28 // PME & REGIONS Mercredi 4 mars 2020 Les Echos
innovateurs
Stanislas du Guerny
— Correspondant à Rennes
Marque collective utilisée par
2.000 producteurs de légumes
frais, Prince de Bretagne fête cette
année ses cinquante ans d’exis-
tence. Occasion pour cette organi-
sation qui regroupe sept coopérati-
ves agricoles, dont la puissante Sica
de Saint-Pol-de-Léon, d’ajouter « les
maraîchers » à son identité graphi-
que. « On veut bien faire comprendre
aux consommateurs que nos pro-
ductions sont toutes familiales et
100 % bretonnes. On se situe très loin
de l’agrobusiness », vante Marc
Keranguéven, le président de
Prince de Bretagne.
S’il est soucieux de montrer que la
marque est uniquement formée de
producteurs locaux, tous indépen-
dants, et attachés à leur terroir, Marc
Keranguéven insiste sur leur difficile
conversion vers le bio et le zéro p esti-
cide, deux méthodes qui se font à pas
comptés. « Pas question de nous pré-
cipiter, les transformations sont tou-
jours risquées pour les producteurs
conventionnels, il leur faut deux
années pour abandonner leurs
rer l’entrée d’un nouvel actionnaire
au capital de Rasec Retail », selon un
proche du dossier.
Spécialiste du mobilier profes-
sionnel sur mesure pour la grande
distribution, Rasec Retail réalise
environ 32 millions d’euros de chif-
fre d’affaires et emploie quelque
240 salariés, répartis entre ses usi-
nes de Romorantin-Lanthenay
(Loir-et-Cher), de Mortagne-sur-Sè-
vre (Vendée) et une petite filiale en
Belgique. « Par voie de conséquence,
la structure de tête Rasec Internatio-
nal Holding devrait être mise en
liquidation dans les semaines à
venir », indique la même source.
Liquidités insuffisantes
A son apogée au début des années
2010, le groupe présidé par Patrick
Gentil a atteint 120 millions d’euros
de chiffre d’affaires et compté jus-
qu’à 900 salariés avec des usines en
Asie et en Europe de l’Est. Il connaît
depuis 2008 des problèmes de liqui-
dités, que ce soit pour financer son
développement international ou
faire face aux crises des pays où il
était implanté. Rasec Retail souffre
pour sa part d’un fonds de roule-
ment insuffisant pour faire face aux
fortes commandes générées par la
mutation actuelle des grandes sur-
faces qui demandent une adapta-
tion du mobilier.
Dominique Malecot
@DMalecot
No uveau coup du sort pour le
groupe Rasec. Le tribunal de com-
merce de Blois a prononcé le lundi
2 mars la mise en redressement
judiciaire de Rasec Retail, son prin-
cipal actif, « pour faciliter et accélé-
CENTRE-
VAL DE LOIRE
Les deux usines de
Rasec Retail, situées
dans le Loir-et-Cher
et en Vendée, sont
placées en redresse-
ment judiciaire pour
faciliter l’entrée d’un
nouvel actionnaire.
cienne implantée depuis 1951 à
Connerré. L’entreprise fut créée par
l’entrepreneur du même nom deux
décennies plus tôt. Après être pas-
sée au sein du groupe suisse Reitzel,
de 2011 à 2016, elle fut reprise par...
Charles Christ, arrière-petit-fils du
fondateur.
En trois ans, cet entrepreneur de
vingt-huit ans, formé à l’école de la
grande distribution, a fait prospérer
l’entreprise de 84 salariés. Les volu-
mes se sont accrus de 37 % pour
dépasser les 8.000 tonnes, soit
12,5 millions de bocaux par an, cor-
respondant à un chiffre d’affaires de
16,3 millions d’euros l’an dernier,
dont la moitié sous marques mai-
son et l’autre sous marques de distri-
buteurs. « Et nous devrions encore
progresser cette année », note Char-
les Christ, soulignant l’appétence
pour les légumes et une sympathie
du consommateur pour les bocaux
en verre, « recyclables à l’infini ».
Pionnier du bio
L’e ntreprise, propose un catalogue
d’une cinquantaine de produits –
pasteurisés ou stérilisés – en plats
cuisinés, notamment la fameuse
choucroute ou le cassoulet, mais
aussi des légumes sous la marque
Gillet C ontres et une g amme de légu-
mes lactofermentés 100 % b io sous la
marque Nutriform, lancée dès 1992.
Pour suivre cette croissance,
Charles Christ a lancé un investisse-
ment de 4,2 millions d’euros à Con-
nerré. Il s’agit notamment de cons-
Date de création : 2016
Directeur général :
Théophile Mohr Durdez
Effectif : 21 personnes
Secteur : cardiologie
Pa ul Molga
— Correspondant à Marseille
Av ec cinq mois de retard causé
par un embouteillage adminis-
tratif, la medtech marseillaise
Volta Medical annonce, ce mer-
credi, avoir obtenu le marquage
CE pour son logiciel d’intelli-
gence artificielle e n cardiologie.
Après une décennie de tra-
vaux, ses quatre cofondateurs,
Julien S eitz, Clément Bars,
Jérôme Kalifa et Théophile
Mohr Durdez, son directeur
général, vont enfin p ouvoir com-
mercialiser leurs algorithmes.
« Nous entrerons en bloc opéra-
toire cet été pour guider les cardio-
logues pendant leur intervention,
avec un objectif d’une vingtaine de
centres d’ici à deux ans », projette
ce dernier. L’algorithme de Volta
Medical s’appuie sur une base d e
données comptant plus de
500.000 exemples de signaux
Volta Medical
électriques. En une fraction de
seconde, il est capable de com-
parer les impulsions enregis-
trées pendant l’opération et de
fournir au praticien la cartogra-
phie précise des dysfonctionne-
ments cardiaques. Avec cette
aide, il peut décider plus précisé-
ment de son geste chirurgical.
Pour mettre au point cette IA,
l’entreprise a déjà obtenu plu-
sieurs subventions et ouvert son
capital, fin 2 018, à Pasteur
Mutualité pour un montant de
2,3 millions d’euros. Elle vient de
décrocher un nouveau finance-
ment de 1,5 million d’euros de
bpifrance, dont un p eu plus de la
moitié en subvention.
Un nouvel essai clinique
Le modèle de Volta Medical a été
validé chez 115 patients : « Notre
objectif est de l’établir comme
norme de soins », explique Théo-
phile Mohr Durdez. Un nouvel
essai clinique randomisé doit
donc être réalisé s ur
350 patients dans une vingtaine
de centres. Pour le mener à son
terme, la société devra à nou-
veau lever des fonds. Mais son
marché prometteur intéresse
les investisseurs : 33,5 millions
d’individus dans le monde souf-
frent de fibrillation auriculaire.
Volta Medical prépare aussi
d’autres applications de son IA
pour repérer les foyers électri-
ques de la tachycardie ventricu-
laire et atriale. Son IA sera com-
mercialisée sous forme de SaaS
(« soft as a service ») en fonction
du volume de patients à dia-
gnostiquer et ciblera d’abord des
prescripteurs renommés.n
LA STRATÉGIE VOLTA MEDICAL
Son IA en cardiologie
obtient le marquage CE
Pa trick Gentil, qui avait pris du
recul ces dernières années, a repris
en main la situation en juin 2019,
suite au décès brutal du directeur
général. Découvrant une situation
catastrophique dans la filiale espa-
gnole, il a fermé cette entité. Après
avoir rappelé aux commandes un
ancien directeur général, les frais
fixes ont été abaissés et les effectifs
réduits de 40 salariés.
La rentabilité d’exploitation était
en voie d’amélioration quand la
société d’affacturage travaillant
pour Rasec a opéré en janvier der-
nier une diminution importante de
son financement. La situation étant
devenue intenable, Patrick Gentil a
constaté la cessation de paiement
avec l’espoir « de faciliter une reprise
qui aurait des conséquences sociales
minimes e t permettrait d e retrouver la
confiance des clients », affirme-t-il.n
Les meubles de magasin Rasec
en redressement judiciaire
truire 3.000 mètres carrés
supplémentaires pour la logistique,
mais aussi 1.000 mètres carrés pour
accroître la production de légumes
lactofermentés, « un process naturel
ancestral de conservation », rappelle
Charles Christ. Les produits ainsi
transformés bénéficient d’un retour
en grâce. Car les bactéries lactiques
« mangent » le sucre, créent une aci-
dité qui stabilise les légumes tout en
conservant fibres et vitamines, et en
générant des probiotiques.
L’investissement devrait être
achevé en août 2020. Pour ces tra-
vaux. Côté innovation, l’heure est à
la suppression des sels nitrités dans
la charcuterie, également fabriquée
maison, et à la création d’une
gamme de légumes frais.n
méthodes initiales de culture », insiste
Marc Keranguéven. Les 120 produc-
teurs bio du groupement vont culti-
ver cette année 30.000 tonnes de
légumes, on est encore très loin des
450.000 tonnes vendues chaque
année sous la marque Prince de Bre-
tagne. Il est vrai qu’en France, tous
acteurs confondus, seulement 7 %
des surfaces consacrées aux légu-
mes sont bios. Des marges de pro-
gression existent, sachant que 5 % de
la consommation des ménages se
porte sur le bio, un secteur en hausse
de l’o rdre de 4 % par an, même si les
prix pratiqués freinent l a croissance.
Un légume bio est en moyenne
vendu deux fois plus cher que son
pendant conventionnel.
Les coopératives regroupées
sous Prince de Bretagne mettent
aussi l’accent sur les produits culti-
vés sans la présence d’aucun pesti-
cide. Six légumes sont pour le
moment c oncernés s ur les
147 variétés différentes du catalo-
gue. Ce sont notamment les toma-
tes, les échalotes et les brocolis.
D’autres devraient suivre. « Là
encore, nous réclamons du temps
pour éliminer les pesticides de nos
différentes productions. Et il faut que
les consommateurs acceptent de
payer un peu plus cher, ce qui n’est à
ce jour pas évident », confie Marc
Keranguéven.
50 millions d’euros
pour la logistique
Près de 40 % des légumes de Prince
de Bretagne sont exportés, notam-
ment par la Sica de Saint-Pol-de-
Léon (213 millions d’euros de chiffre
d’affaires en 2019), qui concentre à
elle seule la moitié des volumes ven-
dus par la marque collective.
Pour accélérer ses livraisons
lointaines, dans l’est et le nord de
l’Europe notamment, la Sica a
lancé, après une longue série de
recours désormais tous purgés, un
vaste plan de 50 millions d’euros
d’investissements pour la création
d’une plateforme logistique de
7 hectares. Elle sera opérationnelle
au cours du prochain automne et se
substituera à cinq plateformes
réparties dans la zone légumière.n
BRETAGNE
La marque, qui rassem-
ble sept coopératives
de production de
légumes, vient de
retoucher son identité
et lance deux chantiers,
dont la montée en
puissance dans le bio.
Légumes : Prince de Bretagne
fait sa crise de la cinquantaine
La coopérative produira cette année 30.000 tonnes de légumes
bio, sur une production totale de 450.000 tonnes.
Photo Prince de Bretagne / L’œil de Paco
Charles Christ donne une nouvelle
jeunesse aux plats en bocaux
Date de création : 2016
Président : Frédéric Gourjon
Effectif : 4 personnes
Secteur : handicap
Ni cole Buyse
— Correspondante à Lille
MedIn3D a mis p oint un process
numérique pour imprimer en
3D une coque très esthétique,
qui protège les prothèses de
mollet des personnes amputées.
Baptisée « COV3D », elle est trois
fois moins chère que des pro-
duits concurrents et s urtout plus
légère. Imprimée grâce au pro-
cédé FDM (« fused deposition
modeling » ou dépôt de matière
fondue) en huit à douze heures,
elle ne pèse que 300 grammes :
« C’est très important, car la pro-
thèse elle-même représente déjà
du poids », souligne Olivier Gra-
teau, directeur commercial de la
société. Elle se clipse en cinq
secondes, sans sangles ni vis.
Pour en parfaire l’esthétique,
MedIn3D scanne d’abord la
seconde jambe valide pour une
MedIn3D
32
MILLIONS D’EUROS
Le chiffre d’affaires
de Rasec Retail.
reproduction à l’identique, avec
le galbe des muscles. Cette coque
peut être personnalisable grâce
à la technique d’hydropainting,
qui permet de déposer sur la
prothèse des motifs à partir d’un
catalogue. Le patient peut même
créer son propre motif. L a
société, qui a agrégé des techni-
ques existantes, a breveté sa
coque et investi depuis trois ans
1 million d’euros en R&D. « Nous
sommes les seuls à produire une
telle coque en Europe, à ce
prix-là », assure Olivier Grateau,
qui cible les établissements de
santé et les orthoprothésistes
libéraux.
Pa s un dispositif médical
Début mai, la société sera pré-
sente à l’OTWorld à Leipzig, en
Allemagne, l’un des grands con-
grès mondiaux de prothèses et
orthèses. En novembre dernier,
elle avait présenté COV3D en
avant-première au Salon Ispo à
Lyon, d’où elle est revenue avec
une quarantaine de contacts,
notamment de grands cabinets
d’orthopédie. « Ce n’est pas un
dispositif médical, mais de con-
fort, ce qui est très important
pour ces personnes », ajoute-t-il.
En France, p rès de 9.000 person-
nes sont amputées chaque
année, dont 95 % d’un membre
inférieur. B asé à Villeneu-
ve-d’Ascq, MedIn3D est né en
2016 du projet de trois profes-
sionnels de santé décidés à
transformer l’appareillage
orthopédique grâce aux nouvel-
les technologies. n
L’ IDÉE MEDIN3D
Une coque imprimée en 3D
pour prothèse orthopédique
Emmanuel Guimard
@EmmanuelGuimard
— Correspondant à Nantes
La choucroute est aussi un produit
sarthois, comme en témoigne Char-
les Christ, société d’o rigine alsa-
LA PME À SUIVRE
PAYS DE LA LOIRE
L’entreprise sarthoise
s’agrandit pour accom-
pagner sa croissance,
les aliments en bocaux
et les légumes
lactofermentés
revenant en grâce.