qués par un «pédagogue» – évolua elle aussi en
se plaçant sous les auspices helléniques. Le «père
de la poésie latine», grâce auquel l’enseignement
de cette langue put se développer, était lui-même
originaire de la «Grande Grèce». Livius Androni-
cus était né à Tarente vers 280 av. J.-C., alors que
cette florissante colonie du sud de l’Italie s’oppo-
sait à l’expansion romaine. Capturé, il fut long-
temps le précepteur des enfants d’une riche
famille. Finalement affranchi, il traduisit Eschyle,
Sophocle et Euripide en latin, et exerça comme
grammaticus (terme souvent traduit par «gram-
mairien»), enseignant les deux langues aux jeunes
aristocrates. Son Odusia, transposition de L’Odys-
sée d’Homère, fut le premier texte en latin utilisé
par les écoles de Rome, servant de base pour for-
mer plusieurs générations de ses citoyens. Andro-
nicus fit une autre contribution décisive à la culture
locale. Il rédigea en 240 av. J.-C. – à l’occasion des
premiers «jeux scéniques» de la ville célébrant la
victoire sur Carthage – la première œuvre litté-
raire en latin. S’inspirant d’un original grec, il donna
ainsi naissance au théâtre romain, cinq cent qua-
torze ans après la fondation de la cité.
A
partir du IIe siècle av. J.-C., beaucoup de
Grecs, des pédagogues renommés, vin-
rent enseigner à Rome. Ils étaient embau-
chés par des familles aristocratiques. Puis
ce furent les jeunes patriciens qui se rendirent à
Athènes ou en Asie Mineure pour y suivre les
leçons des maîtres de rhétorique, cet outil si pré-
cieux pour leurs futures carrières politiques : c’est
à Rhodes que Cicéron alla se former à l’art ora-
toire avant d’en devenir l’indépassable génie latin.
Et c’est ainsi que, rapidement, toute l’élite romaine
devint parfaitement bilingue. Elle accueillit alors
en nombre les philosophes grecs qui l’initièrent
au pythagorisme, à l’épicurisme et au stoïcisme.
Cette dernière pensée connaîtra la plus large dif-
fusion, guidant Cicéron, Sénèque et les empereurs
Marc-Aurèle et Hadrien.
A la même période, les cénacles hellénisants
se multiplièrent à Rome. Le plus ancien et célèbre,
baptisé le «cercle des Scipions», du nom d’une
famille dont plusieurs membres avaient trouvé la
gloire au cours des guerres puniques, patronna de
nombreux artistes et lettrés grecs, parmi les-
quels l’historien Polybe, le philosophe stoïcien
DES SAVOI RS
DIFFUSÉS AUPRÈS DE
L'ÉLITE ROMAINE
En confiant l’éducation de ses
enfants à des érudits grecs,
Rome s’ouvrit aux connais-
sances de la civilisation hellé-
nistique : tragédie, philosophie,
médecine ou astronomie...
Sur cette toile du XIXe siècle,
Gustave Courtois représente
le mathématicien grec
Archimède avant sa mort
lors de la prise de Syracuse
(212 av. J.-C.). Son ensei-
gnement se propagea néan-
moins dans le monde latin.
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