Méditerranée Mer Vivante 20e édition

(jfmeinesz) #1

56 Méditerranée - Mer vivante


Gardons la mer vivante


La grande nacre de Méditerranée Ba Be F Pinna nobilis


Parmi les espèces animales
rencontrées dans l’herbier de
posidonies l’une d’elle fait partie des
espèces patrimoniales méditerranéennes. Il s’agit
de la grande nacre Pinna nobilis.
Quoi de plus élégant en effet que ce beau mollusque
dont la forme rappelle celle d’un jambon, d’où son
autre nom de « jambonneau de mer ». Grand cousin
de la moule, il peut atteindre, vers 40 ans, une
longueur de près d’un mètre. L’intérieur des deux
valves est nacré, d’où son nom familier de « grande
nacre ». La grande nacre est une espèce endémique
de la Méditerranée, mais d’autres espèces voisines
existent dans toutes les mers du monde. C’est
cependant la plus grande et, parmi les coquillages
géants, seul le bénitier de la zone Indo-Pacifique

peut atteindre une taille supérieure.
Nos illustres anciens connaissaient bien la grande
nacre. Aristote a décrit ses mœurs et il avait
remarqué la présence fréquente d’un petit crabe,
appelé pinnothère, ne pouvant vivre qu’entre ses
valves. Selon une légende popularisée par l’historien
Pline, ce petit crabe avait pour principale fonction
d’alerter le mollusque : au moindre danger, il pinçait
les branchies de la grande nacre, qui fermait ses
valves. Les particules rejetées par la nacre, ainsi que
divers déchets organiques, sont utilisés par le crabe,
qui fait ainsi office de cantonnier. Quelquefois, il
est remplacé par un couple de crevettes (du genre
Pontonia, p. 61) dont le mâle ressemble à un
minuscule homard rose tendre. La grande nacre
était aussi bien connue des romains : ils utilisaient
les filaments du byssus (servant au coquillage à
se fixer dans le sable) pour tisser des vêtements,
des écharpes et des bonnets. Cette pratique s’est
poursuivie jusqu’à une époque récente à Malte
et à Naples. D’aucuns prétendent que cette fine
chevelure servit à confectionner la « Toison d’Or ».
La grande nacre vit fichée verticalement dans le
sable ou entre les posidonies, avec sa coquille
enfoncée par sa pointe sur le tiers de sa longueur.
Elle est fixée au sédiment par son byssus. Par fort
courant, le coquillage s’enfonce un peu plus et
s’incline.
Hors de danger, le mollusque s’observe en plongée
avec les valves bien entrouvertes dans leur partie
supérieure. L’animal filtre l’eau, amenant aux
branchies l’oxygène et des particules organiques
en suspension qui constituent l’essentiel de sa
nourriture. Comme d’autres coquillages, la grande
nacre peut élaborer des perles de couleur rose,
rouge brique ou rougeâtres. Peu abondantes, ces
perles n’ont aucune valeur marchande.
La grande nacre est hermaphrodite : les produits
Grande nacre

© Alexandre MEINESz


Nardo Vicente, professeur émérite, Aix-Marseille Université,
[email protected]
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