ticle intitulé : «La grande
Rome des Tarquins». Presque tout
le monde l’avait un peu dénigré,
au moment où l’on pensait qu’il
ne s’était rien passé d’important
sur le site aux sept collines du VIIIe
au VIe siècle av. J.-C. Or, les ana-
lyses de Pasquali ont été confir-
mées par les recherches et les
découvertes les plus récentes,
notam ment celles qui concernent
le mur dit de Servius Tullius, l’une
des premières constructions d’en-
vergure de la ville.
Le deuxième monument ma-
jeur de cette Rome royale, le Cir-
cus Maximus, le «grand cirque» ou
«grand hippodrome», est quant à
lui évoqué dans de nombreux
textes même si l’on n’en a pas re-
trouvé trace dans le sol. A Tarqui-
nia, une fresque peinte dans la
tombe dite des Biges, datant du
VIe siècle avant notre ère, et donc
de la période des rois Tarquins,
nous montre des spectateurs as-
sistant à des courses de chars...
Cela atteste qu’à cette époque, il
existait des tribunes de bois et des
pistes de sable où pouvaient se dé-
rouler des compétitions sportives.
Nier la possibilité d’une telle struc-
ture de spectacles dans la Rome
royale serait comme nier la réa-
lité des tournois médiévaux sous
prétexte qu’on ne retrouve pas les
tribunes des tournois mention-
nées dans les écrits.
Par ailleurs, la présence de nom-
breux fragments de tuiles accré-
dite l’existence de palais aristocra-
tiques et de temples au VIe siècle
avant notre ère, à commencer
par le temple de Jupiter Optimus
Maximus, dont il subsiste les restes
du podium. Déjà, sous la royauté,
la ville possède donc la plus
grande enceinte de toutes les
villes d’Occident et l’un des plus
grands temples de la Méditerra-
née occidentale... C’est une ville
dans laquelle vivent au moins
40 000 habitants, soit l’échelle de
Syracuse ou d’Athènes.
notre ère existait sous le Forum.
Il y a une dizaine d’années, sous
le Forum de César, on a décou-
vert les traces incendiées de deux
hôtels particuliers qui ont été brû-
lés lors du sac. Ainsi, le choix par
Jules César de construire son Fo-
rum à cet endroit, vers le milieu
du Ier siècle av. J.-C, n’est pas le
fait du hasard. C’était une ma-
nière de dire aux Romains : «J’ai
vaincu les Gaulois, et avec leur
argent, je vous offre un nouveau
Forum à l’endroit même où ils
avaient osé occuper le sol de
«À PARTIR DU II
E
SIÈCLE AVANT NOTRE ÈRE, ELLE DEVINT
Le professeur en
contemplation
devant une carte
de l’Italie ancienne.
Selon lui, «Rome
est une cité dont
l’histoire se traduit
en monuments.
Et où les monu-
ments sont autant
d’événements».
Après l’exil de Tarquin le Superbe
en 509 av. J.-C., Rome devient
une République. Un monument
incarne-t-il en particulier
ce changement de régime?
Durant les cinq siècles qui sé-
parent la chute de la monarchie
de l’avènement de l’Empire, un
lieu majeur apparaîtra aux yeux
des Romains comme le symbole
de l’avènement de la res publica
libera : le temple de Jupiter, sur
le Capitole. De très longs travaux
avaient été nécessaires pour la
construction du sanctuaire, qui
aurait été terminé juste au mo-
ment où le dernier des rois prit
le chemin de l’exil. C’est donc la
toute jeune République qui pro-
céda à la dédicace du temple, sans
doute une «redédicace». Il y avait
donc ainsi coïncidence parfaite
entre le commencement de la
République et l’entrée en service
du principal édifice sacré de la
ville, entre l’ère post reges exac-
tos («après le bannissement des
rois») et l’ère post aedem Capi-
tolinam dedicatam («après la dé-
dicace du temple capitolin»).
Comme souvent à Rome, on voit
ici que le paysage urbain joue un
premier rôle dans l’avènement
d’un régime politique.
Quel fut l’impact du «sac» de
Rome par le peuple gaulois des
Sénons en 390 av. J.-C.?
Il y a vingt-cinq ans, j’ai écrit que
ce ravage et que cet incendie de
Rome par cette tribu gauloise
venue de la plaine du Pô étaient
un mythe. Aujourd’hui, je dois dire
que je me suis trompé. Des histo-
riens, comme le Grec Théopompe
(403-320 av. J.-C.), ont écrit sur
cet événement seulement un
demi-siècle après, et donc, les
Romains n’ont pas pu le cacher.
Des chercheurs ont retrouvé des
rapports datant de 1890 à 1920,
lesquels racontent qu’une couche
de cendres d’un mètre d’épais-
seur et datant du IVe siècle avant
118 GEO HISTOIRE
L’ENTRETIEN