Liberation - 2019-08-10-11

(Ron) #1

CULTURE/


de parcours),le Prince de Bel-Aira surtout su
tirer sur la corde émotionnelle, ce qui n’est
pas donné à toutes les sitcoms, et c’est proba-
blement ce mélange qui en a fait une pièce de
pop culture chérie à travers le monde. Ainsi
l’épisode «Papa a encore une excuse» en sai-
son 4 prend tous les téléspectateurs par sur-
prise, en exposant sans l’édulcorer l’irréconci-
liable abysse qui sépare le héros de son père
défaillant: celui-ci réapparaît juste pour mon-
trer qu’il ne sait pas faire autre chose que dis-
paraître.«Pourquoi ne veut-il pas de moi ?»
conclut un Will Smith brisé. A la fin de cet épi-
sode, pour une des seules fois de l’histoire de
la série, pas de rires, mais un grand silence
vide tandis que l’Amérique sèche ses larmes
et que l’apprenti comédien se trouve propulsé
dans une autre dimension : non seulement
celle d’acteur possiblement sérieux, mais sur-
tout de surface d’identification plus large
qu’il n’y paraissait. Les orphelins et les déraci-
nés peuvent aussi se projeter dans cette tête
à claques en tee-shirt rigolo. Le basketteur
superstar LeBron James, héros américain qui
a grandi sans père, confesse qu’il pleure à
chaque fois qu’il regarde cet épisode depuis
qu’il l’a vu pour la première fois à 8 ans.
Revoirle Prince de Bel-Airtrente ans après
vaut donc aussi comme une sorte de formi-
dable laboratoire pour observer la fabrique
d’une star – qui allait devenir une décennie
plus tard un des acteurs les plus puissants
de Hollywood. Lorsque cette superstar qui
s’ignore déboule dansle Prince de Bel-Air,af-
fublée de sempiternelles casquettes fluo por-
tées sur le côté et de tee-shirts bariolés (sa
garde-robe s’affinera avec les saisons, deve-
nant moins caricaturale), tout est fait pour
surligner le contraste avec les canapés à fleurs
fanées et les respectables meubles en bois
sombre de son environnement d’accueil.
Il clignote de partout.


AIMANT À SYMPATHIE
Mais force est de constater qu’il n’avait pas
besoin de ça pour se distinguer : dès les pre-
mières minutes, et pendant les six années à
venir, c’est une machine à énergie qui se met
en branle, alternant les mimiques, les ac-
cents, dispensant cris, sons, gestes avec un
abattage certain. Une sorte d’aimant à sympa-


thie presque épuisant. Ce qui frappe en revi-
sionnant la série, c’est l’amplitude physique
du gaillard à l’intérieur des proportions télé-
visuelles. La sictom est émaillée de ces mo-
ments où Will Smith se met à danser et où son
grand corps se déplie littéralement. Il lui suf-
fit d’ouvrir les bras pour toucher les deux cô-
tés du format 4/3, sa tête frôlant le bord supé-
rieur. Elastique et souple, il occupe toute
l’image. Une de ses blagues récurrentes
consiste d’ailleurs à se moquer de son cousin,
qui est au contraire«petit»pour son âge, com-
pressé, parfait pour le petit écran. Il y a,
concernant Will Smith, ce truc de cadre qui
est là dès le début : ce type semble bien trop
grand pour la télé.

STAR-SYSTEM POSTRACIAL
Il a 28 ans quand la série s’achève. Dans la tra-
dition de la sitcom lui revient l’honneur
d’éteindre la lumière et de quitter le dernier
cette maison-télévision dans laquelle il vient
de passer six années. Quelques mois plus tard
s’enchaînentIndependence Day, Men in Black
et son voyage intergalactique dans les hautes
sphères du star-system postracial. Mais ce
dont il ne pouvait se douter, c’est que l’his-
toire le sommerait de se mesurer à nouveau
à son «Fresh Prince» intérieur. C’est du moins
ce que laisse pressentir le prochain Ang Lee,
Gemini Man(sortie française prévue le 2 oc-
tobre), où il joue un tueur sur le retour
confronté à un clone de lui-même à 25 ans,
plus efficace, plus féroce, et capable d’antici-
per tous ses gestes.
Quelle propension parfois poétique de Hol-
lywood à mettre les stars face à leur statut, ou
à leur filmographie : comme le Tom Cruise
d’Edge of Tomorrow,qui devait trouver la
force de se lever chaque jour pour rejouer un
nouveau blockbuster imposé, Will Smith va
se retrouver face à là d’où il vient. Plus retors
encore : il va devoir le jouer, puisqu’il inter-
prète les deux rôles grâce aux outils numé-
riques de«de-aging».Avec cette difficulté
«technique» supplémentaire pour l’éternel
grand dadais qui ne fait toujours pas son âge,
à 50 ans: comment vont-ils rajeunir l’homme
qui ne vieillit jamais ?•

LE PRINCE DE BEL-AIRSur Netflix.

Libération Samedi10 et Dimanche11 Août 2019 u 25


Le jeune Will entouré d’oncle Phil et de tante Viviane.PHOTO NETFLIX


SWANN ARLAUD MAUD WYLER


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SWANN ARLAUD MAUD WYLER


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