J'irai manger des khorovadz
au-dessus des 1 000 mètres dâaltitude. Durant lâascension de ces monts
de la chaîne du Bazoum je ressens un élancement lancinant dans la
poitrine juste au niveau du cÅur. Que mâarrive-t-il ?... Lâespace dâune
seconde interminable jâimagine le pire.
Pas ici quand même!
à cet instant émerge de mes souvenirs lâincident à Doba quelques
semaines plus tôt en Roumanie le jour où je me suis effondré contre le
parapet. Mon corps me le rappelle. La mémoire du choc. Quand jâai
besoin dâinspirer à fond ma cage thoracique se dilate au maximum mais
lâair ne trouve pas assez de place! Douleur dans mes côtes douleur sur
la côte. Mes cuisses et mes poumons râlent.
Au bout dâune dizaine de kilomètres je découvre lâentrée dâun tunnel
évitant le col. Je ne lâavais pas remarqué sur la carte pourtant il a été
ouvert en 1970. La déception mâeffleure car jâattendais cette « épreuve »
de lâascension du sommet! Une ancienne route existe certainement mais
elle ne doit plus être praticable. Je suis condamné à ces 2 km sous une
voûte sans éclairage ma hantise. Je redoute toujours les traversées de
tunnel dans ces conditions car ce nâest pas ma petite lampe frontale qui
va améliorer la situation. Les voitures me frôlent les camions me rasent
et me déstabilisent ne prêtant pas attention à un pauvre cycliste terrorisé.
On se fait petit et on avance. Difficile de se jeter sur le côté en cas
dâincident. Le trottoir est étroit et la paroi toute proche. Je redoute le nid
de poule invisible et fatal dans le noir. Quel soulagement lorsque je vois
poindre la lumière de la délivrance! à la sortie du tunnel je mâarrête
pour mâen imprégner évacuer toute la noirceur de ce lieu et laisser
retomber la tension ressentie pendant la traversée de ce trou obscur.
Jâaborde enfin la descente finale du jour vers Vanadzor. Dans les
dernières courbes les occupants dâune voiture qui monte en face me font
de grands signes. Ce sont les amis qui mâattendaient. Après mon coup de
fil du matin modifiant ma destination les voilà venus à ma rencontre!
Parvenus à ma hauteur ils font demi-tour et je pédale en suivant leur
véhicule pendant une dizaine de kilomètres jusquâau lieu de rendez-vous
prévu. Là quelle nâest pas ma stupéfaction et câest peu dire : un comité
de réception mâattend! Il y a même une cérémonie officielle afin de