Libération - 18.10.2019

(Ron) #1
A cinq mois des municipales,
l’exécutif affiche sa préoccu-
pation envers de possibles
«listes communautaires».
Dans un entretien au Parisien
publié jeudi, le ministre
des Collectivités locales,
­Sébastien Lecornu, dénonce
comme un «fléau» la possible
participation de telles listes,
ou de candidats communau-
taristes sur les listes des partis
traditionnels. Il appelle à des
réponses «autant juridiques
que politiques», tout en sem-
blant écarter une interdiction.
«On voit germer dans cer­taines
villes du Nord, mais aussi dans
de grandes agglomérations,
comme Lyon, Paris ou Mar-
seille, un certain nombre de
candidatures poten­tielles dont

on devine clairement l’orienta-
tion communautariste», es-
time le mi­nistre, au diapason
d’autres responsables politi-
ques. Le président de la région
Hauts-de-France, Xavier Ber-
trand, a réclamé leur interdic-
tion, le ministre des Comptes
publics, Gérald Darmanin,
s’est prononcé pour une ex-
tension du principe de neu-
tralité religieuse à tous les élus
locaux. Mardi à l’Assemblée
nationale, Edouard Philippe
a annoncé «réfléchir aux
moyens d’éviter la menace que
[ces listes] représentent».
Exemple souvent cité, l’Union
des démocrates musulmans
français, une jeune formation
se comparant «au Parti chré-
tien-démocrate de Christine

Boutin», et qui souhaite pré-
senter une cinquantaine de
listes en mars. Les interdire
ne serait pas «simple» juridi-
quement, selon Lecornu, en
raison de la difficulté à définir
la nature communautariste
d’une candidature.
A une évolution du droit, le
ministre semble préférer une
«bataille culturelle», souhai-
tant que les partis veillent «à
ce que leurs candidats, y com-
pris des maires sortants, n’ac-
cueillent pas des candidatures
qui posent question sur leurs
listes». Le droit existant per-
met en outre, souligne-t-il, de
se montrer «intraitable sur les
possibles dérapages verbaux et
autres atteintes aux lois de la
République en matière de ra-

cisme, d’antisémitisme, de révi-
sionnisme, avec poursuites de-
vant les tribunaux aussi sou-
vent que nécessaire».
Lecornu se dit en revanche fa-
vorable à des évolutions légis-
latives sur le respect de la laï-
cité par les élus municipaux.
Il évoque un possible «renfor-
cement du contrôle de légalité
pour casser les décisions non
respectueuses de la loi. En-
suite, il faut oser suspendre les
maires qui se livreraient à
des atteintes caractérisées à
la laïcité et qui détourne-
raient leurs pouvoirs de po-
lice». L’ex-LR se prononce en-
fin en faveur d’une obligation
de neutralité religieuse pour
les maires et leurs adjoints.
Dominique Albertini

Sébastien Lecornu s’attaque


aux «listes communautaires»


Sophia Chikirou se charge du
«cas ­Mélenchon» La communi-
cante insoumise a diffusé «en avant-
première», mercredi, son ­documentaire (coréalisé avec
Jean-Michel Vaude), Lawfare : le cas Mélenchon sur les
déboires judiciaires de l’ex-candidat à la présidentielle.
Un film qui dénonce «une tactique d’instrumentalisation
de la justice à des fins politiques» et compare carrément
le sort du leader de LFI à celui de Lula. Photo AFP

LIBÉ.FR

Voile 1 Buzyn mal à l’aise avec
le «pas souhaitable» de Blanquer


Après avoir divisé au sein
de la majorité parlemen-
taire, Jean-Michel Blan-
quer est en train de mettre
un joyeux bordel au gou-
vernement. Sur France 2
jeudi, Agnès Buzyn l’ad-
met : sa sortie sur le voile
qui ne serait pas «souhai-
table dans notre société» la
gêne. «[Cette phrase] me
met mal à l’aise parce que
c’est un débat qui mérite
du temps et que, quand on le simplifie en une phrase, on peut
stigmatiser des personnes – ce n’est pas le choix que nous
avons. On peut aussi stigmatiser une religion – ce n’est pas
non plus le choix que faisons», lance la ministre de la Santé,
tout en admettant «un problème de communautarisme qu’il
faut traiter». «Lancer des slogans nous met tous dans une
forme de radicalité qui ne traduit pas la complexité de la
situation», ajoute Buzyn. Photo AFP


Voile 3 Aurore Bergé s’astreint
à une micro-diète médiatique


Une des solutions pour sortir de ce «merdier» est sans
doute d’arrêter de parler. C’est d’ailleurs ce que vient de
décider Aurore Bergé. Après s’être fait remarquer en disant
vouloir voter la proposition de loi d’Eric Ciotti pour inter-
dire le voile dans les sorties scolaires, la porte-parole de
LREM va, selon nos informations, s’astreindre à plusieurs
jours de diète médiatique. L’occasion, pour la députée des
­Yvelines, de se faire oublier mais aussi d’apaiser les ten-
sions au sein de son propre camp. Depuis mardi soir, plu-
sieurs députés de la majorité se sont désolidarisés des pro-
pos de Bergé, tweetant «#NotInMyName». «Laurence
Vanceunebrock-Mialon, Coralie Dubost et Aurore Bergé ont
passé tout l’examen de loi bioéthique à se taper dessus [ce
que dément Dubost, ndlr]. Je suis pas sûr que les deux pre-
mières soient pourtant très intéressées par la laïcité. Elles
utilisent ce sujet pour tomber sur Aurore Bergé», explique
un cadre du groupe LREM. Une embrouille sur les raisons
de ­l’embrouille? Sy. C.


Voile 2 Vingt parlementaires
à la rescousse de Blanquer


Une vingtaine de parlementaires soutenant Jean-Michel
Blanquer et ses déclarations sur le voile «pas souhaitable»
se sont retrouvés mercredi après-midi au ministère
de l’Education nationale, à Paris. A l’occasion de ce petit
rendez-vous, où l’on pouvait notamment croiser les dépu-
tés La République en marche (LREM) ­Jean-Baptiste Mo-
reau, Laurianne Rossi ou encore ­Anne-Christine Lang,
l’idée de rédiger un texte de soutien au ministre a germé.
«Ils ont une tribune en préparation mais on va la débran-
cher avant», nous assure un cador de la majorité, fatigué
de voir son camp se diviser sur le sujet du voile islamique
et de la ­laïcité : «La vérité, c’est que les deux tendances sont
plutôt de force équivalente dans le groupe. Il n’y a pas un
camp qui domine l’autre en termes de force. Mais de toute
façon, les gens s’en moquent de notre position sur le voile.
Ce qu’on attend maintenant, c’est de voir comment
on se sort de ce merdier.» Par le haut, ça risque d’être
­compliqué. Sy.C.


25%


C’est la part de salariés
d’EDF qui, selon la di-
rection, étaient jeudi
en grève à l’appel de
­l’intersyndicale pour
la deuxième journée de
mobilisation contre
le projet de réorganisa-
tion «Hercule». Objectif :
maintenir la pression
contre ce plan qui néces-
site des discussions avec
Bruxelles, reportées en
attendant la nouvelle
Commission. Il prévoit
d’un côté un «EDF bleu»
renationalisé compre-
nant le nucléaire, les bar-
rages et le transport de
l’électricité, et de l’autre
un «EDF vert», avec
­Enedis (distribution),
EDF Renouvelables, et la
direction du commerce,
qui serait introduit en
Bourse à hauteur de 35 %.

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Têtes à craques

Libération Samedi 19 et Dimanche 20 Octobre 2019 http://www.liberation.fr  facebook.com/liberation  @libe u (^27) Page 40 : Cinq sur cinq /Page 41 : On y croit /Page 42 : Casque t’écoutes? /Les WampasTrans d’enferHafsia Herzi
sur ViagogoHaro
ILLUSTRATION SARAH BOUILLAUD
Libération Samedi 19 et Dimanche 20 Octobre 2019 http://www.liberation.fr  facebook.com/liberation  @libe u 37
Recueilli parALEXANDRA SCHWARTZBRODPhotosFRANKENBERG ROBERTO
puis plusieurs décennies Aubervil-librairie et 500 mètres de l’école Ju-Saint-Denis en 1949, il habitait de-chant populaire les-Ferry d’où est parti le succès du Bois (Val-de-Marne), dans le quar-tier des Rigollots. A deux pas d’une Il est aminci et rayonnant. De-tement de Fontenay-sous-Daeninckx vit dans un appar-puis quelques mois, Didier la Madelon. Né à
liers avec sa femme Jocelyne, ren-contrée au foyer des jeunes travailleurs de la ville. Après avoir longtemps résisté, il a préféré quit-ter le villon avec jardin pour fuir une ville paupérisée et abandonnée à elle-même. Une situation qu’il raconte «petit paradis» qu’était son pa-
bien dans son dernier roman noir, Artana! Artana !où Aubervilliers est rebaptisé Cour-villiers, une ville à l’économie do-minée par le trafic de drogue, le ra-cisme et le népotisme.Au fil des décennies, ses cheveux dans le cou, sa moustache et sa bar-biche sont devenus la marque de fa- (Gallimard, 2018),
brique de Daeninckx. Et aussi son engagement politique, à la gauche de la gauche, qui l’a amené depuis son premier roman noir, en 1982, à critiquer sans relâche la colonisa-tion, le négationnisme, le racisme, le mépris avec lequel les plus dému-nis sont traités. Un combat que l’on
sant cueil de 77 de ses nouvelles cou-laquelle on a tant de souvenirs? Difficile de quitter une ville dans vient de publier chez Verdier, re-retrouve à chaque ligne de l’impo-vrant plus d’un siècle et demi d’his-toire de France.Une maison qui compte tant de Roman noir de l’Histoire qu’il
livres ?Il y a des poches de misère absolue dans lesquelles on finit par étouffer. Et à Aubervilliers, la démocratie a été abolie au profit du clientélisme. Les livres, oui, on en avait accumulé des milliers. Ils Suite page 44
Pages 46-47 : Olivier Rolin/ Mémoire vive d’un voyageurPage 47 : Sally Rooney/ Terne modernitéPage 50 : Pierre Guyotat/«Comment ça s’écrit»
Didier DaeninckxRencontre avec
«Moi aussi, je raconte la disparition
d’une culture»
Didier Daeninckx au bois de Vincennses le 11 octobre.
Libération Samedi 19 et Dimanche 20 Octobre 2019 http://www.liberation.fr  facebook.com/liberation  @libe u 43
Libération Vendredi 18 Octobre 2019 http://www.liberation.fr f facebook.com/liberation t @libe u 15

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