J'irai manger des khorovadz

Le bonheur est dans la fève

soir même ce cycliste sur un vélo bizarre serait son invité. Ils
m’installent dans le canapé-lit de leur bureau.

Le matin suivant Ivan prépare une succulente assiette composée d’une
omelette de tomates de pain perdu et de petits morceaux de viande le
tout assaisonné de persil. Je n’avais pas prévu de rester mais il va
m’inviter à profiter de cette journée lumineuse. Ce sera mon premier vrai
jour de repos. Pas de vélo pas de marche pas de visite. Quarante-quatre
jours après mon départ de Valence ce n’est pas du luxe! Un lit une
douche un repas partagé chez des amis que demander de plus?
L’occasion aussi de procéder à une grande lessive avant d’entrer en
Russie.
Cette nuit je vais déménager et squatter le canapé du bureau de
Sergey qui m’a accueilli à l’arrivée. C’est le responsable de l’association.
Demain le réveil sera ardu. Ce sont mes dernières heures en Ukraine
avant de prendre le bateau au petit matin.
Dans un mois ma vie aura repris son cours normal en France... Je
préfère ne pas y penser! Le retour sera probablement délicat et
nécessitera un temps d’adaptation quand on a vécu pendant deux mois et
demi durant hors les murs en plein air avec cinq sacoches pour seul
bagage. Il faudra que je me plonge sans transition dans tous les dossiers
qui m’attendent. Je ne sais pas comment je vais vivre ce temps de retour
à une vie sédentaire. J’ai du mal à imaginer comment je vais gérer ma
réintégration. J’ai entendu des récits contradictoires sur le retour à « la
vie d’avant ». Certains ont bien supporté d’autres pas du tout ou ont
même sombré dans la dépression. Plus le voyage est long plus la
réadaptation est difficile paraît-il. Il y a de toute façon un avant et un
après. On ne peut pas reprendre sa vie « normale » après une telle
expérience car les priorités sont remises en question. Les relations avec
les autres sont différentes l’approche de nos besoins quotidiens aussi.
Comment ma femme va-t-elle le ressentir? Elle n’a pas pu participer à
cette parenthèse dans mon existence et il est impossible de pouvoir
partager pleinement toutes ces expériences humaines physiques et
spirituelles. Je me sens privilégié de pouvoir vivre cette histoire en