Les Echos - 02.03.2020

(nextflipdebug2) #1
clients de Manty, d ont la plateforme
aide à faire vivre leurs millions de
données mal ou inexploitées. Les
investisseurs croient en son adé-
quation avec le marché et viennent
de lui confier 2,4 millions d’euros,
lui permettant d’envisager un déve-
loppement plus rapide.
« Notre entreprise tournait, nous
étions rentables, mais nous avons
souhaité accélérer, explique
Mathieu Nohet, son fondateur et
directeur général. Nous avons
besoin de nous faire connaître davan-
tage et d’ajouter de nouvelles fonc-
tionnalités comme la prédiction, ce
qui demande des capitaux. »
A ce jour, Manty travaille avec
une cinquantaine de collectivités,
dont des villes comme Rambouillet
ou Biarritz, ainsi que des métropo-

les comme celle de Clermont-
Ferrand. C’est avec Courbevoie que
la jeune pousse a démarré son acti-
vité, en 2017. Avec un projet n uméri-
que au point mort, son DSI s’est
tourné vers les fondateurs et les a
hébergés au sein de la mairie
durant six mois p our développer un
premier produit capable de fournir
aux élus, aux décideurs et aux
agents publics des informations
d’un nouveau genre et présentées
de manière accessible à des novices
de la tech.

Un secteur en plein essor
Av ec un modèle économique basé
sur la vente d’une licence d’utilisa-
tion de son logiciel, la jeune pousse
a rapidement trouvé ses premiers
clients et s’est fait référencer par

l’Ugap, la centrale d’achats publics
de référence pour les acheteurs
publics. C haque a nnée, ces derniers
dépensent tout de même 16 mil-
liards d’euros dans des solutions
technologiques, selon Public,
l’accélérateur qui accueille Manty.
« Notre projet suscite encore d es réac-
tions mitigées de la part des investis-
seurs, avoue l’entrepreneur. L’idée
que le marché est petit est difficile à
désamorcer et leur perception du s ec-
teur public est encore trop négative. »
Pourtant, des modèles d’entre-
prises tournées vers le secteur
public commencent à émerger à
travers le monde. A l’image d’Open-
Gov, qui édite aussi une solution de
logiciels dans le cloud pour amélio-
rer la budgétisation et les perfor-
mances des entités publiques. Sou-

tenue par le fonds star de la Silicon
Valley Andreessen Horowitz, elle a
levé un total de 128 millions de dol-
lars et équipe plus de 2.000 agences
aux Etats-Unis. Pour que Manty
puisse envisager une trajectoire
analogue, il faudra que les élus sor-
tis des urnes le 22 mars prochain
comprennent l’intérêt d e ce mouve-
ment mondial vers une meilleure
utilisation de leurs données.
— G. B.

4
À NOTER
Pour ce tour de financement,
Manty s’est appuyé
sur la Banque des Territoires,
Axeleo Capital
et Kima Ventures.

A trois semaines du deuxième tour
des élections municipales, une
start-up française sera particulière-
ment attentive aux résultats. En
jeu? Identifier les élus qui seront
plus ou moins enclins à compren-
dre l’intérêt des outils numériques
pour mieux gérer leurs collectivi-
tés. Et devenir potentiellement


NUMÉRIQUE


La start-up
tricolore vient de lever
2,4 millions d’euros
pour développer
son outil de gestion
et de prédiction dédié
aux acteurs publics.


Manty en quête de nouvelles collectivités


lFrance Digitale a donné l’occasion


à tous les candidats de présenter leurs


axes de réflexion pour faciliter l’essor


des jeunes pousses au sein de la capitale.


lLes mesures concrètes sont peu nom-


breuses et, pour certains, la méconnais-


sance du premier secteur pourvoyeur de


nouveaux emplois en 2020 est alarmante.


Les candidats à la Mairie de Paris

peinent à séduire les start-up

Les candidats à la Mairie de Paris sont venus, jeudi 27 février, à Station F présenter leur vision des start-up et la manière
dont ils pourraient aider à leur éclosion au sein de la capitale. Phot o Margot L’Hermite

Guillaume Bregeras
@gbregeras


L’affiche était belle : tous les candi-
dats à la Mairie de Paris, ou leur
représentant, s’étaient donné
rendez-vous à Station F jeudi
27 février pour présenter leur
vision des start-up et la manière
dont ils pourraient aider à leur éclo-
sion au sein de la capitale. A l’invita-
tion de France Digitale, l’associa-
tion qui regroupe entrepreneurs et
investisseurs, les prétendants ont
multiplié les marques d’intention,
mais se sont montrés bien peu pro-
lixes en propositions concrètes.
Au cœur de leurs préoccupa-
tions, plusieurs thèmes dont celui
de la mobilité. Pour Emmanuel
Grégoire, premier adjoint d’A nne
Hidalgo, le conseil des mobilités qui
a été créé sous la mandature de la
Maire de Paris doit être amélioré.
Conscient de la « confusion » créée
par le sujet des trottinettes, il assure
continuer à vouloir s’appuyer sur
les pépites parisiennes pour rendre
plus harmonieux l’espace urbain :
« Nous voulons donner un coup de
pouce pour lancer les projets car
vous, les start-up, êtes le cœur du
réacteur des emplois de demain. »
De son côté, Cédric Villani prône
l’incorporation de toutes les formes
de mobilité dans un seul outil et
bénéficiant d’une seule tarification.


Agir sur l’inflation
de l’immobilier de bureaux
Au tre sujet récurrent, notamment
porté par les entrepreneurs venus
interroger sur scène les candidats :
l’immobilier. Face à une raréfaction
et une envolée des prix, ils se trou-
vent le plus souvent contraints de
consacrer jusqu’à 10 % de leur levée
de fonds à ce poste. Emmanuel Meu-
nier, porte-parole du candidat David
Belliard, invite à « grossir la focale
et penser à l’échelle du Grand Paris et
de la région » pour résoudre ce pro-
blème. Cédric Villani annonce quant
à lui vouloir mettre des locaux à dis-
position des pépites de la civictech,
tandis qu’Emmanuel Grégoire


INVESTISSEMENTS


« Notre projet
suscite encore
des réactions
mitigées de la part
des investisseurs. »
MATHIEU NOHET
Fondateur et directeur général
de Manty

n’avance pas de projet spécifique,
préférant assurer que « la Mairie
continuera de travailler sur le par-
cours immobilier », notamment
durant la phase d’amorçage des
projets comme il l’a déjà fait.

Parmi les vœux de France Digi-
tale, celui de réserver 20 % des
marchés publics aux start-up. Une
proposition que ne reprendra pas
Danielle Simmonet, candidate La
France insoumise : « Je ne m’y enga-
gerai pas. I l faut d ’abord savoir s i elles
répondent à l’intérêt général et si leur
taille est adaptée au marché. Je me
souviens de Smoove dont la sélection
pour gérer les vélos a entraîné un
fiasco. Pour ma part, je travaillerai
davantage sur la manière de créer de
petits allotissements pour favoriser
leur a ccès. » De son c ôté, Gilles Men-
tré, représentant Rachida Dati, veut
reproduire le Small Business Act
négocié au niveau de la région,
notamment dans le cadre de la
création d’une « ville intelligente ».
La ville connectée, voilà une des
solutions abordées par les candi-
dats pour tenter de résoudre le pro-
blème de la propreté à Paris. Paul
Midy, représentant Agnès Buzyn,
veut s’appuyer sur des solutions
déjà éprouvées, comme celle mise
en place à Santander en Espagne
« et qui a permis de réduire d e 65 % l e
coût de la collecte des déchets ». Un
sujet auquel Emile Meunier veut
également s’attaquer « en connec-
tant les poubelles, les cendriers et les
camions de ramassage afin d ’optimi-
ser les tournées ». Tout cela appa-
raît encore bien mince et imprécis
face aux enjeux que représentent
les start-up, dont plus de la moitié
des 25.000 emplois nets qui seront
créés cette année en France seront
concentrés à Paris.n

La ville connectée,
voilà une des
solutions abordées
par les candidats
pour tenter de
résoudre le problème
de la propreté à Paris.

« Fournir une boîte à outils aux maires élus »


Po urquoi interpellez-vous
les futurs élus locaux?
Nous partons du même constat
que pour la présidentielle ou les
européennes : le numérique fait
partie du quotidien des gens,
mais par frilosité ou manque
d’expérience en la matière les
personnalités politiques ont
encore du mal à s’attaquer à ce
sujet. L’objectif d’une telle opéra-
tion est de les interpeller, de
manière bienveillante, afin qu’ils
s’en emparent.

Que demandez-vous
précisément?
Notre manifeste a été rédigé
après avoir consulté des centai-
nes d’entrepreneurs, afin de
fournir une boîte à outils pour
les maires élus. Elle est aparti-
sane, et chaque mouvement
pourra y trouver au moins une
solution à mettre en œuvre.
Parmi les axes majeurs, nous
incitons à considérer la mise en
place d’une clause « start-up »
dans les appels d’offres afin de
favoriser les entreprises techno-
logiques, et nous souhaitons que
20 % de la commande publique

soit fléchée vers elles. Il y a éga-
lement l’ouverture des données,
que nous encourageons, afin
que le citoyen puisse aussi con-
tribuer à la vie publique grâce à
elles. Enfin, l’illectronisme : il
est fondamental de pouvoir lut-
ter contre l’analphabétisme
numérique dès l’école, et cela
représente aussi un enjeu pour
les start-up.

Les candidats que vous avez
croisés en France sont-ils
encore si éloignés
des sujets technologiques
et de l’univers des start-up?
Il existe encore une véritable
impréparation aux sujets numé-
riques. Prenez l’exemple de
l’hébergement des données : les
élus ne se sont parfois même pas
encore posé la question du ris-
que. Mais l’on note beaucoup
d’enthousiasme partout où nous

sommes passés en France. Si les
élus n’avaient pas vu d’emblée
l’apport des start-up pour leur
commune, ils s’y intéressent
vraiment à présent, et leur per-
ception change.

Comment mesurez-vous
l’ampleur du dénigrement
vis-à-vis de la tech
en France? Cela peut-il
nuire à l’expansion
de la French Tech?
Il y a, indéniablement, un mou-
vement croissant contre les très
grandes entreprises de la tech,
mais, paradoxalement, les Fran-
çais sont très attachés à leurs
usages numériques au quoti-
dien. Certaines de ces entrepri-
ses permettent de résoudre de
graves inégalités, comme celle
de l’accès au transport par exem-
ple. Je p ense que la méfiance des
Français se concentre sur les
plus grands groupes, comme
c’est le cas dans d’autres sec-
teurs, à l’image de l’énergie et de
la pharma. Une start-up est
avant tout une PME qui crée des
emplois au niveau local.
Propos recueillis par G. B.

NICOLAS BRIEN
Directeur général
de France Digitale

A


près avoir interpellé les
candidats à la dernière
élection présidentielle
française, France Digitale publie
un manifeste comportant dix
propositions pour faciliter l’essor
des start-up sur l’ensemble des ter-
ritoires. Marchés publics, transi-
tion écologique, mobilités, open
data... France Digitale challenge
les candidats aux élections muni-
cipales afin de les aider à compren-
dre les enjeux des start-up. Et de
l’intérêt qu’il y a à les faire croître
au sein de leurs villes.

« Il est
fondamental
de pouvoir
lutter contre
l’analphabétisme
numérique
dès l’école,
et cela représente
aussi un enjeu
pour les start-up. »

START-UP


Les EchosLundi 2 mars 2020

Free download pdf