Le low-cost
à l’allumage
Face aux manques de moyens, les agences spatiales
cherchent des solutions inventives pour satisfaire leur
rêve de conquête spatiale. A la suite d’un concours,
plusieurs équipes de passionnés ont imaginé comment
retourner sur la Lune à moindre coût. Devenant in fine
de véritables start-up spatiales, partenaires de la Nasa.
«L
es technologies
dont on a besoin
pour retourner
sur la Lune sont
largement maîtrisées. S’il y a un
défi, c’est un défi fiscal – la quantité
d’argent que la nation peut se per-
mettre de dépenser.»En 2009, Jeff
Hanley était responsable, à la Nasa,
du programme Constellation qui
devait renvoyer des astronautes
américains sur la Lune en dévelop-
pant de nouvelles fusées. Il connais-
sait donc bien son sujet quand il ex-
pliquait à Space.com«pourquoi ilMartin ou Northrop Grumman
sont des sous-traitants de la Nasa
depuis des décennies. SpaceX rem-
plit également ce rôle de contrac-
tuel depuis 2006, lorsque l’agence
américaine l’a choisi pour dévelop-
per un vaisseau cargo capable de
ravitailler l’ISS. Mais l’entreprise
d’Elon Musk a commencé à tra-
vailler en parallèle à la conception
d’un lanceur réutilisable, dont le
premier étage pourrait revenir se
poser sur une barge en mer, et voler
à nouveau après remise en état.
Cette technique rapidement maî-
trisée a permis à SpaceX de casser
les coûts d’un lancement de fusée:
à partir de 62 millions de dollars
(56 millions d’euros) pour un vol en
Falcon 9, là où les lanceurs équiva-
lents (Atlas V, Ariane 5...) dépas-
saient les 150 millions de dollars
(135 millions d’euros). SpaceX est
ainsi devenu la star du low-cost,
forçant la concurrence à suivre le
mouvement et entraînant derrière
elle une myriade de nouvelles en-
treprises à travers le monde, qui
abaissent depuis quelques années
les barrières de l’accès à l’espace –àPar
CAMILLE GÉVAUDANUN ÉTÉ DANS LA LUNE
Cinquante ans après la mission Apollo 11, la Lune fait de nouveau rêver. Terrain de
jeu des Etats voulant montrer leur savoir-faire et des start-up qui cassent les coûts
des missions spatiales; base d’entraînement en attendant le grand bond vers Mars;
centre touristique pour milliardaires ou mémoire du Système solaire...
Chaque samedi durant tout l’été,Libéa rendez-vous avec la Lune.
est si difficile d’y retourner»,qua-
rante ans après les missions Apollo.
Le savoir-faire n’a pas été perdu:
c’est juste que ça coûte trop cher. Là
où les Etats-Unis accordaient 4,4%
de leur budget fédéral à la Nasa
pour faire la nique aux Soviétiques
en 1966 (soit plus de 45 milliards de
dollars constants), l’agence spatiale
n’en touche plus aujourd’hui
que 0,50% (soit 21 milliards de dol-
lars). Difficile d’avoir les mêmes
ambitions avec moitié moins d’ar-
gent. C’est d’ailleurs pour cela que
le programme Constellation a été
annulé en 2010:«Hors budget, en
retard, et pas assez innovant», ju-
geait l’administration Obama.
Cette époque moderne où l’on se
remet à rêver de conquête plané-
taire sans en avoir les moyens a
permis l’émergence d’un nouvel
écosystème du secteur spatial, qui
s’appuie sur des entreprises privées
et une stratégie de baisse des coûts,
que l’on regroupe sous l’expression
un peu fourre-tout de «NewSpace».
Le privé a toujours collaboré étroi-
tement avec les grandes agences
Le rover ECA des Indiens de TeamIndus.PHOTO TEAMINDUS spatiales – Boeing, Lockheed
Vue d’artiste de l’atterrisseur Peregrine, d’Astrobotic.PHOTO ASTROBOTIC
26 u Libération Samedi10 et Dimanche11 Août 2019