Hawking, 


une vie en BD


Jim Ottaviani et Leland


Myrick utilisent le roman


graphique pour retracer


le parcours du célèbre


physicien britannique


A


près avoir raconté, en 2012, la vie du
brillant physicien américain Ri­
chard Feynman sous la forme d’un
roman graphique – autre nom pour dési­
gner une bande dessinée au long cours –,
l’auteur Jim Ottaviani et l’illustrateur Leland
Myrick reprennent du service pour s’atta­
quer à une autre icône de la physique, le Bri­
tannique Stephen Hawking (1942­2018).
Chacun garde en mémoire l’image fasci­
nante de cet homme malingre au visage dé­
formé par un rictus, cloué dans un fauteuil
roulant par la maladie de Charcot qui l’a pro­
gressivement privé de l’usage de ses mus­
cles, ce qui ne l’empêchait pas de jongler en
esprit avec l’Univers et ses objets les plus
étranges, les trous noirs.
C’est Stephen Hawking en personne qui
narre sa propre histoire, laquelle commence
bien avant que la maladie ne le frappe, dans
un Royaume­Uni en proie à la seconde
guerre mondiale. L’histoire d’un enfant puis
d’un étudiant espiègle, fan de science et de
paris, qui convoque dans sa vie les géants
qui l’ont précédé, Newton et Einstein, sur les
épaules desquels il grimpe pour voir plus
loin qu’eux, ainsi qu’il aimait – assez immo­
destement – à le dire. L’histoire enfin d’un
explorateur dont les recherches éclosent en
plein âge d’or de la cosmologie, où des idées
un peu folles (le Big Bang, l’expansion de
l’Univers, les trous noirs...) sont devenues
plausibles grâce au développement de la
théorie et de l’astronomie instrumentale.

Coupé du monde
La forme graphique permet de suivre en
parallèle le quotidien de Stephen Hawking,
rendu de plus en plus difficile par la dégra­
dation de son état de santé – chutes, canne,
béquilles, escaliers montés à quatre pattes,
fauteuil roulant, synthétiseur vocal – et son
obstination à élaborer de nouveaux con­
cepts. La maladie le coupe du monde mais,
quand il ne peut plus tenir un crayon ou une
craie, des assistants de luxe, jeunes doc­
teurs, font les calculs à sa place. Tout est inté­
riorisé et, même chez lui, en famille, il passe
des heures à faire de la physique dans sa tête,
au point, imaginent avec audace les auteurs,
de voir sa première épouse, Jane, comme
une modélisation 3D...
Stephen Hawking n’a cessé de vouloir pro­
duire une nouvelle physique réconciliant la
relativité générale – théorie de la gravitation,
qui décrit l’Univers aux grandes échelles – et
la mécanique quantique, qui étudie les phé­
nomènes physiques à l’échelle de l’infini­
ment petit. Ce Graal reste à trouver, mais il
faut donner crédit à Ottaviani et Myrick de ne
pas s’être dérobés devant l’immense com­
plexité du sujet, profitant de la forme graphi­
que pour tenter d’illustrer les concepts théo­
riques que leur héros a fouillés. Reconnais­
sons que le résultat est parfois difficile à com­
prendre, mais sûrement moins que le best­
seller de Stephen Hawking, cette Brève
histoire du temps vendue à des millions
d’exemplaires, dont il est permis de douter
que les propriétaires l’aient, pour la plupart
d’entre eux, jamais lue jusqu’au bout...
pierre barthélémy

Hawking, de Jim Ottaviani et Leland Myrick
(La Librairie Vuibert, 300 p., 24,90 €).

L’AGENDA


DIX MILLE PAS ET PLUS


TROP D’ENTRAÎNEMENT PHYSIQUE


NUIT AU CERVEAU


Par SANDRINE  CABUT


B


aisse inexpliquée des performances ; fatigue
persistante ; perte d’appétit et de poids ;
troubles du sommeil, de l’humeur... A trop
forte dose, l’activité peut, comme tout médica­
ment, devenir délétère. C’est le syndrome de suren­
traînement, qui touche des athlètes professionnels
mais aussi des amateurs de sport d’endurance pra­
tiquant de façon très intensive. Si le sujet reste sou­
vent tabou chez les champions, ce syndrome, qui
correspond à une situation chronique, et le surme­
nage – sa forme débutante et plus facilement réver­
sible – sont loin d’être exceptionnels. Chez les cou­
reurs à pied, le risque de survenue d’un tel épisode
irait ainsi de 30 % à 60 % sur l’ensemble de leur car­
rière sportive. Il s’agit aussi d’un sujet de préoccu­
pation pour les entraîneurs de sportifs juniors :
environ un tiers des jeunes pratiquant à haute dose
seraient concernés.
Mais que se passe­t­il dans le cerveau des athlètes
quand leur corps est fatigué? C’est ce qu’a exploré
l’équipe de Mathias Pessiglione (Institut du cerveau
et de la moelle épinière, Paris) chez 37 triathlètes de
niveau compétition, s’entraînant au moins dix heu­

res par semaine. Les résultats viennent d’être publiés
dans la revue Current Biology, le 26 septembre.
Dans une étude précédente, les chercheurs français
avaient montré qu’une surcharge de travail intellec­
tuel, induite sur une journée, affecte le système de
contrôle cognitif (PNAS, 2016). Sollicités par l’Institut
national du sport, de l’expertise et de la performance
(Insep), ils ont reproduit leurs mesures chez des
triathlètes. La moitié d’entre eux ont conservé leur
niveau d’entraînement, l’autre groupe a été soumis
pendant trois semaines à des séances dont la durée
était allongée de 40 %, pour induire un surmenage.
Pendant le protocole, d’une durée de neuf semai­
nes, on a mesuré les performances cognitives des
volontaires par des exercices de mémoire de travail
et d’alternance de tâches, et les évaluations de leur
« impulsivité économique » par des questions du
type : préférez­vous gagner 30 euros maintenant ou
50 dans une semaine? Certains tests ont été réalisés
lors d’une IRM fonctionnelle. « Nous avons retrouvé
dans cette population de sportifs les deux mêmes
marqueurs de fatigue cognitive que nous avions iden­
tifiés en induisant une surcharge intellectuelle, expli­
que Bastien Blain, premier auteur de l’article dans
Current Biology. Sur le plan comportemental, la baisse

de contrôle cognitif se traduit par une impulsivité,
avec recherche de récompenses immédiates. Et sur le
plan neuronal, on observe une diminution d’activité
du cortex préfrontal latéral gauche, une zone impli­
quée notamment dans le contrôle de soi. » Ces méca­
nismes pourraient expliquer la tentation du dopage,
selon les auteurs. L’étude a d’ailleurs été financée par
l’Agence française de lutte contre le dopage.
Pour Sébastien Ratel, enseignant­chercheur en
physiologie de l’exercice à l’université Clermont­
Auvergne, qui n’a pas participé à l’étude, les consé­
quences du syndrome de surentraînement ont été
bien étudiées sur le plan clinique, hormonal, im­
munitaire... Mais l’intérêt de ce travail est d’avoir
décrypté ce qui se passe dans le cerveau, et caracté­
risé la perte de lucidité observée chez certains spor­
tifs. « Le principe de l’entraînement est d’augmenter
progressivement la charge de travail et d’amener l’or­
ganisme à supporter la fatigue pour élever le niveau
de performance, mais si la récupération n’est pas
bien gérée, on peut entrer dans le cercle vicieux du
surentraînement, poursuit M. Ratel. A l’heure où les
entraîneurs en demandent de plus en plus, et de plus
en plus tôt aux sportifs, la prévention de ces risques
est un enjeu majeur ».

AFFAIRE DE LOGIQUE – N° 1114

Free download pdf